CHRONIQUE – Le secteur de l’enseignement supérieur au Tchad est malade et paralysé. Il fait donc du surplace. Les mêmes difficultés connues de tous se perpétuent.  Les étudiants, futurs cadres du pays, en sont les victimes.

Les étudiants tchadiens des universités et instituts publics manquent de tout. Mais, ils donnent tout pour sortir de ce calvaire. Les plus téméraires, devrais-je dire. Car être simplement intelligent ne suffit pas.C’est une situation semblable à une formation militaire. Beaucoup y laissent des plumes. Beaucoup prient et jeûnent pour vite voir les années passer. Ils se laissent bercer par l’espoir de « devenir quelqu’un ». Comme le voisin du quartier. Quoi de plus normal !

Avec l’inauguration du campus universitaire de Toukra en 2011, par le défunt président Deby, beaucoup d’étudiants, ou du moins ceux de N’Djamena, pensaient voir leurs situations s’améliorer peu à peu. Une décennie plus tard, que nenni ! Il est bien vrai que cet édifice a considérablement réduit le récurrent problème de salles. Ambitionnant même de parer à la mauvaise condition de restauration des étudiants. Cela n’aura duré que quelques années. Puisque l’État qui subventionne ce réfectoire n’honore plus ses engagements. Conséquences : les poulets de chair, poissons braisés, laits industriels et autres ‘’ rares plats’’ dans nos universités ne sont plus servis au prix de 100 f. Les étudiants qui ont décidé de ne plus manger à la maison à cause de cette « révolution éclair » s’en mordent les doigts. Plus d’appels pour demander si le resto est ouvert ou pas. Il est bien fermé. A cette allure où rien ne bouge, cela pourrait encore durer quelques années. Il faudra désormais « s’arranger » avec les « mamans » qui proposent les plats de « béton » ( Le haricot mâtiné du riz)pour tenir la journée à la fac.

C’est un point moins fâcheux considérant d’autres difficultés auxquelles ils sont durement confrontés. Dans les amphithéâtres, il faut être plus rapide que l’autre pour arracher sa place. Tant pis pour les retardataires. Ils pourront toujours s’asseoir à même le sol ou suivre les cours depuis les ouvertures. S’ils le peuvent. Car se tenir debout  pendant des heures ou toute la journée est un choix herculéen. A Toukra, certains niveaux font cours au « logement ». Comment peut-on normalement faire cours dans des logements, qui sont en réalité des salles de lecture inappropriées pour un exercice pareil. Pour un  effectif avoisinant généralement 500 à 600 étudiants. Dans une salle de lecture svp !Pas loin que le vendredi, 18 juin 2021, les étudiants de la 3e année de géographie ont perturbé les cours pour montrer leur colère.  Parlant de salles de classe, les étudiants de la faculté de médecine d’Abéché ont été ceux qui ont vraiment bandé les muscles pour se faire entendre. Comme solution, certains niveaux ont été délocalisés à N’Djamena. Les lamentations et autres mécontentements de ceux de Moundou, Mao et autres n’atteignent presque jamais des oreilles attentives.

Ouf ! l’insuffisance du nombre des bus alors ! Il a fallu que le Centre national des œuvres universitaires loue des bus d’avec des agences de voyage de la place pour soulager un tant soit peu les étudiants. A coups de millions de nos francs. Le ministre de la Santé arguait en septembre de l’année passée devant les députés que les bus commandés par l’État tchadien ne sont toujours pas arrivés à N’Djamena à cause de la Covid-19 qui rendait difficile les échanges internationaux. Où en sommes-nous ? Depuis lors, rien ne semble bougé. Et ces agences de voyage continuent à se sucrer sur le dos du contribuable tchadien. 4h et 5h du matin. Ce sont des heures pendant lesquelles les étudiants se privent de sommeil pour espérer, au moyen de ces bus, rallier leurs différents sites. Les médecins pourraient bien avoir dans les prochaines années, des cas d’insomnie et de stress avancés.

Et l’enseignement même en question. Toujours les mêmes enseignants aux différents niveaux. Ils sont également présents dans plusieurs départements. Pour quelle efficience et résultats ? beaucoup s’absentent à cause de leurs nombreuses occupations pour se rattraper tardivement à l’approche des examens, d’autres ne sont présents que par leurs noms qui figurent sur l’emploi du temps. L’on vous fait économie des nombreux autres problèmes liés à l’insuffisance des livres dans  les bibliothèques, des outils appropriés dans les laboratoires, la connexion internet, l’électricité etc. concourant à la désagrégation de l’enseignement supérieur.

La suppression de la bourse des étudiants a été décidée en 2016. Une des mesures d’austérité prise par le gouvernement pour répondre aux exigences des bailleurs internationaux. L’on nous disait alors que ces milliards seront réinvestis dans les œuvres universitaires. Que du dilatoire. Malgré que les frais d’inscriptions ont grimpés de 25 000 à 50 000 f( régime normal) pour le cycle licence, les enseignants connaissent toujours des arriérés de salaire. Les étudiants, eux, sont découragés et ne veulent qu’étudier. Aidez-les ! Mais surtout, chères autorités, mettez en place des politiques d’emploi cohérentes pour éviter qu’ils ne traversent deux fois le désert. A l’exemple des professionnels de l’éducation qui ont finalement décidé de quitter le pays. C’est une honte pour le Tchad !