L’état d’urgence alimentaire décrété par le gouvernement et les conflits sanglants de Kouri Bougoudi et de Berem sont au menu de votre revue de presse hebdomadaire.

L’urgence alimentaire ne passe pas dans la presse

Le 1er juin dernier, le président du Conseil militaire de transition a décrété l’état d’urgence alimentaire et nutritionnelle et a appelé les partenaires à l’aide pour éviter une situation catastrophique.

Mais pour Abba Garde, c’est « Une belle insulte à l’intelligence des Tchadiens ». Le journal de Moussaye Avenir De La Tchiré, de retour dans les kiosques après une suspension d’un mois, estime que s’il y a la famine ou des poches de famine qui se signalent au Tchad, c’est à cause de l’utilisation « irrationnelle et irresponsable » des ressources nationales. Le canard illustre sa thèse par le fait, entre autres, qu’en 14 mois de transition, les achats d’armes de guerre se chiffrent à plus de 600 milliards de francs CFA, que les commandes des voitures grosses cylindrées, destinées à des administrateurs « laxistes et improductifs », ont coûté environ 8 milliards ou encore que plus de 600 généraux et 70 présidents de Conseil d’administration soient pris en charge à plus de 3 milliards « sans rien foutre ». Et de surcroît, insiste Abba Garde, le prix du baril de pétrole a grimpé de manière « vertigineuse ». « Décréter une urgence alimentaire dans ces conditions relève d’une irresponsabilité notoire qui traduit bien une gouvernance artisanale et irréfléchie », conclut-il.

C’est également de l’incompréhension du côté de L’Observateur. « Vous avez dit urgence alimentaire ? », s’étonne-t-il. L’Obs dénonce le manque de proactivité des dirigeants. « Si la famine arrive à s’installer au Tchad, on ne peut qu’attribuer la responsabilité de cette situation à l’Etat. Un gouvernement soucieux du bien-être de sa population est celui-là qui réunit les conditions nécessaires pour éviter une telle catastrophe qui est loin d’être un phénomène naturel ». Car, rappelle le journal fondé par Mme Sy Koumbo Singa Gali, il y a bien longtemps que les médias et certaines ONG ne cessent d’alerter sur le risque de famine au courant de cette année, dû notamment à la mauvaise campagne agricole 2021 et au « sempiternel » conflit entre agriculteurs et éleveurs avec son corollaire de dévastation des champs qui agissent sur les activités agricoles.

Même s’il n’épargne pas totalement la responsabilité du gouvernement, Le Visionnaire préfère mettre plus l’accent sur les dispositions pour faire face à la famine. Il relève le fait que le gouvernement, à travers l’Office nationale de sécurité alimentaire (ONASA), a décidé de vendre 500 tonnes de céréales subventionnées par province afin de faire face à cette situation. Une décision qui, écrit Le Visionnaire, « est saluée par bon nombre de concitoyens ».

 Après Kouri Bougoudi, Berem

La liste des conflits meurtriers s’allonge. Après celui du site aurifère de Kouri Bougoudi (Tibesti) d’il y a presqu’un mois qui a fait une centaine de morts selon le gouvernement, c’est Berem dans la Kabbia (province du Mayo Kebbi Est) qui est endeuillé.

L’Observateur nous informe que le 8 juin, une bagarre rangée entre autochtones agriculteurs et allogènes éleveurs a fait 11 morts. Le « malheureux incident » est survenu quand un bouvier a laissé son troupeau de moutons entrer dans le champ d’un autochtone.

« Encore du sang à Berem », renchérit N’Djamena Hebdo à sa Une.  Le journal qui évoque, lui, 10 morts, craint qu’avec la présence des éleveurs en ce début de la saison des pluies, d’autres conflits plus meurtriers ne voient le jour dans ce département ou ailleurs où se pratiquent des activités agricoles.

« Le sang a déjà trop coulé », alerte aussi Le Visionnaire. Le journal constate que le Conseil militaire de transition dont la mission première est de conduire le Tchad vers la stabilité et la démocratie, « s’illustre plutôt par l’instabilité et surtout par des multiples conflits sanglants, faisant démesurément des victimes. Et ce n’est pas fini », craint-il.

Abba Garde qui expose à sa Une les images du « Génocide » de Kouri Bougoudi et des « tueries » de Berem parle d’une gouvernance « cancérigène ». S’attardant principalement sur Kouri Bougoudi, le journal se demande si la France « est-elle loin de ce crime ? ». Il croit savoir que c’est la France qui a activé ce conflit très meurtrier pour « obliger » le Tchad à solliciter la sécurisation de la zone par les forces françaises présentes au Tchad. Une stratégie qui, poursuit le journal sera bénéfique pour le pouvoir car il est « le meilleur moyen de stopper la marche des rebelles du FACT, du CCMSR, du FNDJT et de bien d’autres groupes hostiles au pouvoir » mais aussi pour la France, parce que « ce sera une aubaine toute trouvée pour une France dépendante, essentiellement, des ressources des misérables pays d’Afrique ».