La reprise des opérations militaires dans la région du Lac risque de provoquer des conséquences humanitaires, notamment en termes de protection et d’accès, prévient le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) au Tchad, dans son dernier bulletin.
La Force multinationale mixte (FMM), qui intervient dans les pays du bassin du Lac Tchad sous l’égide de l’Union africaine, a annoncé le début de nouvelles opérations militaires dans la région depuis le mois de février 2017. “La situation sécuritaire demeure relativement calme au Tchad, en dépit des opérations en cours, mais celles-ci pourraient avoir un impact sur l’accès humanitaire dans les semaines à venir”, affirme le document d’OCHA.
La communauté humanitaire se prépare à de potentiels nouveaux déplacements de populations et des incidents de protection en lien avec ces nouvelles opérations. Depuis le début de la crise, les violences et incidents de protection et les opérations militaires dans la région du Lac ont causé le déplacement de plus de 127.000 personnes (personnes déplacées internes, réfugiés et retournés) avec des besoins humanitaires multisectoriels.
Lors des opérations de juin à août 2016, une recrudescence d’incidents sécuritaires avait été rapportée, notamment dans les zones insulaires et frontalières avec le Niger et le Nigéria. Cependant, déplore OCHA, le faible nombre de partenaires humanitaires œuvrant dans le domaine de la protection dans la région du Lac, ainsi que les faibles capacités à couvrir l’ensemble de la région rendent difficile le suivi des cas de protection et ne permettent pas de connaître l’ampleur exacte des problèmes de protection (violences, violences sexuelles, taxes illégales…), notamment dans les potentielles zones d’opérations militaires.
Aujourd’hui, les populations restantes dans les zones insulaires et potentiellement affectées par les opérations militaires dans les localités et îles proches du Nigeria et du Niger, semblent relativement peu nombreuses. Cependant, de récentes analyses révèlent que certaines personnes effectuent des mouvements pendulaires entre les lieux de déplacement et leurs îles d’origines pour cultiver, pêcher et garder le bétail, ce qui pourrait les exposer à des risques majeurs de protection (risque d’arrestation ou ciblage par les forces armées ou expositions à d’éventuelles attaques par des combattants). Dans ce contexte, la communauté humanitaire a rappelé l’importance du principe de distinction entre combattants et non-combattants selon le Droit international humanitaire.
La coordination civilo-militaire au Tchad, sous l’égide d’OCHA, continue de promouvoir les échanges d’informations entre acteurs humanitaires et militaires. L’insécurité entraînant une détérioration de l’accès humanitaire, il est important de maintenir un dialogue avec les forces militaires afin de mieux connaître les contraintes opérationnelles de chacun et informer en permanence les militaires des lieux d’assistance humanitaire pour limiter l’exposition aux risques des travailleurs humanitaires. “Pendant les périodes d’opérations militaires, il est d’autant plus important d’assurer le respect des principes humanitaires et du principe de distinction entre les humanitaires et les militaires”, martèle l’agence onusienne.
Les 23 et 24 février 2017, une conférence humanitaire avait été organisée à Oslo (Norvège), afin d’attirer l’attention sur la crise humanitaire et les besoins de solutions durables dans les quatre pays du bassin du lac Tchad. Des promesses de dons à hauteur de 672 millions de dollars y ont été annoncées par 14 donateurs, dont 458 millions pour 2017 dans la région du bassin du lac Tchad, et 214 millions pour 2018 et au-delà. La désagrégation de ces promesses par pays affecté n’est pas encore connue. Mais au Tchad, le plan de réponse humanitaire dans la région du Lac requiert 121 millions en 2017 pour venir en aide à 233.000 personnes.