Dans la nuit du jeudi 26 au vendredi 27 janvier 2023, un terrible accident de circulation a eu lieu entre Oum-Hadjer et Abéché. Un bus a heurté violemment un camion, en panne, et garé sur la chaussée. Le bilan est lourd : 20 morts et 7 blessés. Sur le même axe, il y a environ un an, c’était une trentaine de Tchadiens qui laissaient leur vie, toujours de suite d’un accident, toujours la nuit.

Qu’est-ce qui peut expliquer ces récurrents accidents mortels ? Comment justifier le manque de solutions ? Les responsabilités sont à tous les niveaux.

Les usagers ont une « petite » part en ce sens que certains ne vont même pas dans les agences pour se faire enregistrer normalement, préférant attendre le bus sur le trajet. D’autres aiment voyager la nuit, pour gagner en temps arguent-ils.

Les chauffeurs qui sont parfois mal formés ont un grand rôle dans ces sinistres. Pour maximiser le gain (ils sont payés par trajet effectué), certains ne se reposent pratiquement pas. Un chauffeur peut quitter Abéché le matin, arriver à N’Djamena en soirée et immédiatement refaire le même trajet la nuit. Ils font donc souvent dans l’excès de vitesse. Beaucoup somnolent au volant. Pire, ils se dopent pour essayer de résister à la fatigue et au sommeil.

De leur côté, les propriétaires des agences et syndicats des transporteurs ne font pas grand-chose pour contrôler leurs chauffeurs. En outre, il n’y a aucune rigueur dans l’enregistrement des passagers. En guise d’exemple, pour l’accident d’il y a quelques jours, deux corps sont restés longtemps avant d’être enterrés parce qu’il n’y avait aucune pièce pouvant permettre de les identifier. Constitués en un puissant lobby, ils exercent constamment des pressions sur le gouvernement quand leurs intérêts sont en jeu. On se rappelle qu’après l’accident de l’année dernière, le ministère des Transports avait pris des mesures dont l’interdiction de la circulation entre 21 heures et 5 heures du matin. Ces transporteurs ont menacé de cesser toute activité, contraignant le ministère à lever cette mesure quelques semaines après.  

Le ministère des Transports et de la Sécurité, et le gouvernement d’une manière générale, a aussi une grande part de responsabilité. Cela commence dès la construction des routes qui sont tellement étroites. Faute de trottoir, le camion en panne que le bus était venu heurter était garé sur la chaussée. Après chaque accident, dans l’émotion, des mesures sont annoncées mais elles ne durent souvent que le temps d’un feu de paille. Le temps que l’émotion retombe et il faut attendre le prochain accident pour annoncer d’autres « mesurettes ».

Entretemps, les Tchadiens continuent à mourir par milliers chaque année sur nos routes. Dans un pays qui se respecte, deux accidents aussi meurtriers en l’espace d’un an auraient amené par exemple le ministre en charge des Transports à démissionner. Que nenni sous nos tropiques. Le gouvernement dira certainement qu’il n’y a « zéro accident » nulle part dans le monde. Certes! Mais si des mesures drastiques sont prises, beaucoup d’accidents seraient évités et les vies des Tchadiens épargnées.