DOSSIER – Depuis sa prise du pouvoir le 20 avril 2021, à la suite du décès du président Deby, le Conseil militaire de transition (CMT) a pris des actes diversement appréciés par l’opinion.

La répression sanglante des manifestations de la plateforme Wakit Tamma le 27 avril, une semaine après la prise du pouvoir par le Conseil militaire de transition (CMT),  reste un souvenir douloureux de ce début de mandat de 18 mois, renouvelable une seule fois, selon la charte de transition. L’on dénombre une quinzaine de morts, surtout des jeunes, de nombreux blessés et arrestations.

9 mois plus tard, aucune enquête n’est ouverte pour situer les responsabilités. Les familles des victimes, contrôlées de près même les jours de recueillement par les forces de l’ordre, n’osent piper mot et revendiquer justice.

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Dans son discours à la nation, le même jour, le président du CMT, Idriss Deby Itno, n’a nullement évoqué ce drame. Même pas un mot de compassion aux proches des victimes. Surprenant ainsi plus d’un Tchadien. «  Une sortie manquée », lâche-t-on. « Le CMT se battra corps et âmes pour préserver et consolider tous les acquis de paix et sécurité qui sont les fondements de cette nation », déclarait Mahamat Idriss Deby.

Le mai 2021, le président de la transition nomme un de ses proches, le général Taher Erda à la tête de la direction générale de sécurité des institutions de l’État ( DGSSIE), un corps considéré par certains comme une « armée dans une armée ».

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Les nombreuses nominations de personnes représentant une minorité de Tchadiens, au sein de la DGSSIE, confortent cette position. Sur les réseaux sociaux, l’on crie au népotisme et au clientélisme. Abderaman Koulamallah, le porte-parole du gouvernement, a défendu l’acte du PCMT, avançant qu’il s’agit de « Tchadiens compétents ».

Avec l’appui de la France, le gouvernement de transition a annoncé début mai, sa victoire contre les rebelles du Front pour l’alternance et le changement au Tchad (FACT). Les hommes de Mahdi, affaiblis, se sont retirés vers les pays voisins, la Libye et le Soudan, notamment.

A coups de communiqués de presse, le FACT affirme garder son idéologie de départ et a fait un repli tactique.  Plus de 150 rebelles ont été présentés aux médias. Ils sont gardés à la prison de Klessoum. Leurs conditions de détention sont régulièrement dénoncées par des politiques et  acteurs de la société civile. L’on avait appris des tentatives d’évasion, dont les contours restent flous.

Le 10 mai, le président du CMT effectue son premier voyage à l’extérieur. Au Niger, il a échangé avec le président Bazoum sur la transition au Tchad et la lutte anti-terrorisme au Sahel.

Quelques semaines plus tard, le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine, considérant la « situation exceptionnelle » du pays, décide de ne pas le sanctionner. De son côté, l’Union européenne se borne à condamner la prise du pouvoir par les armes. Le 12 juin, la Banque africaine de développement ( BAD) a levé les mesures suspendant ses opérations au Tchad.

Au mois de juillet, un Comité d’organisation du dialogue national inclusif (CODNI) est mis en place. Il est dirigé par le ministre de la Réconciliation nationale, Acheikh Ibni Oumar. Il a pour vice-président, l’opposant Saleh Kebzabo. Ce comité s’est aussi ouvert à des opposants comme François Djekombé.

Mahamat Idriss Deby enchaine les voyages. Le Nigeria, l’Angola, la France, le Qatar, l’Egypte, etc. Des voyages dénoncés par ses détracteurs. Car, disent-ils, trop onéreux pour un président de transition.

 Le 5 octobre, les 93 membres du Conseil national de transition (CNT), le parlement provisoire, ont été installés. Le CNT est mis en place par décret du chef de la junte. La procédure est dénoncée par l’opposant historique, Ngarlejy Yorongar. Il ne comprend pas que le législatif puisse tirer sa légitimité de l’exécutif.   Depuis son installation, cet organe a voté notamment le projet de loi amnistiant plus de 300 politico-militaires dont Mahamat Nouri et Abakar Tollimi.

D’après le politologue, Dr Ngarlem Toldé Evariste, cette amnistie devrait intervenir après le dialogue prévu le 15 février. Bien qu’il suscite beaucoup d’espoir, le manque de consensus des acteurs politiques, politico-militaires et de la société civile sur les critères de participation et les préalables de uns et des autres, n’augure rien de transparent.

A mi-parcours, le CMT a posé des actes salués par l’opinion comme l’autorisation des manifestations, l’amnistie en faveur des politico-militaires, l’annonce de la souveraineté du dialogue, la paie à terme échu des salaires, la signature du pacte social, entre autres. Mais il lui est reproché notamment le clientélisme et le népotisme dans les nominations, la non révision de la charte de transition pour insérer l’inéligibilité des dirigeants de la transition aux prochaines élections, l’insécurité galopante, le flou autour du respect du délai de la transition…

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