YAOUNDE, 10 juin (Xinhua) — Avec plus d’un milliard d’habitants dont la majorité est concentrée au Sud du Sahara, l’Afrique représente environ 20% de la population mondiale et 15% de la superficie mondiale, mais le manque de la capacité de promouvoir les méthodes de gouvernance modernes empêche la transformation des atouts en vue d’un véritable décollage économique.

D’une croissance générale projetée à 5,4% en 2013 par le Fonds monétaire international (FMI), soit l’une des plus vigoureuses de l’économie mondiale, l’Afrique ne réussit guère à améliorer son classement au commerce mondial où elle stagnait à 3,2% dans le volume des exportations en 2010, d’après les estimations de la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique (CEA).

Même au plan interne, les performances ne sont pas non plus époustouflantes : contre 72% pour l’Europe et 52% pour l’Asie, le commerce intra-africain, dominé par les produits industriels de base, est estimé entre 10 et 12% du commerce total.

A cause d’une structurelle commerciale archaïque caractérisée par l’importation de capitaux et d’intrants industriels et des exportations essentiellement constituées de produits de base à faible valeur ajoutée, le continent noir ne profite pas des opportunités d’échanges avec les marchés à forte demande de la Chine et d’autres économies émergentes, déplore la CEA.

C’est un continent pourtant doté d’atouts extraordinaires : réservoir d’environ 12% des réserves mondiales de pétrole, 42% des réserves d’or, entre 80 et 90% des réserves de métaux du groupe du chrome et du platine, puis 60% des terres arables de la planète, sans compter de vastes ressources en bois, il attire la convoitise des puissances mondiales.

Dans le même temps malheureusement, la misère et la pauvreté restent rampantes sur ce continent. Selon les données de la Banque mondiale, 47,5% de la population d’Afrique subsaharienne vit avec moins de 1,25 dollar par jour, le seuil international de l’extrême pauvreté, alors que 68,8% vivent avec moins de 2 dollars, un autre critère international de pauvreté.

A en croire les mêmes études, environ 239 millions de personnes dans cette région souffrent de malnutrition. L’on y dénombrait également 30 des 31 pays du monde présentant un taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans égal ou supérieur à 100 décès pour 1.000 naissances vivantes en 2009. L’espérance de vie moyenne y est de 52,5 ans, contre 69,2 ans dans le monde.

De même, à peine 66% de la population d’Afrique subsaharienne a accès à l’eau potable, 40% seulement dispose d’infrastructures d’assainissement adaptées et 30% seulement a accès à l’électricité. En dépit du manque de connectivité, les taux de pénétration des téléphones portables ont cependant explosé de moins de 2% en 2000 à plus de 60% en 2013, contre un taux de 13,5% des Africains bénéficiant d’une connectivité Internet classique en 2011.

L’une des raisons de la faible représentativité de cette région dans l’économie mondiale réside dans l’absence de mesures d’incitation à l’investissement, c’est-à-dire un environnement favorable au développement des entreprises. Dans son classement des 50 premiers pays sur la facilité à faire des affaires, la Banque mondiale retient seulement l’Afrique du Sud et Maurice parmi les 48 pays d’Afrique subsaharienne.

Vice-président de l’Université de Nancy 2 en France, le Pr. Chicot Eboué, d’origine africaine, avait établi lors de la conférence internationale “Africa 21” lors du cinquantenaire de l’indépendance du Cameroun en mai 2010 à Yaoundé, une liste de “sept conditions cardinales du financement du développement en Afrique”.

Après avoir constaté des taux d’épargne et d’investissement respectifs de 18,73% et 22,47% du PIB au cours de la période 1970-2008, l’universitaire suggérait un relèvement à 30% pour les deux taux, “pour espérer l’augmentation durable du pouvoir d’achat et du revenu par tête”.

Il fixait le cap d’ une croissance régulière de 8 à 10% par an pendant 20 ans, avec un taux de croissance optimal de l’investissement de 10%, et préconisait un accroissement de la part relative des investissements directs étrangers (IDE) de l’Afrique noire qui a régulièrement baissé depuis 1970, pour passer de 9,2% à 5% du total des IDE entrants dans les pays en développement.

Cette hausse, expliquait l’économiste, aurait représenté un gain de 20 milliards de dollars au minimum de 1999 à 2003. Outre la réduction du risque perçu pour attirer les capitaux privés, ses recommandations encourageaient aussi la consolidation financière par la construction des groupes bancaires internationaux pour financer des grands projets en partenariat avec des banques étrangères.

C’est un processus qui doit impliquer aussi des banques de microfinance pour prendre en charge les activités de survie et le financement des très petites entreprises (TPE) et des petites et moyennes entreprises (PME), y compris le passage des bourses nationales aux bourses régionales, avec l’implication des banques dans la souscription des nouvelles émissions (10 à 20%) et l’animation des marchés.

“A cause du déficit structurel de financement de l’économie, notait Chicot Eboué, la part du crédit représente à peine 10% des actifs bancaires, alors que les réserves représentent près de 80% en longue période”.

La construction des économies régionales et des unions monétaires régionales et au bout du compte la création d’une monnaie unique qui est un objectif recherché par l’Union africaine (UA) sont présentées comme l’aboutissement de cette démarche visant la réalisation du potentiel économique et l’édification d’un modèle de développement plus convaincant en Afrique.