PORTRAIT. Considérée par beaucoup comme l’héroïne des internautes tchadiens, Zenab Orti a bravé l’interdiction de la marche pacifique du 25 avril. Mais qui est vraiment cette jeune femme ?

Avant qu’elle ne soit derrière les barreaux, elle protestait contre la pénurie de gaz à N’Djamena. Nous sommes le 25 avril. Malgré l’interdiction des autorités, Zenaba Tidjani Idriss Dinguest alias Zenab Orti et ses amis se pointent devant l’Assemblée nationale pour manifester. Mais ils sont très rapidement interpellés par la police.

Courageuse ? Engagée ? Pour une fille d’un officier supérieur de l’armée tchadienne, l’acte reste difficile à qualifier. Toujours est-il que Zenab Orti et les autres manifestants sont ainsi arrêtés et détenus dans les murs de la police judiciaire.

Jeune femme aux yeux fades

La nouvelle est tombée comme un couperet et a fait le tour des réseaux sociaux. D’autant que les internautes tchadiens la comparent à l’héroïne soudanaise Alaa Salah. Cette icône qui haranguait la foule pendant le soulèvement populaire au Soudan.

Dans les locaux de la police, ce 25 avril là, Zebab Orti passe sa toute première nuit en détention. Une expérience unique pour l’écrivaine. Peut-être la jeune femme aux yeux fades pourrait narrer cette histoire un jour dans un autre roman, après son premier Hourriya, un rêve brisé, paru au mois de mai 2018 aux éditions Le Pays.

Sociologue de formation, Zenab Orti est née à N’Djamena en 1991. Une année seulement après l’avènement de la démocratie au Tchad. Mais son enfance est surtout marquée par le décès de son père. La petite fille va au Cameroun où elle est inscrite à l’école maternelle de Bachéoré, dans la ville de Garoua. Là-bas l’on se souvient encore de l’orpheline, curieuse et audacieuse.

Dame de fer

Lorsqu’elle revient à N’Djamena, c’est désormais une dame de fer. Une qualité ou un défaut qu’elle a su entretenir au lycée Thilam Thilam de la capitale.

Aujourd’hui, près de 40 ans après la guerre civile qui avait divisé les Tchadiens en 1979 – Sudistes d’un côté, Nordistes de l’autre -, elle a lancé, en novembre, le concept #Nolimit sur les réseaux sociaux pour l’unification nationale. “Nous n’avons pas choisi d’être des Tchadiens : nous sommes tchadiens et nous sommes condamnés à vivre ensemble”, répète Zenab Orti.

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Sur le terrain, elle combat également les imperfections de la démocratie tchadienne. Ce qui lui vaut sa première incarcération. Mais le parquet de N’Djamena a décidé de classer, ce lundi 29 avril, l’affaire sans suite. Zenab Orti est désormais libre. Mais sa détention dans les locaux de la police judiciaire l’aura-t-elle transformée ?