5 jours après les affrontements entre manifestants et forces de l’ordre, le pays est encore groggy. Simples citoyens, associations, politiciens, observateurs demandent que lumière soit faite sur le déroulement de cette journée du 20 octobre 2022. Sans cette étape d’enquête judiciaire, il sera difficile pour notre pays de panser ses plaies et de cheminer vers la démocratie.

Tous réclament des enquêtes aux lendemains des évènements du jeudi 20 octobre 2022 consécutifs à l’appel à manifester de la plateforme associative Wakit-Tama et des partis politiques Les Transformateurs, le PSF (Parti socialiste sans-frontières) et autres. Et Dieu seul sait combien il est nécessaire de se pencher sur ces faits qui ont causé au bas mot 50 morts et des centaines de blessés. Des dénonciations de personnes portées disparus sont venues s’ajouter à la liste des victimes.

Depuis cette date, une joute médiatique s’est mise en place ; les uns accusant les autres, les autres diabolisant les premiers. Il faut que cette cacophonie cesse et que les faits soient établis par une commission d’enquête multipartite.

Des coupables désignés

Les autorités tchadiennes ont cette obligation de rendre des comptes à leur population mais aussi à ces instances internationales avec lesquelles elles travaillent. Mais dans le climat délétère actuel, peut-on attendre un rapport d’enquête sans a priori d’un groupe de personnes qui défend bec et ongle ses intérêts et qui reste campé sur ses positions ? Mais qui surtout désigne déjà ses coupables. Le discours prononcé par le Président de transition Mahamat Idriss Déby ce lundi dans la soirée n’était pas qu’un hommage rendu aux personnes qui ont perdu la vie. Il s’agit là d’une mise en garde pure et simple contre de nouvelles velléités de « déstabilisation du Tchad ». Tout en accusant frontalement Succès Masra et Wakit Tama d’avoir joué à la surenchère politique pour leurs propres intérêts avant et pendant le DNIS et de tenter de déstabiliser le Tchad en investissant les rues aux lendemains de la rencontre du Palais du 15 janvier. Alors que Mahamat Idriss Déby, pour sa part, durant tout ce temps « (a) rejeté cette façon de marchander qui n’honore pas notre pays ».

Vite une enquête indépendante

L’Organisation des Nations unies, qui se pose en juge dans les affaires internationales et conformément à ses règles (« Les commissions d’enquête mandatées par les Nations Unies sont de plus en plus utilisées pour répondre aux situations de graves violations du droit humanitaire international et du droit international relatif aux droits de l’homme (…) elles ont pour objet de promouvoir l’obligation de rendre des comptes pour ces violations et de lutter contre l’impunité. »), doit initier dans les plus brefs délais cette démarche qui nous octroierait une enquête indépendante. Les Tchadiens attendent par conséquent qu’elle remplisse pleinement ce rôle qu’elle s’est arrogée.

« Le Tchad est une cocotte-minute qui peut exploser à tout instant » prévient le site d’information guinée Le Djély, une raison de plus pour qu’une enquête soit diligentée au plus vite et que la lumière soit faite sur les 50 décès de ce jeudi noir.

Le reste de la communauté internationale qui dans son ensemble a condamné les évènements du 20 octobre doit aussi, si elle le peut, mettre la pression sur l’organisation newyorkaise pour lui hâter le pas. Les familles des morts, des blessés, des présumées personnes disparues, les Tchadiens, le Tchad dans son ensemble souhaitent que justice soit faits et que sanctions soient prises et appliquées contre les coupables.

Ce n’est que par cette voie que nous pourrons avancer dans la construction, dans l’élévation de la démocratie au Tchad.

Chérif Adoudou Artine