INTERVIEW – Sur proposition du ministère de l’Administration du territoire et de la Gouvernance locale, une loi organique qui fixe la composition de l’Assemblée nationale, des régimes d’inéligibilité et d’incompatibilité a été adoptée au conseil ordinaire des ministres ce 31 octobre. Une nouvelle qui a provoqué un tollé au sein de la classe politique. Nous faisons le tour de la question avec Dr Nasra Djimasgar, président du parti Un nouveau jour, par ailleurs membre du CNDP.
Tchadinfos.com : Le 31 octobre, sur proposition du ministère de l’Administration du territoire et de la Gouvernance locale, un projet de loi organique fixant la composition de l’Assemblée nationale a été adopté par le conseil ordinaire des ministres. Comment la nouvelle a été reçue au sein de la représentation de l’opposition au CNDP ?
Cette nouvelle a jeté un émoi au sein de la classe politique, non seulement de l’opposition mais aussi de la majorité. On n’a pas compris pourquoi le nombre des députés qui était de 188 dans la législature finissante est réduit à 161 alors que la base de la fixation du nombre des sièges à l’Assemblée nationale est la population. Souvenons-nous qu’en 2011, quand les législatifs étaient organisés, la population tchadienne était autour de 12 millions. Huit ans plus tard, selon les estimations de l’Institut national des statistiques et des études économiques et démographiques (Inseed), la population est passée à 16 millions. Et si un député est le représentant de la population, au lieu de réduire le nombre de siège, on aurait dû plutôt augmenter pour que cela soit proportionnel au nombre de la population. Mais à notre grande surprise, le nombre de sièges est parti décroissant.
Tchadinfos.com : croyez-vous que ce projet de loi organique engendra une instabilité politique au sein des formations politiques ?
Ce projet va être une source d’insécurité et de trouble d’ici là. Pourquoi je le dis ; parce que le Président de la république a accepté de mettre en place un organe appelé le Cadre national de dialogue politique (CNDP). A cet organe là est affecté des compétences d’initier les avant-projets de lois touchant tout domaine politique. Donc toutes les lois ayant une connotation politique doivent être débattues au sein du cadre et c’est ce qui sera issu des débats qui devait être envoyé au gouvernement qui, à son tour, l’enverra au parlement pour adoption…
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Tchadinfos.com : et ce n’était pas le cas de ce projet ?
Ce projet a été soumis au CNDP qui est en train de travailler dessus et il ne reste qu’à le soumettre à la plénière les résultats de la sous-commission qui y avait statué dessus. Mais à notre grande surprise, cette décision du conseil des ministres nous a été plaquée au nez. Et c’est ce qui frustre aujourd’hui toute la classe politique de l’opposition. C’est pourquoi l’opposition au sein du CNDP a rejeté ce compte-rendu.
Tchadinfos.com : pourquoi l’opposition boude-t-il cette décision du gouvernement ?
Ce compte-rendu ne fait pas l’objet d’un consensus. Il n’a pas fait l’objet d’un débat. C’est pourquoi l’opposition dans son ensemble à rejeter le résultat qui était sorti du conseil ordinaire des ministres tenu le 31 octobre dernier.
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Tchadinfos.com : cela ne témoigne-t-il pas le manque de sérieux du gouvernement vis-à-vis du CNDP ?
Sérieux ! Je ne voudrai pas employer ce mot parce qu’il peut être analysé de deux côtés. Si on est du côté du gouvernement, c’est du sérieux parce qu’on veut préserver ses acquis. Mais je dois vous le dire, des signaux ont été déjà donnés au sein du CNDP. Lorsque les travaux devaient être faits, il y avait eu des propositions qui sont allées, de qui on ne sait, fixant le nombre des sièges à 155. Une nouvelle qui n’a pas été appréciée et la classe politique se prépare à défendre sa base. Le gouvernement connaissant cela, a voulu prendre de cour toute la classe politique, non seulement de l’opposition, mais aussi de la majorité. Un tel fait n’est pas de nature à amener la sérénité au sein de la classe politique aujourd’hui. Et je crains que dans les jours à venir, il y ait blocage dans le débat politique. Il faut que le rôle qui a été confié au CNDP soit respecté et qu’on le laisse faire des propositions qui sont raisonnables. Celles qui tiendront compte de toutes les réalités.
Tchadinfos.com : que comptez-vous faire ?
Nous demandons à ce qu’une plénière soit le plus tôt que possible pour statuer et avoir une position commune pour qu’il soit transmis au gouvernement. Nous appelons au dialogue pour que majorité et opposition s’asseyent pour discuter. Cela va éviter le boycott des élections, ce que nous ne souhaitons pas. Ce qui va aussi éviter des agitations préélectorales et électorales. Si le dialogue est refusé, nous en aviserons. Mais pour l’instant, les uns et les autres sont dans une dynamique de dialogue.
Tchadinfos.com : au vu des antécédents, croyez-vous que le gouvernement reviendra sur les propositions qui découleront du consensus de la classe politique au sein du CNDP ?
Si le gouvernement qui a la responsabilité du maintien de l’ordre public reste dans cette logique-là, il est obligé d’accepter les résolutions qui sortiront du CNDP. Il n’est pas de l’intérêt du gouvernement qu’il y ait des agitations dans la classe politique, au sein de la population. La population souffre déjà assez avec ces multiples crises. Il n’est pas question de lui en rajouter d’autres.
Propos recueillis par Mbaindangroa Djekornonde Adelph