En ce jour où la République rend hommage à Mahamat Ali Abdallah, j’aurai bien voulu être de la partie car mes relations avec ce général sont particulières. Malheureusement depuis 48h, je suis au lit pour raisons de santé.

En 2001, Le Général Mahamat Ali Abdallah m’intente un procès qui a défrayé la chronique à l’époque. Je me suis retrouvé dans les geôles de la police nationale, libéré à la veille de Noel 2001, grâce au tollé que cette arrestation a soulevé et au soutien de très nombreuses personnes. J’ai écopé de six mois de prison avec sursis, de 5 000 000 de FCFA de dommages et intérêts, et de 100 000FCFA d’amende. Le procès Mahamat Ali Abdallah inaugura, pour moi, une longue série de procès, d’arrestations, de gardes à vue, d’emprisonnement, plus d’une vingtaine en tout, dans ma carrière de journaliste. Là n’est pas l’objet de mon témoignage.

Quelques mois après ce verdict, Me Radet, avocat du Général, m’envoya une correspondance dans laquelle le général renonça aux dommages et intérêts que la justice lui a accordés. Un jour, je reçois un coup de fil d’un commissaire de police dont je tais le nom, cousin lointain au Général. Il me dit que le Général veut me rencontrer à 23H. C’était un mardi. La rencontre eut lieu effectivement ce mardi, vers 23H30, au quartier Arbout Soulback. Entre le général, puissant préfet du Logone occidental à l’époque, qui était au Palais de justice en procès contre moi et l’homme que j’avais en moi, c’était deux hommes différents. En fait, le général et moi nous nous sommes « réconciliés » en cette nuit. C’était à l’époque où le Général était aussi cité dans une affaire de malversation de 40 millions à la STEE. Je préfère garder le contenu de ces échanges pour mes mémoires si Dieu me permet de les écrire.

Depuis lors, nous avons gardé de relations empreintes de courtoisie et de respect. A la veille de l’élection du nouveau Président de la CENI, devant remplacer Jean Pierre Madjirangué dont Mahamat Ali Abdallah était l’un des tombeurs, je suis reçu au domicile du Général, en présence d’un autre général, qui est allé me chercher. La rencontre a eu lieu à Sabangali, autour de 9H30, chez le Général. Le Général était Président du CNDP (cadre national de dialogue politique). Il m’a posé des questions sur ma candidature et sur ceux qui l’ont suscité. Le Général savait tout cela puisque c’est la société civile représentée au CNDP qui a soutenu ma candidature. Mais en fin politicien et stratège, il voulait me sonder davantage. Ces échanges se terminèrent dans la courtoisie sans que je n’attende de cet entretien un soutien pour me porter à la tête de la CENI. Au finish, je me suis retrouvé, sur 17 candidats, deuxième ex aequo avec l’actuel Président de la CENI et battu au second tour, sans le soutien des délégués du parti au pouvoir et de leurs alliés.

Comme la plupart des hommes politiques, Mahamat Ali Abdallah m’était paru un homme difficile à cerner. Fin politicien, calculateur, il avait des ambitions légitimes. La mort l’a malheureusement arraché très tôt. Je retiens de lui une phrase : « En politique, une faute ne se pardonne pas ». Il m’a paru aussi être un grand défenseur du régime dont il était un des piliers. J’ai gardé de lui ce souvenir d’un homme complexe. Mais qui se soucie de la stabilité de ce pays. J’ai aussi gardé de nos rares échanges l’image d’un homme avide de savoir. Repose en paix Général Mahamat Ali Abdallah. Que Dieu console les cœurs de parents affligés.

Michael Didama