N’DJAMENA, 21 février (Xinhua) — Le gouvernement tchadien dé ploie, avec l’appui de ses partenaires, des mesures d’urgence et des actions d’envergure pour protéger et conserver son patrimoine faunique mis en mal par des braconniers, depuis plusieurs années.

Pays sahélien, le Tchad subit, depuis plusieurs décennies, les méfaits de la sécheresse et de la désertification, auxquels viennent s’ajouter les conséquences négatives du braconnage sur la faune et la flore. Les effets conjugués de ces phénomènes ré duisent considérablement ses ressources naturelles et désé quilibrent son écosystème.

Véritables prédateurs de l’environnement, les braconniers bien équipés et puissamment armés, venant parfois de l’étranger, agissent par petits groupes, utilisent quelquefois les feux de brousse et n’hésitent pas à empoisonner les animaux et les points d’eaux.

Plusieurs espèces fauniques ont ainsi disparu (tels le rhinocé ros ou l’oryx) ou sont en voie de l’être. Entre 2006-2008, période d’instabilité qu’a connue le Tchad, le braconnage battait son plein, particulièrement à l’Est du pays.

Il y a 50 ans, la population des éléphants au Tchad était estim ée à 50.000 individus; de nos jours on n’en dénombre que 1.500 dont 500 au parc national de Zakouma, la première aire protégée du pays, au sud-ouest frontalier avec la Centrafrique.

“Il est aujourd’hui établi que si la tendance actuelle se maintient, l’éléphant d’Afrique sera exterminé d’ici à la prochaine décennie. De même au Tchad, l’emblématique pachyderme disparaitra-t-il d’ici à l’an 2020, après l’oryx et le rhinocéros, du fait du braconnage”, a prévenu le président Déby Itno.

Ce phénomène qui sape les bases de l’économie tchadienne qui sont l’agriculture et l’élevage, expose les populations et plus particulièrement celles rurales, à l’insécurité alimentaire et à l’aggravation de la pauvreté.

Selon Mme Hélène Cavé, ambassadeur et chef de la Délégation de l’Union européenne au Tchad, le braconnage et le commerce illicite de ses produits, non seulement détruisent la biodiversité et privent les populations de leurs moyens d’existence, minent aussi l’Etat de droit, encouragent la corruption, et alimentent, dans certains cas, le financement des groupes armés engagés dans des conflits internes et transfrontaliers.

“Ils représentent donc une menace à la paix et à la sécurité de la région”, précise la diplomate européenne.Depuis près d’un quart de siècle, l’Union européenne accompagne les efforts de conservation du parc de Zakouma, à hauteur de 30 millions d’euros à ce jour. Un programme en cours (2011-2016) vise à consolider les acquis et à asseoir la viabilité du parc en termes financiers et socioéconomiques.

Le Tchad a engagé, ces dernières années, un certain nombre d’actions, pour répondre au grand massacre de ses éléphants. Le gouvernement a ainsi constitué une unité multi-force, spécialement dédiée à la lutte anti-braconnage. Cette force est aujourd’hui é quipée des moyens conséquents et est en cours de professionnalisation. En 2013, 500 jeunes ont été recrutés et ont achevé leur formation militaire en décembre dernier et sont en train d’être déployés sur le terrain.

Il est prévu pour cette année 2014, un recrutement de 500 nouveaux agents. Ce qui portera le nombre total des jeunes engagés et formés pour la lutte anti-braconnage à un effectif de 1.000 hommes. “Cette force spéciale sera dotée de tous les moyens, y compris les outils les plus sophistiqués”, a promis Issa Halikimi, ministre tchadien de l’Environnement et des Ressources halieutiques.

Un Centre de connaissance, de suivi et de contrôle électronique de toutes les populations d’éléphants du Tchad, a été également cr éé et est aujourd’hui fonctionnel. Il utilise les nouvelles technologies de l’information et de la communication, notamment des satellites.

“Notre objectif est de pouvoir mettre définitivement fin au phé nomène de braconnage, notamment celui des éléphants, sur l’ensemble du territoire national et le long des zones frontaliè res”, a réaffirmé M. Issa Halikimi.Dans ce cadre, le Tchad a signé, en novembre 2013, un protocole d’accord tripartite de lutte anti- braconnage avec deux pays voisins: le Cameroun et la Centrafrique.

Malheureusement la dégradation de la situation sécuritaire et politique en Centrafrique risque d’aggraver le phénomène de braconnage du fait de la dispersion dans la nature des éléments armés incontrôlés.

Avec l’ensemble des pays de l’Afrique centrale et dans le cadre de la CEEAC (Communauté Economique des Etats de l’Afrique Centrale) , le Tchad s’est engagé dans un plan d’extrême urgence, de lutte contre le braconnage signé en mars 2013 à Yaoundé, au Cameroun.

“Ce plan d’urgence est traduit en un plan national de lutte contre le braconnage et tous les voies et moyens seront étudiés, notamment avec nos partenaires techniques et financiers pour une mise en oeuvre effectif dudit plan”, a indiqué le président Déby.

“La lutte anti-braconnage porte ses fruits, comme le montrent les récentes saisies d’ivoire”, a déclaré Mme Hélène Cavé. Vendredi, en marge des festivités marquant le cinquantenaire du parc de Zakouma, le président Déby a détruit plus de 500 défenses d’éléphants saisis sur des braconniers.

“De plus en plus des paysans sont enclins à coopérer avec les braconniers plutôt que de les dénoncer”, a déploré le président Dé by. Il a exhorté les populations riveraines du parc de Zakouma à veiller à sa protection en collaborant étroitement avec l’administration du parc et en dénonçant les braconniers et autres prédateurs.

Grâce à tous ces efforts, le Tchad tient à maintenir et conserver son parc national de Zakouma, objet de fierté nationale, en instance d’inscription sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO.