Pour avoir réalisé des reportages sur les tensions persistantes entre éleveurs et cultivateurs au sud du Tchad, deux journalistes ont été arrêtés et placés en garde à vue entre le 8 et le 12 août 2022, avant d’être finalement libérés. Reporters sans frontières (RSF) appelle les autorités à protéger le libre exercice du journalisme.
Ces conflits qui ont fait environ 300 morts depuis 2020, sont devenus particulièrement difficiles à couvrir pour les journalistes, observe RSF. Il cite à titre illustratif le cas du journaliste à la radio La Voix du paysan à Doba, au sud du Tchad, Janvier Mouatangar, qui a été arrêté le 8 août par des gendarmes après la diffusion d’un reportage sur la destruction de 24 champs par des bœufs appartenant à des éleveurs. Il a été libéré le lendemain.
Le rédacteur en chef de Radio Gaya Tcholwa, Anner Sabartang, a été également arrêté par la gendarmerie le 10 août sur ordre du préfet après avoir diffusé, dans un groupe WhatsApp, un reportage sur le mécontentement des populations face à la nomination par le préfet d’un chef traditionnel nomade arabe. Menotté et soumis à un long interrogatoire, le journaliste a été libéré après une garde à vue de deux jours et une inspection méticuleuse de son téléphone, toujours confisqué.
Témoins de ces événements, les journalistes, travaillant pour plusieurs médias dans ces localités situées à des centaines de kilomètres de la capitale N’Djamena, redoutent de plus en plus de les couvrir à cause des représailles, tant de la part des protagonistes eux-mêmes que de l’administration locale, regrette RSF. “ Les journalistes doivent pouvoir exercer leur métier sans être inquiétés au nom du droit du public à l’information’’, déclare Sadibou Marong, directeur du bureau Afrique de l’Ouest de RSF. La couverture d’affrontements ne peut pas servir de prétexte à des arrestations arbitraires et à des attaques contre les journalistes, interpelle le Réseau.
Alors que le Tchad entame un dialogue national inclusif, RSF exige des autorités de réaffirmer l’importance pour le pays de disposer d’une presse libre et indépendante, dont les acteurs ne craignent ni pour leur sécurité ni pour leur liberté.
Le Tchad occupe la 104e place sur 180 au classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2022.