Saleh Abakar Djimongar, ingénieur en eau et assainissement, expert en traitement de l’eau de consommation, l’eau usée et boue de vidange, est devenu aujourd’hui, vendeur ambulant des poulets en gros et en détail.

Qui aurait cru voir un jour, un ingénieur en eau et assainissement, master avec mention bien, sorti du prestigieux Institut international d’ingénierie de l’eau et de l’environnement (2ie) de Ouagadougou au Burkina Faso, devenir aujourd’hui vendeur de poulets ? Plutôt qualifié dans la gestion de projet, de sous-programme, de programme, notamment de suivi de projet avec réalisation des études de faisabilité et d’impact de la recherche-action et travail pour le développement local durable et humanitaire, Saleh Abakar Djimongar, après des années de stages, de travail puis maintenant au chômage, s’est reconverti en vendeur ambulant de poulet, aussi bien en gros qu’en détail. Toute la journée, sur sa motocyclette remplie de poulets, il fait le tour de la capitale pour des livraisons aux entreprises et aux particuliers.

Ce travail, Saleh Abakar Djimongar, populaire sous le pseudonyme de Saleh Dacosta, le fait depuis quelques mois déjà pour joindre les deux bouts. « A mes débuts, c’était une question d’image. Certaines personnes se moquaient de moi du fait que je suis ingénieur et comment est-ce que je deviens du jour au lendemain un vendeur ambulant des poulets. J’ai surmonté la façon de voir des gens et cela ne m’a pas découragé car j’avais un objectif qui est de chercher de l’argent pour me prendre en charge », se rappelle Saleh Dacosta. Cette ambition de faire son business l’a amené à créer sur Facebook un espace publicitaire avec ses coordonnées téléphoniques qu’il a baptisée « Djidad Adjala », en arabe tchadien qui peut se comprendre en français par « vente et livraison express des poulets ».

Un parcours scolaire et professionnel très riche

Après l’obtention de son baccalauréat série scientifique au lycée Alpha 3 en 2006, à N’Djaména, Saleh Dacosta s’est envolé au pays des Hommes intègres, le Burkina Faso, où il s’est inscrit à l’université catholique de l’Afrique de l’ouest (Ucao). Là-bas, il est sorti nanti d’une licence en biologie appliquée, option analyse biologique. Après avoir regagné le pays, il a travaillé quelques années en qualité de consultant. « Au Burkina, en 2009, je travaillais comme technicien de laboratoire des analyses en microbiologie à l’hôpital Yalgado Ouedraogo. J’ai regagné plus tard le pays où je travaillais en qualité de technicien de laboratoire chargé des analyses en bactériologie et virologie à Etalon Biomédical », nous renseigne Saleh Abakar Djimongar. Il intègre plus tard d‘autres structures telles que l’ONG Ecobalady, Espace Vert du Sahel (EVS), Bec, etc. Ce qui lui a permis d’avoir des expériences dans son domaine professionnel. Il poursuit ensuite ses études pour obtenir un bachelor en science de l’eau et de l’environnement puis après, un master en Eau et Assainissement à 2ie, en 2016.

Saleh Dacosta et son label « Djidad Adjala »

Après ce parcours dans les structures citées, Saleh Abakar Djimongar peine à retrouver un nouveau boulot. « Je suis du genre qui ne baisse pas les bras donc rester à la maison sans rien faire n’est pas chose aisée. Du coup, j’ai réfléchi à quoi faire. D’abord, j’ai commencé par vendre des lapins. Ce qui me rapportait un peu d’argent pour assurer mes besoins. Mais j’ai réfléchi à aller encore plus loin. D’où l’étude du marché pour la vente et la livraison des poulets. Une activité que mènent beaucoup de Tchadiens mais particulièrement, j’ai ajouté une touche particulière à cela qui est de déplumer les poulets et les livrer au même prix que sur le marché. Aujourd’hui, tout marche bien », se félicite Saleh Dacosta. Et il ne s’est pas arrêté là ! Il renchérit qu’avec ce qu’il fait actuellement, il s’en sort mieux qu’étant ingénieur sur le terrain. « Aujourd’hui, même si je retrouve le travail d’ingénieur qui est une passion pour moi, je ne laisserai pas la vente des poulets qui est une seconde activité pour moi », rassure-t-il.

Il faut ajouter Saleh Dacosta met aussi en location les engins à deux roues pour des courses aux personnes afin d’augmenter son chiffre d’affaires. « Avec les engins à deux roues de toutes les marques, je fais en sorte que ceux qui veulent être indépendantes fassent leurs courses en toute tranquillité », a-t-il indiqué. Au moment où il se lançait dans « Djidad Adjala », certains ont même estimé que Saleh Dacosta aurait peut-être des faux diplômes d’où sa reconversion à la vente des poulets. « Je suis diplômé mais les circonstances de la vie m’ont amené à vendre et livrer les poulets, lapins et louer des engins à deux roues pour me prendre en charge. Ce que d’autres diplômés sans emploi doivent faire, c’est de se créer une activité rémunératrice que de croiser le bras et d’attendre à trouver un travail car même pour postuler à un poste, il faut sortir, courir, fournir des dossiers pour déposer. Tout ceci, nécessite de l’argent », rétorque-t-il à ses détracteurs.


Sabre Na-ideyam