Le Conseil national de transition (CNT), organe législatif sous la transition, arrive ce 3 février au terme de sa mission.

A l’annonce du décès du président Idriss Deby Itno le 20 avril 2021, un Conseil militaire de transition (CMT), dirigé par son fils, Mahamat Idriss Deby, prend le pouvoir et dissout notamment l’Assemblée nationale, qui en prend acte, par la voix de son président, Haroun Kabadi. Après des mois de tractations, le Conseil national de transition, composé d’abord de 93 membres, est installé le 5 octobre 2021. Haroun Kabadi, au perchoir depuis 2011, y est maintenu.

Considérés illégitimes par une partie de l’opinion puisque décrétés par le Chef de l’Etat, ces conseillers nationaux vont tout de même progressivement s’imposer à tous et voter, sans exception, tous les projets de loi soumis à leur appréciation. Le 7 novembre 2023, le Conseil va accueillir 104 nouveaux membres dont d’anciens pourfendeurs de la transition tels que Djekombé François, président du Parti union sacrée pour la République (USPR) et Bebzouné Bongoro Théophile, président du Parti pour le rassemblement et l’équité au Tchad (PRET). Le nombre des conseillers nationaux sera porté à 203, le 26 janvier 2024. Parmi les nouveaux membres, l’on compte trois leaders du parti Les Transformateurs à savoir Claudia Moh-Ndomal Hoinathy, Djasrabé Kissamoum et Boukhari Al-Hadj Ousmane Bouladi.

« Parlement du oui », selon certains internautes, le CNT a adopté de nombreuses lois. Le Tchad, brandissant sa souveraineté et contestant la vente d’Esso Exploration and Production Chad Inc à la compagnie britannique Savannah Energy PLC, a décidé de nationaliser tous les actifs de l’ex-filiale d’Exxon Mobil. Le 23 mars 2023, le texte de nationalisation est validé par le CNT. Alors que des réserves sont exprimées quant à la régularité du processus, le gouvernement tchadien est resté droit dans ses bottes. Les deux parties se sont alors engagées dans une procédure judiciaire qui s’annonce longue et complexe.

Le 27 juin 2023, le CNT adopte le projet de Constitution sur la forme unitaire de l’Etat. Cette adoption crée un vif débat au sein de la classe politique, dont une partie accuse le pouvoir d’imposer l’Etat unitaire décentralisé. Malgré leurs interpellations, les partisans de la fédération ne verront jamais la copie d’une Constitution de type fédéral. Au referendum du 17 décembre 2023, la seule Constitution pour un Etat unitaire présenté, est voté à 86%, selon la Commission électorale et publié le 29 décembre 2023.

Chemin faisant, le CNT, parfois sans débats de fond, poursuit son « accompagnement de la transition ». Le 23 novembre 2023, la loi d’amnistie de personnes impliquées dans les manifestations du 20 octobre 2022, contre la prolongation de la transition de deux ans, est voté. Elle concerne, pour l’essentiel, les militants et sympathisants du parti Les Transformateurs, condamnés lors d’une série de procès expéditifs. Cette amnistie intervient après la signature le 31 octobre 2023, à Kinshasa, d’un accord entre Dr Masra Succès, président de ce parti et le gouvernement.

Le 25 janvier 2024, a été adopté le projet de loi organique portant attributions, organisation et fonctionnement du Conseil constitutionnel. Plus haute instance en matière de contentieux électoraux (présidentielle, législatives et sénatoriales), ce Conseil est présidé par Me Jean-Bernard Padaré, ancien porte-parole du Mouvement patriotique du salut (MPS), parti au pouvoir depuis 34 ans.

Il se succède au début de l’année 2024 le vote des institutions et textes devant conduire et règlementer le processus électoral. Le 22 février 2024, le Code électoral, est adopté en dépit des observations sur notamment le non-affichage des résultats devant les bureaux de vote ou le montant jugé exorbitant des cautions que doivent verser les potentiels candidats.

La tension est toujours palpable avec la prise le 28 juin 2024 d’une ordonnance restructurant les unités administratives et le vote respectivement le 29 et 31 juillet de la loi organique portant composition du parlement, régime des inégalités et indemnités parlementaires et celle déterminant le nombre et les limites territoriales des collectivités territoriales des collectivités autonomes. L’on compte désormais 120 départements, 450 sous-préfectures, 125 communes urbaines et 375 communes rurales. L’opposition fustige l’augmentation des circonscriptions électorales dans certaines provinces moins peuplées, mettant au-devant de la scène le clivage Nord-Sud.