POLITIQUE – A l’ occasion de la proclamation de la République, un regard rétrospectif s’impose. De la colonisation à la création de l’Etat tchadien, quels sont les grands moments ? Un voyage nous permettra d’entrée dans l’histoire politique depuis le bassin du Lac Tchad à la République du Tchad.

Comment était le Tchad avant l’époque précoloniale, coloniale jusqu’à son accession à l’indépendance ? C’est la question que certains curieux se posent. Dès lors, l’on a envie de se demander où commence l’histoire politique du Tchad ? Une problématique complexe répondre au vu de cette grandeur, immensité et complexe évènement qui ont marqué cette actuelle République du Tchad.

C’est ainsi qu’à l’occasion de la fête de la Proclamation de la république du Tchad, il est capital de jeter un regard rétrospectif. Un chemin depuis la colonisation à la décolonisation. Mais avant cela, il est judicieux de définir le concept même de la « République ». En effet, le concept vient du latin « Res publica », qui signifie « la chose publique ». Dès lors, le voyage peut commencer.

La période précoloniale

La France entre au Tchad en 1891 et y lance des expéditions militaires contre les royaumes musulmans. En 1898, la France lance trois expéditions en direction du Tchad : la mission Voulet-Chanoine depuis Dakar et le fleuve Niger, la mission Foureau-Lamy depuis Alger et le Sahara algérien et la mission d’Émile Gentil depuis le Moyen-Congo. Après quoi vient la bataille de Kousseri.

  • La bataille de Kousseri du 20 avril 1900 et la mise sous protectorat du Tchad

Le Tchad était considéré comme un territoire militaire de la France à cette époque-là. Rabat, conquérant, chassé du Soudan se lance à la conquête des Royaumes qui existaient en ce moment autour du bassin du Lac Tchad et de l’Oubangui Chari. Il a été poursuivi par trois contingents français qui l’ont intercepté à Kousseri puis tué. C’était la bataille de Kousseri.

Dès lors « l’histoire de la République du Tchad actuelle a commencé », estime Dr Ousmane Houzibé, juriste politologue. Le Tchad était à l’époque un territoire stratégique pour la France et sous protectorat français.

  • La participation du Tchad à la première guerre mondiale de 1914 – 1918

L’on ne le dit pas assez mais il est bien vrai que le Tchad, en tant colonie française à participer à la première guerre mondiale. Les combattants tchadiens au titre des autres en Afrique ont participé aux côtés de la France dès le début de la guerre.

C’était au Cameroun. Ce pays a été le théâtre de la guerre. Le régiment composé de Sénégalais, Maliens et Tchadiens créé en 1910 combat les Allemands présents au front du Nord Kameroun.  Le combat a duré plus d’un an et demi. Les Tchadiens ont participé pas seulement en tant que combattants sur ce front difficile de la guerre vu le climat mais aussi en tant que logisticiens.

Ainsi, le chemin se fait et fortifie la présence française au territoire de l’Oubangui chari et autour du Lac Tchad. Jusqu’à ce que la France, avec la prise de pouvoir D’Adolf Hitler puisse être envahie. C’est le début de la seconde guerre mondiale.

De la période coloniale à la Proclamation de la République

Considéré comme protectorat français à partir de 1900, le Tchad fut érigé en colonie en 1920 dans le cadre de l’AEF (Afrique-Équatoriale française), au sortir de la Conférence de Versailles. Dès lors, le Tchad, n’ayant pas encore la superficie actuelle, est devenu une colonie française. Sous l’impulsion du gouverneur Félix Éboué, il fut la première colonie française à se rallier à la France libre en 1940.

  • Le premier ralliement des colonies françaises en 1940

Le Tchad, à travers le gouverneur Felix Eboué, a été le premier pays à répondre à l’appel du Général De Gaulle afin de libérer la France envahie par Adolf Hitler. C’était le 18 juin 1940. Mais on ne le dit pas assez. « En juin 1940, la première troupe coloniale qui est au secours de la France est le Tchad. On parle aujourd’hui des tirailleurs sénégalais mais en réalité, cela doit être les tirailleurs tchadiens », insiste Dr Ousmane Houzibé.

N’Djamena pendant la période coloniale

Cette participation est un facteur lointain mais aussi principal de la décolonisation, donc de la proclamation de la République du Tchad. Le Tchad et ses alliés libèrent la France et la guerre prend fin.

  • La conférence de Brazzaville 1944 – 1946

L’accession du Tchad à la souveraineté internationale n’est pas le fruit d’une lutte armée de libération comme au Cameroun et plus tard en Algérie mais plutôt un cadeau généreusement offert sur un plateau par la métropole.

« La proclamation de la République résulte d’un long processus de décolonisation dont les premiers repères ont été posés à la conférence de Brazzaville en 1944 », explique Dr Ousmane Houzibé.

La vie politique a commencé au Tchad, comme partout ailleurs en Afrique noire francophone, après la conférence de Brazzaville de février 1944.

Même si cette conférence a écarté toute idée d’autonomie et toute possibilité d’évolution hors du cadre français, elle constitue tout de même un pas en avant par rapport au passé colonial pur et dur, car pour la première fois est envisagé la possibilité de réformes allant dans le sens de l’évolution politique, économique et sociale des colonies.

  • L’instauration de l’Union française

La promulgation de la Constitution du 27 octobre qui, en instituant l’Union française, a apporté des changements notables : citoyenneté et droit de vote, représentation des Territoires d’Outre-mer (TOM) au parlement français et à l’Assemblée de l’Union française, création d’Assemblées territoriales entre autres.

A RELIRE : « La République du Tchad est une création des Français », affirme Joseph Djimarangar Dadnadji

Commencer de ce temps, les votes se suivent à un rythme accéléré pour élire les représentants du Tchad dans les différentes assemblées. « Le corps électoral était divisé en deux collèges : un premier collège pour les colons et un deuxième pour les indigènes. Les premiers députés du Tchad à l’Assemblée nationale française ont été élus le 10 novembre 1946. Il s’agit de René Malbrant et de Gabriel Lisette. Le 15 décembre de la même année, les 30 membres de la première Assemblée locale du territoire, dite Conseil représentatif, sont à leur tour élus », explique Dr Houzibé.

Membres de la première assemblée locale
  • La Loi-cadre de 1956

Un tournant majeur a été amorcé, en 1956, dans l’évolution politique des territoires grâce aux réformes apportées par la loi-cadre dite « Loi Gaston Deferre ». Cette loi qui date du 23 juin 1956 associe étroitement les populations locales à la gestion de leurs intérêts en instituant le collège unique et le suffrage universel, une assemblée territoriale aux pouvoirs élargis et un conseil de gouvernement investi par celle-ci et responsables devant elle.

A travers ce conseil, apparaît un exécutif local tandis que l’accroissement des attributions de l’Assemblée territoriale la rapproche d’une Assemblée législative. Avec ces réformes, les territoires étaient véritablement engagés sur la voie de l’autonomie. Profitant de l’émiettement de son concurrent, l’UDT, le Parti progressiste tchadien a commencé à amorcer une montée fulgurante.

  • Proclamation de la République aux indépendances

En 1958, un nouveau pas décisif est franchi deux ans plus tard par la promulgation de la Constitution française du 4 octobre 1958 qui instaure la Communauté. Rejetant l’option de l’accession immédiate à l’indépendance ainsi que celle du statu quo, c’est-à-dire le maintien du statut de Territoire d’Outre-mer, les élites tchadiennes décident le 28 novembre 1958 de proclamer le Tchad une République autonome, membre de la Communauté.

C’est donc le choix de la continuité dans le progrès avec la France. La mise en place des institutions politiques de la jeune République a été difficile en raison de l’instabilité politique qui s’est installée très vite et qui trahissait une certaine immaturité de l’élite politique d’alors.

Il y eut quatre gouvernements successifs en l’espace de quatre mois ! Il s’agit des gouvernements provisoires dirigés respectivement par Gabriel Lisette (décembre 1958-février 1959), Sahoulba Gontchomé (10 février-11 mars), Ahmed Koulamallah (12-24 mars) et François Tombalbaye (24 mars-…).

Cependant, l’adoption de la première Constitution de la République le 31 mars puis la victoire écrasante du PPT aux législatives du 31 mai 1959 a ouvert la voie à la mise en place de nouvelles institutions stables. Tombalbaye, qui a été reconduit dans ses fonctions en juin 1959, était chargé de mener à bien ce chantier.