Le 8 juin dernier, le président des Transformateurs, Succès Masra, a reçu des mains du ministre de l’Administration du territoire, l’arrêté d’autorisation de fonctionner de son parti. Enfin ! Après plus de deux ans à faire un bras-de-fer sur la légalité de leur formation avec l’ancien parti au pouvoir, les Transformateurs se sont résolus à introduire une nouvelle demande d’autorisation de fonctionner le 27 mai dernier. Et le gouvernement de transition leur a accordé le sésame.

Les derniers arrivés dans l’arène politique peuvent désormais compétir. Leur chef qui n’a jamais caché son intention de conquérir le Palais Rose, siège de la présidence, peut commencer à fourbir ses armes. Mais avant cela, il faudra que l’âge minimum de candidature à la fonction suprême, placé à 40 ans soit revu à la baisse pour que Masra soit éligible à la prochaine présidentielle. Ce sera l’une des questions qui attend le prochain dialogue national inclusif et les constituants de la cinquième République à venir.

Si Masra attend que l’épée de Damoclès soit levée sur sa tête, Yaya Dillo, lui, s’est déjà lancé dans la course. Le président d’honneur du Parti socialiste sans frontière (PSF), s’est déclaré candidat à la prochaine présidentielle au cours de la rentrée politique de son parti, le 9 juin. Il a, à l’occasion, fustigé «la déchirure infantile et la guerre familiale au sein du MPS » (Mouvement patriotique du salut, l’ancien parti au pouvoir), « signes du déclin de la gestion patriarcale de l’État ». Même si le porte-parole du MPS, Jean-Bernard Padaré, qui préside le comité d’organisation du congrès qui s’ouvre ce samedi, tente de faire croire que tout va bien, sa formation est déstabilisée depuis la disparition de son président-fondateur. Le « grand parti rassembleur » peine à rassembler ses membres et il y a des fissures dans ses rangs. En bon opportuniste, Dillo veut s’engouffrer dans ces brèches et récupérer ses anciens camarades « baministes » déçus, notamment Mahamat Zen Bada, le secrétaire général du MPS qui, depuis Paris, a tenté de s’opposer à la tenue du congrès, en vain.

Dillo veut succéder à son oncle Idriss Déby Itno. L’on risque donc d’assister à une bataille démocratique fratricide. Car la redynamisation du MPS au cours du congrès de ce weekend, passe aussi par une restructuration, de fond en comble. L’équipe dirigeante sera remaniée, voire changée. Exit Zen Bada, qui aura tenu pendant cinq bonnes années, envers et contre tous ! Le président-fondateur l’avait imposé aux manettes du parti, il lui a toujours renouvelé sa confiance alors qu’il était contesté de toutes parts. Le Maréchal parti, son protégé joue ses derniers jours à la tête du MPS. Pour remplacer Zen Bada, plusieurs personnalités sont dans les starting-blocks, dont Padaré qui n’avait pas vu d’un bon œil la désignation du premier à un poste où il se voyait déjà en 2016.

Outre le secrétariat général du MPS, un autre poste sera très scruté : la présidence d’honneur du parti. Le Maréchal Déby est mort, mais il restera le seul « président-fondateur ». En sa mémoire, son parti ne peut donc pas se permettre de nommer un autre président, qui soit-il, pour le remplacer. Le MPS se contentera donc de désigner un « président d’honneur ». Mais que l’on ne s’y trompe pas, le « président d’honneur » ne sera pas un poste honorifique. Ce sera lui le vrai patron du MPS, son potentiel candidat à la prochaine présidentielle, comme Dillo au PSF. Et il se susurre que c’est l’un des fils de feu président-fondateur qui sera placé à sa place. Le président de la transition, Mahamat Idriss Déby Itno, s’étant pratiquement mis « hors-jeu », qui de ses deux frères Zakaria et Abdelkérim sera fait « président d’honneur » ? Nous aurons la réponse dans quarante-huit heures au plus.

A l’instar des Transformateurs, du PSF et du MPS, les autres partis sont en ébullition. C’est le branle-bas général. La transition ne fait que commencer, le dialogue national inclusif désiré de tous n’est pas encore planifié, l’on ne connaît pas encore les dates des prochaines élections présidentielle et législatives, mais toute le landerneau politique tchadien est déjà à pied d’œuvre. Les prochaines compétitions électorales seront rudes. Espérons que les règles du jeu démocratique seront revues, assainies au cours des prochains mois, et que les partis qui proposeront les meilleurs projets de société aux Tchadiens, gagneront.

La Rédaction