Dix jours après le scrutin présidentiel au Tchad, les résultats provisoires tardent à tomber. La tension monte entre le camp présidentiel qui crie déjà victoire et l’opposition qui réclame un second tour.

Toutes les attentions étaient braquées sur la Commission électorale nationale indépendante (Céni) mardi dernier. Une information, véhiculée depuis la veille, faisait état de l’annonce des résultats provisoires du premier tour de la présidentielle du 10 avril 2016 au courant de la journée. L’attente a été donc longue, mais finalement la nouvelle n’est pas tombée.

Dans un communiqué publié en fin d’après-midi, le président de la Céni, Royoumbaye Nadoumngar, portait à la connaissance de l’opinion nationale et internationale que le traitement des résultats des bureaux de vote de l’intérieur et de l’extérieur pour l’élection présidentiel était toujours en cours. “Comme le stipule le Code électoral, les résultats provisoires seront proclamés publiquement dans un délai n’excédant pas quinze jours (15) jours après la date du scrutin du 10 avril 2016”, a-t-il rassuré. Il a rappelé que la Céni est le seul organe habilité à publier les résultats provisoires, puis exhorté “l’ensemble des acteurs impliqués au processus électoral d’être patients et de garder leur calme”.

L’appel au calme du président de la Céni est intervenu quelques heures après que les délégués de l’opposition au sein de l’institution ont annoncé, à la presse, leur retrait du “processus de dépouillement des résultats” en cours. Ceux-ci ont affirmé leur “refus de cautionner le faux qui est en train d’être mis en place par la Céni et son organe technique, le BPE (Bureau permanent des élections, Ndlr). “Par conséquent, les délégués des candidats de l’opposition ne se reconnaissent pas dans les opérations de recensement des résultats”, a indiqué leur porte-parole, Makido Dormbaye.

Depuis dix jours, l’opposition ne cesse de dénoncer des situations de fraude et martèle qu’un second tour est inévitable. Le 17 avril, dix de ses leaders ont affiché une position commune autour d’une plateforme. Après avoir constaté une série d’irrégularités dans le scrutin du 10 avril, ils ont décidé de s’allier pour le second tour.

Dans le camp du président Idriss Déby Itno, l’ambiance est déjà à la fête. L’imposante Place de la Nation, qui surplombe le Palais rose (ou palais présidentiel) a été parée, depuis lundi soir, par les partisans du chef de l’Etat sortant: tentes et tribune montée, posters géants à l’effigie d’IDI (Idriss Déby Itno) partout, etc. Ce dernier (63 ans dont plus de 25 passés déjà au pouvoir), ne cesse de marteler qu’il va faire “un coup KO”, c’est-à-dire gagner dès le premier tour.

Par ailleurs, la polémique enfle à propos de militaires qui auraient disparu lors du scrutin présidentiel. Les proches d’une quarantaine de militaires arrêtés le 9 avril, jour du vote des forces de sécurité, et détenus dans une prison secrète, commencent à s’inquiéter. Le tort de ces soldats serait d’avoir voté pour un candidat de l’opposition.

Plusieurs leaders de l’opposition tchadienne se sont alarmés au sujet de ces militaires. Dans une déclaration faite samedi, le chef de file de l’opposition et candidat à la présidentielle du 10 avril, Saleh Kebzabo a affirmé que “des dizaines de militaires ont été arrêtés, chicottés, embastillés, torturés, humiliés et emprisonnés. C’est à cette occasion que nous avons appris la confirmation d’une prison dans l’enceinte de la présidence de la République”. Selon l’opposant, certains militaires qu’il a cités nommément ont succombé des suites de ces mauvais traitements.

Face à la presse, dimanche, l’ancien premier ministre et également candidat, Joseph Djimrangar Dadnadji, a, lui aussi, réitéré les accusations d’arrestations de militaires ayant voté pour un candidat autre que le président sortant Déby Itno.

Le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, Moustapha Ali Alifei, a démenti, mardi soir, l’arrestation ou la disparition des militaires véhiculée par l’opposition. Il a mis en garde les auteurs de ces accusations et exigé des preuves.

C’est dans cette atmosphère tendue que les résultats provisoires de la présidentielle sont attendus dans les prochaines heures.
Xinhua