En 2024, le Tchad a été le théâtre de plusieurs événements politiques majeurs qui ont façonné son paysage national. Voici une rétrospective des principaux sujets politiques de l’année en 9 points.
1- Nomination de Succès Masra au poste de Premier ministre
L’année a commencé par une nouvelle retentissante : la nomination, le 1er janvier 2024, de l’opposant numéro un du président de transition au poste de Premier ministre. Soit deux mois après son retour d’exil suite à la signature de l’accord de Kinshasa avec le gouvernement. En effet, Succès Masra a quitté le pays après la répression sanglante de la marche du 20 octobre 2022 dont il était l’un des initiateurs pour protester contre la prolongation de la transition par le dialogue national inclusif et souverain.
Le 2 janvier, il forme son gouvernement qui tiendra moins de six mois. Car après sa défaite à l’élection présidentielle du 6 mai, il a rendu le tablier.
2- Mort de Yaya Dillo
Le deuxième fait marquant de l’année est la mort, le 28 février, de Yaya Dillo Djerou Betchi, le leader du parti socialiste sans frontières (PSF), lors de l’assaut de l’armée tchadienne contre le siège de sa formation politique. Abakar Tourabi, secrétaire national adjoint aux finances du parti a été interpellé par l’Agence nationale de sécurité de l’Etat (ANSE) qui lui reprocherait d’être le cerveau d’une attaque contre le président de la Cour suprême. Mais ses partisans qui croyaient qu’il était mort assiègent l’institution pour réclamer son corps. Acculés, ils se retirent au siège du parti où ils ont été assiégés. Le 29 février, le procureur près le tribunal de grande instance de N’Djamena annonce la mort de Yaya Dillo dans cet assaut.
3- Élection présidentielle du 6 mai 2024
Le 6 mai, le Tchad a organisé une élection présidentielle cruciale pour son avenir politique. Mahamat Idriss Déby Itno, fils du défunt président Idriss Déby Itno, a été élu avec 61,3 % des voix face à neuf (9) challengers. Son principal adversaire, Succès Masra, le leader des Transformateurs, Premier ministre à l’époque, a obtenu 18,5 % des suffrages. Malgré ses contestations, Mahamat Idriss Déby Itno est investi le 23 mai nouveau président élu du Tchad.
4- Arrestations et tensions politiques
L’année a également été marquée par une recrudescence d’arrestations orchestrées par les services de renseignement. Des personnalités civiles, politiques et religieuses, telles que l’opposant Robert Gam et l’abbé Simon-Pierre Madou, ont été arrêtées, suscitant des inquiétudes quant au respect des droits humains et des libertés publiques.
5- Inondations et gestion politique
Des inondations dévastatrices ont touché la capitale, N’Djamena et une grande partie du territoire national, causant près de 600 décès et affectant environ 2 millions de personnes. Malgré l’ampleur de la catastrophe, le gouvernement a choisi de ne pas déclarer l’état de catastrophe naturelle, probablement pour éviter le report des élections législatives et locales du 29 décembre. Cette décision a suscité des critiques quant à la priorité accordée aux considérations politiques sur les urgences humanitaires.
6- Relations franco-tchadiennes et affaires judiciaires
Les relations entre le Tchad et la France ont été mises à l’épreuve suite à des révélations concernant des dépenses somptuaires attribuées au président Mahamat Idriss Déby. Une enquête du Parquet national financier français a été ouverte pour détournement de fonds publics, après la découverte d’achats de vêtements de luxe pour un montant de plus de 900 000 euros. Cette affaire a exacerbé les tensions diplomatiques entre les deux pays.
7- Retrait des troupes françaises
Le 28 novembre, le Tchad a annoncé la rupture des accords de coopération militaire avec la France, entraînant le retrait progressif des troupes françaises stationnées sur son territoire. Ce retrait a débuté avec le départ de deux avions de chasse Mirage 2000-D, puis la rétrocession de la base de Faya à l’armée tchadienne, marquant une reconfiguration significative des relations de défense entre les deux nations.
8 – Elévation du chef de l’Etat à la dignité de maréchal
Le 21 décembre 2024, le président de la République, Mahamat Idriss Déby Itno, a été élevé à la dignité de maréchal du Tchad. C’est lors d’une session du Conseil national de transition délocalisée spécialement à la présidence de la République. Ce même CNT qui a adopté la résolution y relative le 9 décembre 2024 suite à l’opération Haskanite que le chef de l’Etat a conduite en réponse à une attaque terroriste contre une base de l’armée tchadienne dans le Lac. Mahamat Idriss Déby devient ainsi le deuxième maréchal du Tchad après son défunt père.
9- Élections législatives et locales du 29 décembre 2024
En fin, le 29 décembre, le Tchad a organisé des élections législatives, provinciales et communales, visant à élire les députés, les conseillers provinciaux et les conseillers communaux. Ces scrutins sont perçus comme la dernière étape de la transition enclenchée en avril 2021 avec la mort du président Idriss Déby Itno et la prise du pouvoir par son fils à la tête du Conseil militaire de transition.
Tandis que le parti au pouvoir se réjouit de l’organisation de ces élections et de la participation des électeurs, les partisans du boycott, notamment Les Transformateurs et les partis membres du Groupe de concertation des acteurs politiques estiment que leur appel a été largement entendu.