N’DJAMENA, 18 juin (Xinhua) — Longtemps bloqué par les acteurs politiques, le processus électoral au Tchad vient d’être relancé, mais de nombreuses difficultés persistent, rendant impossible le maintien de certains scrutins aux échéances prévues.

“Toutes les élections que la CENI aura à organiser se dérouleront sur la base d’un recensement électoral biométrique. Cela exige donc au préalable une étude pour maîtriser le concept et proposer les différentes options de la biométrie”, déclare Royoumbaye Nanadoumngar, président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI).

Si la biométrie est une première au Tchad, les parties prenantes au processus électoral tardent à s’accorder sur une des options afin de permettre de réaliser le recensement électoral biométrique en prélude à toute élection.

Il y a une dizaine de jours, le gouvernement tchadien a mis à la disposition du PNUD une somme de 500 millions CFA (environ 1 million USD) pour l’étude de faisabilité de la biométrie.

“Le financement qui avait fait défaut pour la réalisation de l’étude sur la biométrie est donc aujourd’hui disponible partiellement avec cette participation du gouvernement tchadien. La contribution des partenaires au développement est toujours attendue à cet effet”, indique le président de la CENI.

“Le PNUD étudiera, avec les partenaires au développement, la possibilité de fournir au gouvernement du Tchad, à travers la CENI et le Comité national de dialogue politique, en complément de la part de mobilisation des ressources de l’Etat tchadien, une assistance technique, financière et logistique pendant toutes les phases devant conduire à la préparation et à la tenue des élections locales, législatives, sénatoriales et présidentielles”, avait déclaré à Xinhua son directeur pays, Tetsuo Kondo.

L’organisation onusienne fournira en outre une assistance logistique aux observateurs internationaux invités par le gouvernement tchadien pour suivre le déroulement des élections locales et du cycle électoral prochain, ce “dans les limites des moyens mis à sa disposition”.

Sur la base de la contribution financière du gouvernement tchadien, le PNUD vient de lancer, la semaine dernière, un appel d’offres pour le recrutement d’un bureau d’études pour la réalisation de l’étude sur la biométrie.

“Les résultats de l’étude sur la biométrie permettront à la CENI d’établir les chronogrammes du recensement biométrique et des différentes opérations électorales. En terme clair, les élections se feront effectivement et incontestablement sur la base de recensement électoral biométrique”, explique M. Royoumbaye Nanadoumngar.

Si le déclic est intervenu sur la question de la biométrie, l’installation des CENI locales (au niveau des régions et des départements du pays) coince toujours depuis plusieurs mois; le CNDP n’a pas pu se déplacer dans les différentes régions pour installer les démembrements de la CENI, faute de moyens. Finalement, il a été décidé que la désignation soit faite au niveau de la capitale.

“La désignation des présidents et des membres de démembrements de la CENI est de la responsabilité des acteurs politiques et de la société civile à travers le Cadre National du Dialogue Politique. La CENI pour sa part attend toujours ces listes pour déclencher l’opération suivante”, indique M. Royoumbaye Nanadoumngar.

Dès réception de ces listes, les délégués de la CENI seront aussitôt déployés sur le terrain pour procéder à la prestation de serment et à l’installation de ses démembrements dans les différentes circonscriptions.

“Malgré un démarrage lent, non imputable à la CENI, aujourd’hui, nous sommes à même d’annoncer que bien d’obstacles ont été levés, permettant ainsi d’avancer dans l’intérêt de toutes les parties prenantes au processus électoral”, affirme M. Royoumbaye Nanadoumngar.

Pour la suite du processus, il appelle toutes les parties prenantes à s’impliquer sans relâche afin que le processus ne connaisse plus de retard.

Le processus avait été enclenché avec la mise en place, il y a quatre mois, d’une nouvelle CENI plus large et paritaire (17 membres de la majorité présidentielle, 17 de l’opposition, ainsi que 6 représentants de la société civile), ce qui est une innovation dans le jeu démocratique tchadien.

Dès avril 2013, sous l’égide du président Déby Itno, des tractations ont été organisées entre les différents acteurs politiques, ayant abouti à la mise en place d’un Cadre national pour le dialogue politique (CNDP). Le CNDP a pour mandat de proposer à la classe politique la préparation du recensement biométrique et des élections départementales et régionales en 2014, mais également des élections législatives de 2015 et présidentielles de 2016.

Mais la nouvelle structure est boycottée par une grande partie de l’opposition politique regroupée au sein de la Coordination des partis politiques pour la défense de la Constitution (CPDC, qui compte une trentaine de députés à l’Assemblée nationale).

Après moult tractations avec la majorité présidentielle, la CPDC a fini par intégrer, fin mai 2014, le Cadre de dialogue politique. Ce qui a permis de relancer le processus électoral. Mais le retard accusé est déjà considérable, bouleversant le chronogramme électoral.

“Il est impossible de tenir les élections locales en 2014”, affirme Pahimi Padacké Albert, président du CNDP, qui reste sceptique sur l’organisation des législatives en 2015. “Si on n’arrive pas à organiser les élections législatives en 2015, cela pourra poser un problème de légitimité à l’Assemblée nationale qui a un mandat de quatre ans”, prévient-il.

Pour organiser les futures élections départementales et régionales, il faudrait entre 18 à 24 mois et plus de 168 milliards F CFA (333 millions USD), selon une étude réalisée par deux experts nationaux sur commande du Programme de renforcement de la gouvernance démocratique (PRGD), une structure dépendant du ministère tchadien du Plan et de la Coopération. 120 milliards F CFA (240 millions USD) seront consacrés au recensement électoral biométrique, précise le texte.