POLITIQUE – Si les acteurs politiques tentent de rassurer les partenaires financiers des élections législatives, la grande inconnue reste la date du scrutin. Une incertitude qui alimente les débats dans les rues de N’Djamena.

Des pressions de tout bord pèsent sur le palais rose, siège de la présidence. Le président Idriss Déby Itno a annoncé la tenue d’un scrutin au premier semestre de cette année. Mais à en croire le calendrier N’Djamenois qui file aussi vite que les clandos de la capitale, le délai est dépassé. Alors quand vont avoir lieu les élections législatives, déjà repoussées à plusieurs reprises ?

« L’année 2019 est belle et bien une année électorale », avait annoncé, le 26 mai, Dr Kodi Mahamat Bam, président de la Commission électorale nationale indépendante (Céni). Objectif : rassurer les acteurs politiques et les partenaires techniques et financiers. Une opération séduction qui vient quelques jours après celle de Mahamat Zene Bada, le tumultueux président du Cadre national de dialogue politique (CNDP). Le 13 mai lors d’une réunion avec les ambassadeurs et les chefs des missions diplomatiques, il a jeté la même phrase : “2019 est une année électorale, malgré les rumeurs.”

Rassurer les partenaires : un jeu politique ?

De son côté, l’Union nationale pour la démocratie et le renouveau (UNDR) s’est dit « incertaine de la tenue des élections législatives en 2019 ». Saleh Kebzabo, président dudit parti, voit “un avenir sombre” et se dit prêt à avertir l’opinion internationale.

Même impression pour le porte-parole de la Coordination des partis politiques pour la défense de la constitution (CPDC). Poddi Djimé Bichara trouve qu’il est difficile de se « convaincre » du déroulement du scrutin cette année. « La conduite unilatéraliste du processus par le pouvoir MPS trahit une volonté d’empêcher ou à tout le moins de retarder les élections législatives et communales. » Il ajoute que la mise en place du CNDP au lendemain du forum gouvernemental cache beaucoup « d’intentions malveillantes ». « Officine de toutes les manœuvres plus sordides les unes que les autres, le théâtre de la corruption, des intimidations et menaces en tous genres, le CNDP est devenu incontestablement le principal obstacle à l’organisation des élections au Tchad », poursuit Poddi Djimé Bichara.

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Un avis partagé par le président de l’Union des démocrates pour le développement et le progrès, Max Kemkoye : « Juridiquement, techniquement, financièrement et politiquement, les élections législatives sont impossibles en 2019. »

Où le bât blesse ?

A en croire la Céni, tout est mis en œuvre pour la concrétisation du scrutin. « Les différentes sous-commissions de la Céni travaillent déjà d’arrache-pied », avance le président de l’organe, Kodi Mahamat. Des propos bétonnés par le président du CNDP : « Les rumeurs sur la non tenue des élections en 2019 sont fausses (…) Dans la Loi de finances 2019 adoptée par l’Assemblée nationale, 33 milliards de francs CFA sont dédiés aux élections législatives. »

Le président de la République a rencontré le 29 mai les membres du CNDP et ceux de la Céni. Ils ont été « renseignés sur la tenue des législatives et communales en 2019 », afin d’organiser le scrutin dans de bonnes conditions. Le Chef de l’Etat a appelé tous les acteurs à intensifier les efforts, “en reléguant en arrière-plan les clivages et les divisions inutiles“.

Petite éclaircie à l’horizon : le comité de pilotage du projet « élections » a tenue récemment sa première session. Il a étudié et adopté le « projet d’appui à la crédibilité et à la transparence des élections au Tchad ».  Alors réelle avancée vers le scrutin ou le début d’un long débat seulement ?