Ce mardi 31 août 2021, plusieurs plateformes, partis politiques et organisations de la société civile ont signé une déclaration exigeant une transition plus inclusive. Parmi les signataires, il y a notamment Wakit Tamma qui mène la fronde contre le Conseil militaire de transition depuis sa prise de pouvoir ainsi que le Groupe de réflexion et d’action pour l’appel du 1er juin 2021 (GRA-Appel du 1er juin). Voici les dix points de cette déclaration commune.

  1. La seule préoccupation des Tchadiens, à l’issue de la transition actuelle, est de choisir librement et de façon incontestable les dirigeants de leur pays, à travers des élections libres, transparentes et démocratiques qui puissent garantir la paix, la stabilité et la prospérité.
  2. La voie suivie par le Conseil militaire de transition (CMT), consistant à mettre en place de manière unilatérale le parlement de la transition (CNT) et le comité d’organisation du dialogue national inclusif (CODNI), n’est pas de nature à apaiser le peuple tchadien et à ramener la paix. On s’achemine de façon certaine vers des lois et organes taillés sur mesure et des élections frauduleuses. L’aspiration légitime des Tchadiens à un Etat démocratique et apaisé est en train d’être dévoyée. Les prédateurs de la République, qui ont ruiné ce pays  et en ont fait l’un des plus pauvres au monde sur l’Indice de développement (IDH) des Nations-Unies, veulent absolument préserver le système d’appauvrissement des Tchadiens qui les a enrichi. Les Tchadiens ne l’accepteront plus jamais. Ceux qui aiment ce pays et veulent le bonheur des Tchadiens ne devraient plus être tentés par cette aventure, à continuer à tricher en multipliant le nombre d’associations et partis « maison » pour faire illusion d’un appui populaire à cette mascarade de « dialogue de chapelle » dont les acteurs triés sur le volet sont déjà préparés à venir entériner le plan de succession à travers de simulacres de consultations électorales. Les Tchadiens ont compris et ne veulent plus de ce jeu de farce de dialogue qu’ils ont vécu plusieurs fois, les plus récents étant ceux de 2018 et 2020. Le peuple n’acceptera pas de se faire voler une fois de plus sa liberté de laver son linge sale en famille, de choisir librement la forme de gouvernance de l’Etat, les hommes et femmes qu’il juge capables de présider aux destinées de son pays, à travers l’organisation d’élections libres, transparentes et démocratiques.
  3. La seule et unique voie pour sortir pacifiquement et de façon durable le Tchad de la crise multidimensionnelle qu’il traverse est d’offrir un cadre idéal de dialogue, d’inclusion, de compromis et de consensus qui garantit la participation équilibrée et représentative de toutes les forces vives de la société tchadienne sans exclusion. Ce cadre ne peut être qu’une Conférence souveraine. La large représentativité des participants à une telle conférence lui conférera la légitimité consensuelle de pouvoir prendre les décisions essentielles afin de crédibiliser des élections démocratiques et transparentes, auxquelles seront conviées librement tous les enfants du Tchad. C’est en cela qu’il faut absolument une Conférence nationale inclusive et souveraine (CNIS) que nous soutenons et  à laquelle nous invitons tous les Tchadiens à œuvrer pour sa réussite.
  4. Nous demandons donc la mise en place d’un organe chargé d’organiser la CNIS. A la différence du CMT nous proposons que cet organe soit composé des personnalités indépendantes et de la société civile, de grande réputation et probité morale, et faisant l’objet de consensus de toutes les parties. La confiance qu’ils inspirent permettra de rassurer toutes les forces vives sur l’organisation de la CNIS. Les acteurs politiques, notamment les partis politiques, auront le loisir de s’exprimer à la conférence et faire leurs propositions. Ils ne devront pas encombrer l’organisation avec leurs représentants. Le CMT ne peut que dialoguer avec ceux qui ne sont pas de son avis et décider seul des règles du jeu de l’organisation. Il doit donner l’exemple pour l’intérêt du Tchad en évitant d’être juge et partie.
  5. L’organe chargé d’organiser la CNIS proposera les thématiques de la conférence afin de permettre à tous les acteurs de débattre des sujets et d’envoyer des délégués en conséquence. Cet organe élaborera le budget de la conférence et prendra les dispositions logistiques et autres pour sa réussite. Il réalisera toutes les actions visant la réussite de la conférence à savoir : identification et recensement des forces vives tchadiennes, définition des critères de sélection des participants à la CNIS, élaboration de la liste des participants de la CNIS, identification et évaluation de toute la logistique pouvant répondre aux besoins de la conférence, définition et mise en place des mesures de sécurité des participants, y compris des politico-militaires, lancement des invitations pour la participation à la CNIS.
  6. Au vu de la situation qui menace la cohésion nationale, une des thématiques sera la refondation et la forme de l’Etat futur du Tchad. C’est l’occasion d’engager des débats préalables libres et sans tabou, qui permettent à la CNIS d’aboutir à une solution qui maintienne les Tchadiens ensemble, dans l’égalité et le respect mutuel.
  7. Les politico-militaires devront participer obligatoirement à la CNIS. C’est l’occasion pour leurs dirigeants qui ont des ambitions pour le Tchad de venir participer à la mise en place des conditions qui leur permettront de présenter leurs projets, et de solliciter le suffrage des Tchadiens si telle est leur ambition. Il faut donc un cessez-le-feu immédiat, et avec le soutien de la communauté internationale, notamment les Nations unies, l’Union africaine, la France et les USA, définir un mécanisme de protection de toutes les parties et du processus vers une paix définitive avec les mouvements armés. Plus jamais un Tchadien ne devrait trouver une raison d’aller prendre les armes.
  8. La CNIS pourra légitimement adopter la charte pour la suite de la transition, nommer les membres du parlement provisoire, nommer les membres du Conseil national de transition comprenant des militaires et des civils, désigner le Premier ministre de la transition, adopter les grandes lignes de la Constitution et des lois électorales, donner les orientations pour le programme du gouvernement de la transition. 
  9. Le CMT devra amender la Charte de transition actuelle pour y inclure la Conférence nationale inclusive et souveraine.
  10. Tous les partenaires du Tchad, en particulier l’Union africaine, l’Union européenne, la France, les Etats-Unis, les Nations-Unies, les pays du Bassin du Lac Tchad, et les pays du G5 Sahel, sont appelés à soutenir cette déclaration pour un vrai dialogue au Tchad.