Dr Sadié Ismael Guiré est la première chirurgienne formée au Tchad. A l’occasion de la Semaine nationale de la femme tchadienne (Senafet), elle nous raconte sa motivation, son parcours et ses difficultés.

 Alors que la médecine compte de plus en plus de femmes, la chirurgie résiste encore largement à l’ampleur de ce mouvement et demeure incontestablement un bastion “masculin”. Par abus de langage, on dit souvent d’une profession qu’elle est “masculine” (ou “féminine”) pour dire qu’elle est socialement construite comme telle.

« Tout a commencé en classe de 3ème lorsque ma petite sœur était malade et elle faisait des crises. Tout le temps on l’amenait à l’hôpital lorsqu’elle faisait ses crises. J’avais pitié d’elle, donc je me suis dit de faire la médecine pour sauver ma petite sœur avec ce slogan : médecine ou rien », raconte Dr Sadié Ismael Guiré, aujourd’hui chirurgienne à l’hôpital de la Renaissance.

Après avoir obtenu son bac en 2001, Dr Sadié prend la direction de Dakar au Sénégal. « Je voulais commencer à la faculté de médecine ici au pays mais en 2001, à l’université de N’Djamena, c’était l’année blanche. Donc je suis partie au Sénégal. De 2002 jusqu’en 2009, j’ai obtenu mon doctorat », rapporte-t-elle.

Début de la carrière

Une fois rentrée au pays, Dr Sadié a travaillé aux urgences de l’hôpital général de référence nationale (HGRN) puis à l’hôpital de la Mère et de l’Enfant. Selon elle, au niveau des urgences, elle a constaté qu’il y avait beaucoup de traumatisme, que ce soit les accidents de la voie publique ou les bagarres. Et malheureusement, relève-t-elle, beaucoup de ces victimes mouraient parce qu’il n’y a pas assez de chirurgiens.

« C’est pourquoi j’ai opté pour la spécialisation en chirurgie pour aider la population. Entretemps, il n’y avait que Pr Choua qui travaillait sans relâche pour secourir les malades. C’est la personne qui m’a inspirée. Aujourd’hui, je suis devenue chirurgienne grâce à lui » explique-t-elle.

En 2016, Dr Sadié a commencé sa spécialité en chirurgie générale à la faculté des sciences de santé humaine de N’Djamena. « Une spécialité qui a duré presque 6 ans et demi. Depuis 2022, j’ai fini ma spécialité. Il y a eu la 1er promotion avec 5 étudiants. Au Tchad, en chirurgie je suis la seule femme formée ici mais il y en a d’autres formées à l’étranger », indique-t-elle.  

Contraintes : travail et foyer

« On ne sait pas à quelle heure on commence et à quelle heure on peut finir », dit-elle. Elle souligne que : « à n’importe quelle heure, on peut t’appeler pour intervenir. Par exemple à la fin de l’heure, tu veux rentrer mais une urgence arrive. Au moment que tu as fini avec l’urgence, une autre arrive, ainsi de suite. C’est ça la chirurgie ».

Mariée, Dr Sadié a son foyer à gérer à côté de son travail. « Si la maison n’est pas préparée, les enfants attendent pour leur devoir, et aussi souvent les aides-ménagères à la maison s’absentent, etc., ce sont les contraintes que je rencontre souvent. Heureusement pour moi j’ai un mari qui me comprend bien », se réjouit-elle.

Pour des femmes qui rêvent devenir chirurgiennes, Dr Sadié affirme que ce métier est exigeant et demande de la concentration. « Il faut d’abord être patiente, courageuse, dynamique car la chirurgie a beaucoup d’exigence. Sans oublier un point important, le choix du mari qu’il faut. Sinon lorsqu’on vous appelle la nuit tard pour les opérations urgentes, le mari se fâche, etc. ».