Le 7 avril dernier, le gouvernement tchadien a expulsé l’ambassadeur de l’Allemagne, Dr Jan Christian Gordon Kricke qu’il a accusé d'”attitude discourtoise” et de non respect des “usages diplomatiques”. Quatre jours plus tard, par mesure de réciprocité, l’Allemagne a donné 48 heures à l’ambassadrice tchadienne, Mariam Ali Moussa, pour quitter Berlin. Interrogé par Tchadinfos, l’analyste politique et président de l’Union des démocrates pour le développement et le progrès (UDP), Max Kemkoye déplore la décision des autorités tchadiennes à l’origine de cette crise diplomatique et redoute des conséquences fâcheuses.
De prime abord, Max Kemkoye note que “cette extrémité diplomatique grave” est survenue du fait que les dirigeants actuels sont des gens qui “n’ont aucun sens de l’État et qui prennent un État comme un jouet”.
En effet, indique-t-il, déclarer un ambassadeur persona non grata fait partie des décisions “extrêmement graves” qui ne peuvent être motivées que notamment par des accusations d’espionnage ou d’ingérence dans les affaires internes. Ce qui n’est pas le cas de Jan Christian Gordon Kricke, estime le leader de l’UDP qui n’est donc pas convaincu par les arguments avancés par le gouvernement pour l’expulser.
En faisant noter que la position de l’ambassadeur Gordon n’est pas individuelle mais la position de Berlin, Max Kemkoye souligne qu’elle est liée au respect des valeurs de démocratie, des libertés publiques et politiques, des droits de l’homme. “En quoi rappeler à un État accréditant le respect des principes de démocratie, des libertés politiques et publiques et des droits de l’homme peut-il être constitutif d’un acte grave qui pourrait fonder le départ d’un ambassadeur ? Ce sont des valeurs universelles qui n’ont pas de frontières”, déclare le juriste et homme politique. Et d’en déduire que “ce qui s’est passé montre clairement la volonté de la junte de confisquer le pouvoir, avec ou sans élections. Parce qu’il fallait renvoyer Gordon qui tenait la ligne dure du groupe des amis du Tchad qui rappelle constamment le respect des libertés politiques et publiques”.
En déplorant le fait que l’ambassadeur allemand ait été expulsé sans respect des procédures (car il n’a pas été convoqué pour s’expliquer ou encore le ministère des Affaires étrangères allemande n’a pas été préalablement saisi), Max Kemkoye redoute des conséquences politiques et économiques fâcheuses. Notamment en ce qui concerne le financement des élections ou encore l’appui budgétaire à l’État tchadien pour faire face à ses charges régaliennes, car, rappelle-t-il, l’Allemagne est un grand contributeur et un poids lourd de l’Union européenne.
Même s’il juge que le mal est fait, l’analyste espère que les pays amis du Tchad mèneront la médiation pour le réchauffement des relations entre le Tchad et l’Allemagne. Parce que “Nous pensons que les relations diplomatiques sont établies entre les peuples et non entre des dirigeants”.