N’DJAMENA, 12 septembre (Xinhua) — Dans les structures de santé de la capitale et des villes de province du Tchad, le paludisme prédomine. Pour le gouvernement et ses partenaires, le salut passe par la distribution des moustiquaires imprégnées d’insecticide à longue durée.

Depuis deux mois, les hôpitaux de district, les centres de santé et les cliniques privées de N’Djaména, la capitale du Tchad, ne désemplissent pas de patients souffrant de paludisme. Les salles d’hospitalisation sont débordées, certains malades installés dans les couloirs ou sous des tentes de fortune.

“Nous avons observé un taux élevé de paludisme et de patients, ainsi qu’un problème d’hygiène”, reconnaît Hassan Soukaya Youssouf, secrétaire d’Etat tchadien à la Santé publique. La semaine dernière, il a fait un tour dans quelques structures de santé de N’Djaména pour constater l’ampleur de la situation.

“Le paludisme reste un problème majeur de santé publique au Tchad et représente la principale et première cause de mortalité et de morbidité chez les enfants de moins de cinq ans. Cette maladie prédomine sur la quasi-totalité du pays avec une forte prévalence dans la zone soudanaise (au Sud) et sahélienne (Centre et Est). Les enfants de moins de cinq ans et les femmes enceintes sont les plus touchés”, indique Bruno Maes, représentant de l’UNICEF au Tchad.

La situation épidémiologique risque de s’aggraver, selon Ndolembai Njesada, représentant au Tchad de “Malaria no more” (une ONG américaine très impliquée dans la lutte contre le paludisme). “En pareille période, le nombre de personnes souffrant du paludisme était à moins de 3.000 cas avec un nombre réduit de décès (503). Or, déjà dans la 31ème semaine de l’année 2013, le nombre des paludéens a atteint près de 400.000 cas, avec plus de 50% de cas de décès”, précise-t-il.

L’analyse épidémiologique du Tchad montre que 98% de la population vivent dans des zones à risque au paludisme. Selon l’Enquête sur les indicateurs du paludisme 2010, la prévalence du paludisme est de 29,8% au Tchad. Cependant, cette prévalence varie selon les tranches d’âge; elle est de 35,8% chez les enfants de moins de 5 ans, de 39,3% chez les enfants entre 5 à 14 ans et de 15,2% chez les enfants plus de 15 ans.

Trois facteurs expliqueraient cette recrudescence du paludisme, selon le représentant de “Malaria no more”. D’abord l’environnement qui favorise la reproduction de l’anophèle, l’agent pathogène du paludisme. En effet, avec les fortes pluies qui s’abattent sur le pays, la presque totalité de la ville de N’Djaména est dans l’eau, comme la plupart des villes de province.

Le deuxième facteur est lié au déficit de communication sur l’enjeu du paludisme. “Une étude menée au cours de l’année 2012 a montré que seulement 35% de la population tchadienne a entendu le message de prévention contre le paludisme”, déplore Ndolembai Njesada.

Le dernier facteur est la distribution tardive des moustiquaires imprégnées d’insecticide à longue durée.

Il y a un mois, le Fonds de soutien aux activités en matière de population et de lutte contre le sida (FOSAP) a signé un accord de financement de plus de 20 millions d’euros avec l’UNICEF pour l’organisation d’une campagne de distribution de 5,3 millions unités de moustiquaires imprégnées d’insecticide de longue durée d’action dans treize régions du Tchad.

Cet accord de financement s’inscrit dans le cadre du Mécanisme transitoire de financement et du Nouveau modèle de financement du Fonds mondial contre le sida, la tuberculose et le paludisme. L’UNICEF a été retenu comme récipiendaire secondaire de ce financement pour la mise en œuvre optimale de ce programme. Au total, le Tchad a bénéficié dans le cadre de ce mécanisme d’une subvention d’un montant de plus de 25 millions d’euros.

En appui aux efforts mis en œuvre par le gouvernement, cette campagne de distribution de masse de moustiquaires débutera en 2014. Elle vise à couvrir gratuitement 100% de la population (soit plus de 9,6 millions de personnes dans treize régions cibles) par des moustiquaires imprégnées de longue durée d’action d’ici fin 2014.

“Au côté du gouvernement du Tchad, l’UNICEF déploiera tous les moyens pour que cette campagne de distribution de masse soit un succès. Nous nous fixons également pour objectif d’atteindre les populations difficiles à atteindre vivant parfois dans des zones reculées dans les 48 districts cibles de ce programme”, promet Bruno Maes.

La distribution des moustiquaires se fait à travers deux voies au Tchad. Il y a, d’une part, la distribution de routine dans les structures sanitaires ciblant les enfants de moins de 1 an ayant complété leurs séries de vaccination et les femmes enceintes et, de l’autre, la distribution de masse ciblant la population générale.

En 2011, à travers le financement de la Banque Islamique de développement (BID) notamment, le pays, appuyé par ses partenaires, a réalisé des campagnes de distribution de masse de moustiquaires imprégnées d’insecticides de longue durée d’action dans 9 régions, au bénéfice de plus de 3 millions de personnes.

“C’est bien que l’Etat préconise des moustiquaires à la disposition de tout le monde, mais chacun doit en faire un bon usage”, conclut Dr Mbayo Marcel, responsable du centre de santé de Walia, dans le IXème arrondissement de la capitale. Il déplore que beaucoup de moustiquaires distribuées servent notamment à la pêche.

Par Geoffroy Touroumbaye