DIASPORA La jeune quadragénaire d’origine Tchadienne vient d’être élue adjointe au maire de Neuville de Poitou (une commune de 6.000 habitants à 16km de Poitiers), chargée de l’émergence des Projets dans les quartiers.

Mékila Adeline. Ce nom ne vous dit certainement pas grand-chose. Mais désormais, il faut savoir compter avec cette jeune mère de deux filles qui vient de faire son grand saut dans la politique française avec son élection à l’occasion des municipales du dimanche 15 mars dernier. Elle a bénéficié d’une brillante élection avec le 100% de vote en faveur de la liste Les Républicains conduite par la maire sortante Séverine Saint-Pé.

Mékila Adéline, c’est une forte tête, une grande gueule. C’est une animatrice. Une femme de peuple. Très fidèle en amitié, elle a toujours su développer autour d’elle une certaine communauté d’amis. Très sociale, elle s’adapte partout où elle est amenée à vivre. C’est le genre de personne qui ne laisse personne indifférent.

Dans le milieu des années 1990, la jeune élève du Collège Notre Dame du Tchad (creuset de l’intelligentsia féminine du Logone Occidental) à Moundou, était déjà une star. Son allure de garçon manqué, son verbe haut, son aisance communicationnelle, font d’elle la personne avec qui il faut être. Dans le milieu typiquement féminin au collège des filles, c’est elle qui joue le garçon dans les sketchs. Sa maîtrise des textes lui font camper ses personnages à merveilles. Paradoxalement, ce côté masculin fait tout son charme et les jeunes moundoulais se bousculaient aux Centre Dombao pour voir les représentations de la troupe de Mékila Adéline. Elle est aussi une des stars de la chorale de l’église Assemblée Chrétienne de Domboa qu’elle fréquente à Moundou.

Après son BEPC en 1996, la jeune fille de Papa Robert prend la route de N’Djaména pour rejoindre le Lycée Sacré-Cœur qui est comme le CNDT un établissement d’enseignement général fondé par l’église catholique. Cette jeune protestante est un pur produit de la formation catholique.

Après l’obtention de son baccalauréat série A en 1999, elle s’inscrit à la Chambre de Commerce de N’Djaména pour obtenir un BTS en Secrétariat. Ce petit diplôme n’est pas pour plaire à cette fille à l’esprit combatif.

C’est ainsi qu’elle parvint à convaincre son père à l’envoyer dès 2001 à Bamako pour faire le droit où elle décroche une licence en 2005. Profitant de ce séjour, elle s’intègre parfaitement à la communauté locale en maîtrisant le Bambara qui est la langue la plus parlée au Mali.

Pendant qu’elle préparait sa licence la jeune dame se lance dans le commerce. Aidée par un cousin, elle propose aux grandes dames politique du pays des jolis boubou en bazin dont elles sont friandes. Elle achète les bazins qu’elle fait coudre à la façon malienne et les propose aux ministres, députés et autres administratrices qui sont emballées. C’est grâce aux bénéfices tirés de cette activité qu’elle parvient à s’envoler pour la France (après une première année de master à Bamako) et intégrer l’université de Poitiers où elle décroche un Master 2 en Droit Pénal option Science Criminelle. Durant sa période universitaire, elle décroche en emploi au Futuroscope de Poitiers où elle officie comme hôtesse d’accueil. C’est ce qui lui permet de joindre les deux bouts. Depuis 2010, elle est doctorante et prépares une thèse sur le thème de « la criminalité en bande organisée » qu’elle assure avoir du mal à terminer partager qu’elle est entre ces deux filles, son travail de rédactrice juridique à la Mutuelle Sociale Agricole et ses nombreux engagements bénévoles au service des femmes victimes de violence.

Cette jeune dame qui aura 41 ans le 29 juin prochain est une meneuse née. Jaugée sur son vélo cadre dame de cyclo Tchad, elle est l’une des têtes de proue des élèves du CNDT qui traversent la ville de Moundou allant de la Cathédrale aux quartiers Dombao, Djérabé, Doyon…

Mais cette nature est paradoxalement diluée dans une éducation stricte à la protestante imposée par un père très austère. A la maison, Papa Robert Memouida (technicien à l’huilerie de Moundou) impose la règle à suivre qui est mise en pratique par la maman Kaltouma Ndadjine. Cette mère poule, née à Abéché, issue d’un mariage entre un Ngambaye et une Ouaddaienne, malgré sa douceur ne peut rien faire pour contrarier les règles imposées par son mari. Ces deux tempéraments réunis ont pu permettre aux enfants de bénéficier d’une éducation à l’africaine qui leur a permis de réussir dans leurs vies sociales, académiques et bien sûr professionnelles. Mékila en grande sœur avisée, essaye de transmettre cet héritage à ces petites sœurs et frères.

A travers son élection, Mékila Adéline est désormais le visage du jumelage entre Moundou et Poitiers. Sa ville de Naissance de cœur et sa ville d’adoption se reflètent à travers elle pour un lendemain meilleur.