Votre rédaction choisit de partager avec vous via la rubrique billet d’humeur des saillies et humeurs de quelques personnalités et experts au gré de l’actualité. Pour la première, nous partageons avec vous ce coup de gueule de l’aîné Hourmadji Moussa Doumgor publié sur son compte facebook. Ancien journaliste, plusieurs fois ministre et conseiller qui s’exprime sur l’ambiance du moment créée par les actions de l’Ige, entre arrestation, suspicions, fausses rumeurs et diffamation.

Sommes-nous tous pourris?

Ayant été ministre, plusieurs fois conseillers de Premiers ministres et conseiller chargé de la Communication du président de l’Assemblée nationale, je m’interdis de commenter les événements politiques nationaux par devoir de réserve. Mais quand mon fils m’informe un matin de l’arrestation du ministre d’Etat Kalzeube pour tentative de corruption, j’ai répondu immédiatement : non pas lui!

Trois ans avec lui au gouvernement, j’ai gardé l’image d’un homme discret, humble, compétent, dégageant un parfum de religiosité qui ne pouvait que le mettre au dessus de tout soupçon de malveillance. Personne n’est certes pas au dessus de la loi, mais une personnalité de cette envergure et de cette respectabilité, qu’on arrête et qu’on écroue avant d’être jugé et condamné m’a profondément bouleversé toute la journée.

Personne ne peut être à l’abri d’une telle infortune. Je me mets à m’interroger sur les signes extérieurs qui pouvaient m’exposer aussi au soupçon de malveillance en tant qu’ancien ministre, puisque l’opinion ne peut conclure que tous les hommes politiques sont des corrompus, des délinquants et des escrocs . J’ai pensé alors à mon duplex, construit en six ans dont trois dans la fonction de ministre, deux dans celle de conseiller à la Primature et une au poste de secrétaire général. J’ai bénéficié de 3 crédits bancaires d’un montant total de 15 millions. Mon ami, le défunt premier ministre Pascal avait contribué pour la construction de la dalle avec 6 millions. J’ai aussi bénéficié des enveloppes des Premiers ministres Youssouf Saleh Abbas et d’Emmanuel Nadingar pour faire face aux urgences liées à ma fonction. Ce sont là les seules grosses sommes dont j’ai souvenance de mon passage au gouvernement.

Il est vrai que je n’aurais jamais construit ce duplex avec mon salaire de journaliste fonctionnaire mais vivre avec l’idée d’être un pourri sur la conscience n’est pas très valorisant.

J’ai réformé une voiture vieille de cinq ans qui n’avait pas tenu longtemps après mon départ du gouvernement. Tous des pourris,donc moi aussi ! C’est ça l’équation. ça fait penser aux cris des algériens, des irakiens aujourd’hui, et au marche qui porta Macron au pouvoir hier avec le slogan Dégagez, tous des pourris! lancé aux hommes politiques.

Quel que soit l’issue de l’affaire Kalzeube, il restera une cicatrice indélébile dans le cœur. Chacun qui a été associé à la gestion médiatique, administratif, politique et financier au haut niveau de l’Etat doit se regarder devant le miroir de sa conscience. Ah, la politique ! Comme elle peut élever mais aussi détruire un homme.

Hourmadji Doumgor Moussa