La condamnation des leaders de Wakit Tamma à 12 mois de prison avec sursis est un « très mauvais signal » que le gouvernement envoie aux Tchadiens, estime le politologue, Dr Evariste Ngarlem Toldé. A l’approche du dialogue, il l’appelle à décrisper la situation.

 Le 14 mai, la plateforme  Wakit Tamma a organisé une marche pour dénoncer la politique française au Tchad. En marge de cette marche, des troubles ( notamment stations Total vandalisées) ont eu lieu sur d’autres itinéraires que celui retenu pour cette manifestation.

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Six leaders de Wakit Tamma ont été arrêtés et inculpés pour attroupement non-autorisé, incitation à un attroupement, incendie volontaire, destruction des biens et troubles à l’ordre public. A leur « audience foraine » tenue le 6 juin à Moussoro, province du Barh El Gazel, ils ont été condamnés à 12 mois de prison avec sursis, 50 mille F d’amende et 10 millions à titre de dommages et intérêts à la partie civile. Un verdict que regrette le politologue, Dr Evariste Ngarlem Toldé.

Quelle est votre analyse par rapport à la condamnation à un an de prison avec sursis des leaders de Wakit Tamma ?

Il y a eu beaucoup d’appels. Il y a eu beaucoup d’interventions. Il y a eu beaucoup de communiqués de presse qui appelaient à l’apaisement. Il y en a qui invitaient le président du Conseil militaire de transition (CMT) à revoir sa position par rapport à ces leaders de Wakit Tamma. Donc, on s’attendait au vu de ces appels venus de toutes parts que le procès ait au moins un aboutissement autre que celui que nous avions eu.

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D’abord, beaucoup de Tchadiens n’ont pas compris pourquoi le procès a eu lieu à Moussoro. Avec la grève des avocats, les accusés qui ont refusé de plaider, et tout cela a fait que beaucoup ont parlé de déni de justice.  Aujourd’hui, ils ont été condamnés avec sursis. Cela veut dire que pendant 12 mois, ils sont tenus de ne pas retomber dans les mêmes travers. Cela veut dire que Wakit Tamma va commencer à prendre du plomb dans l’aile.

A travers leur condamnation, ne cherche-t-on pas à museler des voix qui s’opposent à la gestion de la transition ?

Beaucoup ont appelé à suspendre les manifestations. On a vu la réunion de sécurité tenue par le chef de l’État qui était une invite à maltraiter d’éventuels manifestants qui passeraient outre les mesures prises. Ce sont des mesures d’intimidation. On a vu comment les forces de l’ordre ont quadrillé la ville de N’Djaména et même le pays. Pour autant, tel que je connais nos compatriotes, ce n’est pas ça qui va refroidir leurs ardeurs.

Quel impact peut avoir ces évènements sur le processus du dialogue ?

Ce qui pointe à l’horizon, c’est justement le dialogue. Et pour que le dialogue réussisse, il faut qu’il soit inclusif. L’un des partenaires incontournables pour ce dialogue est Wakit Tamma.

Apparemment, on cherche à le fragiliser, ce qui va le pousser à durcir sa position. Ce qui reviendra à dire que toute tentative de rapprochement avec le pouvoir sera très difficile. Si Wakit Tamma décide de ne pas y participer, ce sera une entorse au pied du comité d’organisation. Ce qui fait que cette condamnation est une très mauvaise nouvelle. C’est un très mauvais signal que le gouvernement envoie aux Tchadiens. On est revenu à restreindre les libertés collectives. Le Tchad a fait un recul. Ce n’est pas de bonne augure pour la démocratie tchadienne.

Dans ce cas, que doit faire le gouvernement pour rectifier le tir?

A l’approche du dialogue, il faut décrisper la situation. Il faut faire en sorte que les droits de manifester soient garantis. Il faut également que la liberté syndicale soit assurée.

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