Le 15 janvier 1993, les Tchadiens se réunissaient pour la Conférence nationale souveraine (CNS), un événement historique au cours duquel la nation s’est confrontée à son passé et a envisagé son avenir. Pendant trois mois de débats houleux, cette rencontre a jeté les bases de l’actuelle République tchadienne.

La CNS a permis la rédaction d’une nouvelle Constitution, la mise en place d’un gouvernement de transition et l’élection d’un Premier ministre. La présidence de la transition fut confiée au colonel Idriss Déby, qui a dirigé le pays jusqu’aux élections de 1996, où il a été élu président.

Cette date, bien qu’elle ne soit pas marquée par des manifestations publiques, reste un jalon important dans l’histoire démocratique du Tchad. La CNS a permis des avancées significatives, notamment l’organisation de 6 élections présidentielles et plusieurs élections législatives, témoignant de la pluralité politique instaurée depuis. Toutefois, des retards dans le respect des calendriers électoraux, notamment pour les législatives, sont régulièrement déplorés. En 2012, le pays a organisé ses premières élections locales, concrétisant le choix de la décentralisation acté lors de la CNS.

La CNS a également impulsé une explosion des partis politiques et la création d’associations de défense des droits de l’homme, encadrées par la nouvelle Constitution. Le droit d’association, consacré par la loi fondamentale, a ouvert des espaces d’expression pour les citoyens. Dans le domaine médiatique, cette période a vu la naissance de nombreux journaux, radios et télévisions privées.

Depuis la mort du maréchal Idriss Déby Itno en avril 2021, le Tchad a entamé une transition politique sous la direction d’un Conseil militaire dirigé par son fils, Mahamat Idriss Déby Itno. Cette période a été marquée par la tenue d’un Dialogue national inclusif et souverain (DNIS) en 2022, présenté comme une tentative de réconciliation nationale et un écho tardif aux ambitions de la Conférence nationale souveraine (CNS) de 1993. Si le DNIS a permis d’entériner des réformes institutionnelles et de définir une nouvelle feuille de route pour la transition, des tensions persistantes entre le pouvoir et une partie de l’opposition et de la société civile ont rappelé les limites du consensus.

Après plusieurs reports, les élections, présidentielle et couplées (législatives, communales et provinciales) ont enfin eu lieu, marquant une étape cruciale pour le retour à l’ordre constitutionnel. Ces élections, bien que saluées pour leur organisation relativement apaisée, ont vu la domination du MPS, parti au pouvoir, et de ses alliés, renforçant la continuité politique amorcée depuis la CNS. Cependant, les critiques sur la participation et les défis liés à la décentralisation montrent que, malgré le chemin parcouru, l’héritage de la CNS reste inachevé, nécessitant un nouvel élan pour répondre aux aspirations démocratiques des Tchadiens.