PARIS – Willy Rozenbaum, codécouvreur du virus du sida avec l’équipe de Luc Montagnier, n’aurait pas fait le pari, il y a0 ans, de progrès aussi rapides sur la compréhension de la maladie et sur la mise au point de traitements.

Mais pour cet ex-président du Conseil national du sida, qui exerce à l’hôpital Saint-Louis (Paris), beaucoup de progrès restent à faire pour stopper l’épidémie.

Question: 30 ans après la découverte du VIH, à laquelle vous avez participé, quel regard portez-vous sur la recherche et les progrès médicaux réalisés?

Réponse: Il est clair que jamais on n’a été aussi vite pour identifier une nouvelle maladie, identifier sa cause, apporter des réponses thérapeutiques et arriver au résultat d’aujourd’hui.

En partie grâce aux progrès faits autour de cette découverte, alors qu’on mettait deux ans à mettre en évidence un agent pathogène dans les années 80, aujourd’hui on met quatre ou cinq jours.

Personnellement je n’aurais pas fait le pari qu’on serait arrivé si vite au résultat où on est aujourd’hui : une personne dépistée précocement bénéficie de traitements relativement simples et bien tolérés qui lui permettent d’avoir une durée de vie équivalente à celle de la population générale, avec un risque de transmettre la maladie extrêmement faible

Q – quels sont vos espoirs les plus tangibles pour les années à venir: un traitement curatif, un vaccin efficace, des médicaments moins chers et accessibles enfin à tous?

Parmi les progrès à réaliser, il y a le sempiternel vaccin dont personne ne peut prédire quoi que ce soit à ce jour. Même si on voit régulièrement dans la presse les espoirs devant telle ou telle donnée qui finalement ne se confirme pas, il faut être réaliste, il n’y a rien même s’il y a beaucoup de recherche qui reste légitime.

Là où les progrès sont extrêmement lents, ou peu satisfaisants, c’est la réaction de la société civile et des politiques face aux défis sociaux posés par cette épidémie, en France dans les pays développés et a fortiori dans les pays en développement. C’est là qu’on ne va pas assez vite. La science est allée très vite, mais les sociétés n’ont pas répondu de manière adaptée.

Comment peut-on imaginer que des pays où 30 à 35% de la population est touchée puissent participer au développement humain si on n’offre pas aux gens touchés la possibilité de se soigner, alors que cela coûterait infiniment peu par rapport à d’autre dépenses, militaires par exemple.

Q – Quelles perspectives ouvrent les résultats de l’étude Visconti diffusés en mars, rendant compte de 14 patients traités très précocement après l’infection et qui 7 ans et demi après l’arrêt des antirétroviraux contrôlent leur infection?

C’est un argument très fort qui vient s’ajouter à d’autres sur le fait qu’il faut traiter tôt. Plus on traite tôt et plus on a de chance de contrôler la réplication (du virus, ndlr). Il y a de multiples données aujourd’hui qui montrent que le traitement précoce a de multiples avantages y compris sans doute celui de permettre au système immunitaire de ne pas perdre la course qu’il mène contre le virus. Mais pour traiter tôt, il faut dépister tôt.