NDJAMENA (© 2013 Afriquinfos) – Etre psychologue au Tchad n’est pas une mince affaire : les problèmes de santé y sont souvent perçus comme des possessions ou des maléfices. Les psys sont-ils assermentés pour guérir par sorcellerie ?

Si vous avez mal à la tête ou si vous pensez devenir fou, deux solutions : il fait trop chaud, ou bien un démon maléfique possède votre corps et le torture de l’intérieur. L’idée que quelqu’un ait des problèmes mentaux d’ordre médical ne viendrait à l’esprit de personne.

Le Tchad est l’un des pays les plus pauvres au monde, et l’un de ceux les plus marqués par l’instabilité politique et la violence. Depuis plus de trente ans, les populations subissent guerres civiles, rébellions et coups d’Etats à la pelle, sans parler des conditions sanitaires alarmantes.

Mauvais diagnostic

Autant de facteurs qui génèrent des traumatismes psychologiques en grand nombre. Dr Egip Bolsane, le seul psychologue travaillant actuellement au Tchad, ne le sait que trop bien. Sauf qu’en plus de présenter une multitude inquiétante de cas de schizophrénie et de paranoïa, la population tchadienne se méfie comme de la peste des « médecins de l’âme ».

« Ici, dans l’opinion publique, cela (consulter un psychologue) veut dire que quelque chose va vraiment très mal dans votre tête, et c’est sans doute parce que vous êtes possédé » témoigne-t-il à la BBC. Difficile de faire comprendre que le problème est tout autre, ce qui complique le traitement des malades.

Manque d’éducation, de moyens, d’espoir

Le psychologue diplômé en France – les études de psychologie n’existent pas au Tchad – explique que cette diabolisation de son métier vient en partie d’un manque d’éducation, ainsi que du tabou des problèmes mentaux. « Ici, personne ne parle jamais des questions de santé mentale » déplore-t-il.

Dans une culture où la sorcellerie, les sorts et les esprits sont d’actualité, il est bien difficile de faire comprendre que, parfois, un problème est purement médical, et non spirituel.

Sans compter le cruel manque de moyens financiers qui handicape la médecine tchadienne : très peu d’hôpitaux, de matériel, des médicaments introuvables ou difficiles à se procurer… Le Dr. Egip Bolsane ne bénéficie d’aucune aide gouvernementale, et ses patients ont parfois du mal à payer ses honoraires.

Une situation préoccupante qui mettra bien longtemps à changer, à moins d’un tour de magie…

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