Ce 20 octobre marque le premier anniversaire de la manifestation violemment réprimée du 20 octobre 2022.

Jeudi 20 octobre 2022. N’Djamena, la capitale tchadienne. Dès l’aurore, c’est le branle-bas dans plusieurs quartiers des 6ème, 7ème et 9ème arrondissements notamment. Des jeunes qui brûlent des pneus, d’autres qui se rassemblent pour marcher.

En effet, le dialogue national inclusif et souverain (DNIS) tenu du 20 août au 8 octobre 2022 a décidé de prolonger la transition, déclenchée le 20 avril 2021 suite à la mort au front du président Idriss Déby Itno, de deux ans et a investi Mahamat Idriss Déby Itno pour la diriger. Mais cette décision est boudée par une partie de l’opinion, politique et société civile, qui revendiquait que le pouvoir soit remis aux civils au bout de 18 mois, comme l’avait promis les militaires qui ont formé le Conseil militaire de transition (CMT).

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Les contestataires prévoient donc une marche le 20 octobre (date marquant la fin des 18 mois de transition). Ce camp est composé de quelques partis politiques dont Les Transformateurs et de la société civile comme la coordination des actions citoyennes Wakit Tamma.

Ce jeudi 20 octobre 2022, la ville de N’Djamena était donc mouvementée. Certains manifestants ont vandalisé des sièges de partis comme le RNDT-Le Réveil et l’UNDR dont le chef a pris la tête du gouvernement post-DNIS. D’autres ont saccagé des stations, des véhicules, aussi bien de l’administration publique que des individus. Dans le 9ème arrondissement, ils ont même investi le commissariat, poussant des policiers à la fuite.

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Comme à N’Djamena, il y a eu également des manifestations à Moundou, Doba, Koumra, Sarh.

La Police était dépassée face à la détermination des manifestants. C’est ainsi que les forces de troisième degré sont intervenues, de même que des individus en civil dans des voitures à vitres fumées et non immatriculées. La répression fut brutale.

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Dans la soirée de cette journée chaotique, le Premier ministre fait une sortie médiatique lors de laquelle il annonce un premier bilan de 50 morts dont des agents des forces de l’ordre. Des mesures sont annoncées comme un couvre-feu dans les villes concernées par les manifestations et la suspension pour trois mois des partis ayant appelé à la manifestation. Les organisateurs, quant à eux, évoquent au moins 300 morts, des milliers de blessés et personnes arrêtées ou enlevées. La Commission nationale des droits de l’homme établira un bilan de 128 morts, tandis que le ministre de la Communication va revoir le bilan officiel à 73 morts.

Des centaines de personnes arrêtées ont été déposées à la maison d’arrêt de Klessoum pour certaines et déportées à la prison de haute sécurité de Koro-Toro pour d’autres. Au terme d’un procès organisé en décembre 2022 dans ce pénitencier situé en plein désert, une partie est libérée, une autre condamnée avec sursis et une autre condamnée à de la prison ferme. En mars et avril 2023, le président a pris des décrets pour gracier tous les condamnés dans le cadre des manifestations du 20 octobre 2022.

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Le président des Transformateurs et quelques-uns de ses collaborateurs, en exil depuis ces événements du 20 octobre 2022, ont voulu rentrer le 18 octobre 2023 pour commémorer le premier anniversaire du « Jeudi noir ». Mais faute d’avoir trouvé un accord avec le gouvernement, qui a d’ailleurs émis un mandat d’arrêt international contre lui, Succès Masra a reporté ce retour pour début novembre.