N’DJAMENA, 15 juin (Xinhua) — Au Tchad, où les besoins en sang et produits sanguins dépassent de loin l’offre, le Centre national de transfusion sanguine (CNTS) doit relever le double défi de fournir aux hôpitaux du sang en quantité suffisante tout en assurant sa qualité et sa sécurité.

“Beaucoup d’efforts ont été faits en matière de sensibilisation, d’information et d’éducation, mais le taux de donneurs volontaires reste très faible. Comme le changement de comportement dans ce domaine peut prendre du temps, il est toujours nécessaire de continuer d’intensifier les campagnes de sensibilisation”, déplore Dr Mbanga Djimadoum, directeur du CNTS.

Au Tchad, les besoins en produits sanguins sont d’environ 110.000 unités, selon des données du CNTS. En 2013, seulement 69.255 unités ont été collectées et testées pour le VIH, la syphilis et les hépatites B et C. Par ailleurs, sur ce même nombre, 5% proviennent des donneurs volontaires. Autant de chiffres qui montrent que beaucoup reste encore à faire.

A l’occasion de la journée mondiale de donneurs de sang, organisée samedi sous l’égide de l’OMS, le CNTS a décidé de multiplier les manifestations pour promouvoir le don de sang volontaire et assurer une disponibilité en sang sûr.

“Cette campagne est une opportunité pour mener une campagne de masse en vue de recruter de nouveaux donneurs. En 2013, seulement 69 nouveaux donneurs volontaires ont été recrutés au cours de cette journée”, précise Dr Mbanga Djimadoum.

Il s’agit plus spécifiquement, pour le CNTS, de primer les donneurs réguliers et/ou les organisations qui ont contribué efficacement à la promotion du don volontaire, de faire un plaidoyer pour le recrutement de nouveaux donneurs, d’accroître la collecte du sang auprès des volontaires en vue de constituer des stocks, et de faire un plaidoyer à l’endroit du ministère de la Santé publique pour des efforts supplémentaires pour atteindre, à court terme, 100% de don de sang volontaire bénévole et non rémunéré.

Depuis trois ans, le CNTS du Tchad, né sur les cendres de l’ancienne “Banque du sang”, s’est vu doter d’un bâtiment flambant neuf, situé dans l’enceinte de l’Hôpital général de référence nationale, la plus grande structure sanitaire du pays. Malgré les moyens techniques importants mis en œuvre, le Centre est peu fréquenté et a du mal à assurer son rôle d’intermédiaire entre les malades et les personnes en bonne santé par manque de donneurs volontaires.

A la création de la Banque de sang en 1972, le nombre des donneurs était de 200 à 244 par an. Ce nombre est passé à plus de 3.524 volontaires en 1978, puis il a chuté définitivement avec la guerre civile qu’a connue le pays en 1979.

“Ce grand nombre de donneurs volontaires dans les années 70 était grâce à l’émission de la Croix Rouge au Tchad (CRT), dénommé +Antenne CRT+ et qui passait sur les ondes de la radio nationale et encourageait la population à faire des dons gratuits de sang”, se souvient Richard Djasra, infirmier à la retraite.

La campagne de la journée mondiale du don de sang 2014 a été placée sous le thème “Un sang sécurisé pour sauver des mères”.

“L’OMS encourage tous les pays, ainsi que ses partenaires nationaux et internationaux travaillant dans le domaine de la santé maternelle et de la transfusion sanguine, à élaborer un plan d’activités mettant l’accent sur l’importance d’un accès rapide à du sang et à des produits sanguins sécurisés pour prévenir les décès maternels”, indique le directeur du CNTS.

Selon une enquête réalisée conjointement en 2011 par la Banque mondiale et trois agences onusiennes (OMS, UNICEF et UNFPA) sur “les tendances sur la mortalité maternelle dans le monde”, le Tchad est le deuxième pays au monde où les femmes meurent le plus en donnant la vie avec 1.200 décès pour 100.000 naissances vivantes, derrière l’Afghanistan et ses 1.400 décès.

La mortalité néonatale y est de 39 décès pour 1.000 naissances, ajoutée à un taux d’accouchements assistés par un personnel qualifié à 23% et une insuffisante disponibilité et utilisation des soins obstétricaux et néonataux d’urgence.

“Une hémorragie grave au cours de l’accouchement et après celui-ci est une cause majeure de mortalité, de morbidité et d’incapacité à long terme. Toutefois, l’accès à du sang et à des produits sanguins sécurisés et en quantité suffisante, et le recours rationnel et sûr à la transfusion sanguine demeurent des défis majeurs dans de nombreux pays du monde, particulièrement le Tchad”, déplore Dr Mbanga Djimadoum.

Il ajoute, par ailleurs, que la procédure pour faire un don de sang est des plus simples: “il faut nous libérer du poids des us et coutumes et des religions, il faut avoir juste la volonté de le faire et franchir le palier du CNTS”.

Au siège du centre, un technicien réalise d’abord quelques examens sommaires pour déterminer le poids du donneur, son âge qui doit être compris entre 17 et 55 ans, sa tension artérielle, son taux d’hémoglobine pour savoir si le donneur a assez de sang pour le faire. Puis vient la phase de prélèvement qui doit être égal au 10% du poids du corps et dure en moyenne 10 à 15 mn.

Le sang prélevé est ensuite soumis à des examens en laboratoire pour déterminer s’il ne contient pas le virus du sida, celui de l’hépatite B ou C et la syphilis avant de faire l’objet d’un groupage sanguin. Il sera gardé dans des unités frigorifiques et mis gratuitement à la disposition du malade à la demande du médecin traitant.

Grâce à un budget aligné sur les fonds pétroliers et qui lui assure une certaine autonomie, le CNTS offre une petite collation (sandwich et boisson non alcoolisée) aux donneurs volontaires qui viennent faire le geste qui sauve.