REPORTAGE – D’un coin chaud, le quartier Kabalaye a basculé à un lieu silencieux et inhabituel. Ses habitués tentent de s’adapter au nouveau mode de vie imposé par les mesures préventives contre le coronavirus.

Les sonorités musicales de tout genre comme d’habitude ont fait place au silence à Kabalaye, un quartier du 3e arrondissement de N’Djamena. Les odeurs dégagées par les grillades ont cédé l’espace à l’air pur. Les ruelles de ce quartier populaire de la capitale tchadienne sont pratiquement désertes à seulement 20 heures, plus de petits commerces aux alentours. Près du bar Club 105, deux femmes assisses sur un banc hèlent quelques rares personnes qui se baladent.

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A la même heure il y a un mois, tout le long de l’avenue Bokassa du côté de Kabalaye, le pasage était discuté. Les cinés club et les bars rendaient attractifs ce quartier même aux nouveaux arrivés dans la cité capitale. Mais depuis que le gouvernement a interdit l’attroupement des personnes, les bars, les casinos, les cinés club ont cessé toute activité.

Depuis ces mesures, notre quotidien a basculé

un jeune de quartier Kabalaye

Il fait chaud, nous ne pouvons pas nous réfugier à l’intérieur.  En plus, nous sommes sans électricité “, laisse entendre un trentenaire, d’une voix imposante. « Arrête de répondre, c’est à toi de jouer », ordonne un autre dans le groupe d’une dizaine de personnes. La partie du poker se poursuit. “Depuis ces mesures, notre quotidien a basculé. Regarde, nos lieux de distraction sont tous fermés “, soutient le plus robuste d’entre eux en nous montrant de l’index le petit café en face. Le coin est verrouillé à double tour.

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Quelqu’un m’a trahi 

tenancier d’un bar

Il y a une semaine, ce café tournait à flot. Il régnait une ambiance sans pareille. La rumba congolaise retentissait au plaisir des clients. La piste de danse toujours débordée par ceux qui sautillaient au rythme de la musique. Les gens se bousculaient à l’entrée.

Ce soir, son enseigne brille au jeu de lumière sans attirer la moindre foule. À l’intérieur, les tables sont mal rangées, les chaises vides et le silence s’est accommodé du lieu. « Si nous pouvons livrer nos bières à nos clients à la maison, ça nous fera plaisir » en rigole le tenancier qui préfère garder l’anonymat.