À l’aube de l’ouverture de la première session ordinaire de 2025, l’Assemblée nationale s’apprête à tourner une page importante de son histoire. Après près de 14 ans à sa tête, Haroun Kabadi quitte le perchoir, laissant derrière lui une compétition féroce pour lui succéder. Entre expériences solides, ambitions personnelles et perspectives historiques, les 188 nouveaux députés tracent les contours de la future présidence de cette institution clé.

C’est désormais certain : Haroun Kabadi, figure emblématique de l’Assemblée nationale tchadienne, ne siègera plus à sa tête. Après 14 années passées à présider cette institution, il dirigera sa dernière séance lors de l’ouverture de la première session ordinaire de 2025, prévue pour la première semaine de février. Le départ de ce natif de Dindjebo, dans le département de Lac Iro, province du Moyen-Chari, ouvre la voie à une intense compétition pour désigner son successeur à la présidence de la quatrième législature. À quelques jours de cette session, les 188 nouveaux députés, élus lors des récentes élections couplées (législatives, communales et provinciales), s’activent en coulisses pour décrocher le prestigieux poste. Mais qui sont les favoris dans cette course ?

Jacques Laouhingamaye Dingaomaibe : l’homme de l’ombre

Jacques Laouhingamaye Dingaomaibe, un constitutionnaliste chevronné, est fréquemment cité comme le successeur idéal. Député expérimenté et président de la commission des lois et de la politique générale à l’Assemblée nationale, il est reconnu pour sa loyauté envers le Mouvement Patriotique du Salut (MPS), le parti au pouvoir. Sous le régime du défunt président Idriss Déby Itno, Jacques Laouhingamaye a joué un rôle clé dans le forum national qui a conduit à la création de la 4ᵉ République. Il a également été un acteur déterminant durant la période de transition, ce qui lui a récemment valu d’être élevé à la dignité de Grand-Croix pour services rendus à la nation.

David Houdeingar Ngarimaden : un administrateur chevronné

Autre prétendant sérieux, David Houdeingar Ngarimaden, un énarque au parcours impressionnant. Ancien ministre à plusieurs reprises et deux fois secrétaire général à la présidence, il est considéré comme une figure incontournable de l’administration tchadienne. Bien qu’il soit un novice à l’hémicycle, son intégrité et son tempérament calme sont souvent salués par ses camarades du MPS. Il est également régulièrement mentionné pour sa contribution à la rédaction de projets de loi. Autant d’atouts qui renforcent ses chances de prétendre au perchoir.

Mbainaye Eugénie : le pari d’une présidence féminine historique

Mbainaye Eugénie pourrait, quant à elle, compter sur le soutien des femmes députées, qui représentent 34 % de la nouvelle législature, pour briguer la présidence de l’Assemblée nationale. Si elle parvient à convaincre ses collègues féminines, elle pourrait marquer l’histoire en devenant la première femme à diriger cette institution. Cependant, la tâche s’annonce ardue pour cette élue qui n’a rejoint l’hémicycle qu’en juin 2021 en tant que conseillère nationale de transition. Originaire du Logone Occidental, elle devra surmonter les préjugés et les pronostics pour espérer accéder au poste.

Ali Kolotou Tchaïmi : un des favoris

Ali Kolotou Tchaïmi, natif de Salal, dans le Bahr El Ghazel, est considéré comme le candidat le plus naturel pour succéder à Haroun Kabadi. Vice-président de l’Assemblée nationale et proche collaborateur de ce dernier, il aurait même reçu son soutien tacite. Présenté un temps pour diriger le Conseil National de Transition, il avait dû s’effacer au profit de Haroun Kabadi après la dissolution de l’Assemblée par la junte militaire en 2021. Artisan de l’élévation du président Mahamat Idriss Déby Itno à la dignité de Maréchal, Ali Kolotou Tchaïmi semble prêt à franchir la dernière marche pour accéder au perchoir.

Un choix décisif entre vote et consensus

La désignation du nouveau président de l’Assemblée nationale se fera par vote des députés ou par consensus. La séance sera présidée par le doyen d’âge, conformément aux usages parlementaires. Cette élection sera un moment clé pour l’avenir institutionnel du pays et pourrait redéfinir les équilibres politiques au sein du parlement tchadien.