Le sujet fait grand débat dans différents milieux intellectuels. Idriss Mahamat Djimi, enseignant-chercheur en Droit, fait son analyse.

A la suite de la publication de la correspondance du directeur du cabinet civil de la Présidence de la République  adressée au Premier ministre, dont l’objet est “Recrutement à la Fonction publique” et dans laquelle on instruit à “procéder obligatoirement par voie de concours dans les différents recrutements”, beaucoup se sont improvisés en spécialiste du droit public, surtout du droit de la Fonction publique, pour commenter, interpréter sinon clarifier la portée de ladite correspondance.


Certains ont fait du bricolage en convoquant çà et là quelques dispositions de la loi 017/PR/2001 portant Statut général de la Fonction publique pour tirer une conclusion sans pour autant cerner tous les contours des dispositions en question et sans même chercher à savoir si celles-ci ne sont pas destinées à être complétées par de textes particuliers ; d’autres, quelque peu prétentieux, se sont permis d’émettre une opinion en dehors de toute considération juridique. Sans verser dans une longue littérature, je voudrais modestement apporter les précisions suivantes :

1 – Certes, conformément aux dispositions de la loi 017/PR/2001, “les recrutements s’opèrent par voie de concours” (art.41). C’est le principe. Et, exceptionnellement, “il est prévu un recrutement sur poste en vue de répondre à des besoins ponctuels et clairement identifiés”.

Ce qui nous intéresse ici, dans le cadre de ce post, ce n’est pas l’exception, mais plutôt le principe qu’est le concours et qui fait l’objet de débats houleux. Mais que signifie le terme concours ? Quelles en sont ses différentes formes ? De quelle manière le concours doit être organisé ?

Sans la réponse à ces questions, on ne peut pas véritablement cerner tous les contours du sujet. C’est la raison pour laquelle la loi 017/PR/2001, elle-même, souligne clairement que “Un décret pris en Conseil des ministres détermine les modalités d’organisation des concours” (art 43).

Ce décret devant compléter la loi 017/PR/2001 portant Statut général de la Fonction publique a-t-il été pris ? Qu’est-ce qu’il apporte exactement comme précision supplémentaire sur ce que la loi 017/PR/2001 avait ébauché ? La connaissance du contenu de ce décret, s’il en existe, est une condition préalable pour la compréhension de la modalité de recrutement par concours.

Cela dit, que ce décret ait été pris ou pas encore, une chose est sûre : en droit comparé, il existe plusieurs types de concours. Certains sont dits “concours sur titre”, d’autres sont appelés “concours sur épreuve”.

Le premier consiste à sélectionner les candidats sur dossier (étude de dossiers).
Le jury ou la commission de recrutement sélectionne les futurs fonctionnaires sur la simple base de l’examen de leurs dossiers, sans les mettre tous dans une salle d’examen afin de les évaluer. Il n’y a ni épreuve écrite ni épreuve orale à cet effet. Le second, c’est-à-dire le concours sur épreuve, est l’inverse du premier.

2 – Depuis que les gens ont pris connaissance de la correspondance rappelant le recrutement par voie de concours, ils ont tous ou presque pensé au concours sur épreuve, en ignorant complètement que le concours peut aussi être une simple sélection sur dossier (concours sur titre). Cette deuxième hypothèse existe bien et elle peut être bien valable.

Certains, les plus radicaux, ont même eu à clamer haut et fort qu’au Tchad, il n’y a jamais eu recrutement à la Fonction publique par voie de concours ; que jusqu’ici les recrutements se sont opérés en violation de la loi. Un tel raisonnement peut être valable mais pas suffisant.

Encore une fois, qu’est-ce qu’ils en entendent, sinon qu’est-ce qu’on doit entendre par les termes “Recrutement par voie de concours”. Seule une lecture globalisante de textes permet de trancher clairement cette question. Oui, il faut recourir aux textes, mais il faut aussi bien les interpréter.

Idriss Mahamat Djimi, enseignant-chercheur en Droit