Lundi 04 mai, le ministre de la Santé publique, Mahamoud Youssouf Khayal, a été interpelé par les députés. Une interpellation relative à la gestion de la pandémie du coronavirus. Les Représentants du peuple ont exprimé leurs inquiétudes quant à la gestion des frontières terrestres du Tchad qui constituent une porte d’entrée de la pandémie.

« La porosité de nos frontières fait que des personnes peuvent y entrer partout. Il nous est toujours rapporté que du coté du Cameroun, les gens ont des voies d’entrée. Ce qui fait que la maladie peut venir de l’extérieur. Que sais-je du coté de la Libye, du Soudan ? Ce sont autant des choses qui nous inquiètent, qui nous font peur », s’est inquiété le député Rakhis Ahmat Saleh, élu du Batha et membre du groupe parlementaire les Républicains.  

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A l’heure où le nombre de contamination flambe, les élus du peuple trouvent que la question de gestion des frontières doit être prise avec sérieux. Mais pour le ministre de la Santé, la situation dans les frontières n’est plus à craindre puisque la phase la plus complexe est déjà derrière. « Dans les frontières, on est passé de 5 000 à 1 000 personnes. Au moment où on gérait les 5 000 personnes, on avait tous les problèmes du monde mais Dieu merci on est revenu à 1 000. Nous avons mis tout le long des frontières, des policiers, des gendarmes, des agents de la police municipale et même l’armée pour la surveillance et pour empêcher les entrées frauduleuses. Un travail extraordinaire a été fait à ce niveau », réplique le ministre Mahamoud Youssouf Khayal.

Des explications qui ne semblent pas du tout convaincre les députés, du moins pas le député Ahmat Issa Badi, l’un des auteurs des questions adressées au ministre. «  Avez –vous pensé à mettre sur pied des brigades mobiles mixtes composées des forces de l’ordre et des agents de santé équipés des matériels de dépistages pour la surveillances des points d’entrée du Tchad ? », a insisté l’élu du 6e arrondissement de la ville de N’Djamena. Oui, rétorque le ministre de la Santé publique qui assure qu’après la fermeture de l’aéroport, les frontières avec le Cameroun, le Soudan et la Centrafrique ont été fermées.

Ensuite dit-il, « Dans les 9 points d’entrée, on a mis des agents de la santé équipés avec des thermoflashes ». Il souligne par ailleurs que la cellule de veille n’avait pas prévu un retour massif des étudiants tchadiens qui sont au Cameroun.  « Nous avons imaginé que les Camerounais allaient prendre des dispositions pour les accueillir de l’autre côté des frontières. Mais ça n’a pas été le cas », a regretté le ministre. Il indique d’ailleurs que toutes les frontières ont été prises en compte dans le plan de contingence de la pandémie.

Tout n’est pas rose, il faut revoir certains aspects

Ali Kolotou Tchaïmi, président du groupe parlementaire du Mouvement patriotique du salut (MPS), ne voit pas les choses sous le même angle. Pour lui, le ministre n’est pas assez informé, il y a des tares à combler. « Après vérification, après des investigations, je vous dis une chose. Au niveau des frontières avec le Cameroun, nos concitoyens, étudiants et autres en complicité avec les forces de sécurité ou avec les autorités en place font leur entrée à N’Djamena », a t-il fait remarquer. Mais le patron du MPS au parlement ne s’est pas arrêté là.  « Moi qui vous parle, je suis le président de votre majorité parlementaire qui vous suit, mais certaines pratiques sont impardonnables. Nous, on vous soutient mais il faut prendre toutes les dispositions qui s’imposent. Vous avez fait des efforts importants, mais ne venez pas nous dire que tout est rose. Il y a des insuffisances, il faut les régler », a t-il martelé.

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Face à cette intransigeance des députés, Mahamoud Youssouf Khayal qui croit fermement que son département ministériel assure jusqu’à présent, une gestion efficace de la situation sur le terrain, bat en retraite. « En ce qui concerne les frontières, vous avez totalement raison, concède t-il avant de poursuivre :  dans les frontières, le rôle du ministère de la santé c’est de vérifier ceux qui rentrent et donner un avis médical. L’Etat a mis les gros moyens mais le travail continue. Chaque fois qu’on se retrouve, on demande au ministre de la défense et à celui de l’intérieur de nous appuyer sur ce point là ».

Cette attitude défensive du ministre de la santé publique a agacé Saleh Kebzabo, président du groupe parlementaire de l’Union nationale pour le développement et le renouveau (UNDR). « Monsieur le ministre, vous avez une posture qui n’est pas bonne. Pendant tout ce temps que vous avez parlé, vous n’avez pas avoué une seule faiblesse. Vous n’avez pas dit, oui, sur tel plan, on s’est trompé. Vous êtes content de bout en bout mais autant lever la séance et partir, puisque vous êtes content. Non monsieur le ministre, il y a des failles », s’est-il emporté.

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Pour Moussa Kadam, premier vice-président du parlement, il n’y a pas que la situation aux frontières qui inquiète. Le réel problème qui gangrène la lutte contre le covid-19 au Tchad est ailleurs. « Le plan de contingence a été élaboré plusieurs semaines avant la découverte du premier cas.  Mais le comité scientifique est mis en place 11 ou 12 jours après le premier cas. Alors les impressions que nous avons c’est que la cellule de veille et de sécurité sanitaire gère de manière bureaucratique, administrative des situations d’urgence», a  déploré Moussa Kadam, lui aussi agacé.