INTERVIEW – L’univers cinématographique au Tchad se meut fortement ces dernières années. L’actualité tourne autour du film tchadien “Lingui” du réalisateur Mahamat Saleh Haroun, en lice au festival de Cannes. Mais le cinéma au Tchad connaît aussi des creux. L’acteur Youssouf Djaoro nous en dit plus dans cet entretien accordé à Tchadinfos.

Tchadinfos : Présentez-vous en quelques mots ?

Djaoro : Je m’appelle Youssouf Djaoro, artiste comédien, acteur de cinéma né le 28 mars 1963 à à Biltine dans le Wadi Fira. J’ai intégré le cinéma en 1999 avec mon tout premier film Dar el salam du réalisateur Issa Serge Coelho.



Quel regard portez-vous sur le cinéma tchadien ?

Le cinéma tchadien promet, il y a une jeunesse qui se lance sérieusement dans l’aventure malgré qu’elle n’a pas les B.A-BA du septième art.

Qu’est-ce qui freine selon vous le développement du cinéma au Tchad ?

Ce qui freine le développement du cinéma au Tchad est simplement le manque de moyens. Partout au monde, le cinéma a un fonds spécial, qui lui est dédié. Puisque ce métier nécessite beaucoup d’argent. Mais il est dommage que jusqu’à nos jours, le Tchad ne mette pas assez de moyens pour aider dans le secteur.
Les acteurs sont obligés de se sacrifier et au bout d’un moment, certains craquent.

Pensez-vous que le Tchad dispose des acteurs compétents capables de rivaliser avec ceux d’autres nations dans ce domaine ?


Bien-sûr, nous avons des acteurs capables. Il est juste question de les encadrer. Aujourd’hui, nous avons un film qui est carrément à la coupe du monde du cinéma : le festival de Cannes. Ces deux filles (actrices dans le film Lingui, Ndlr) n’ont jamais fait du cinéma mais, Mahamat Saleh Haroun, a travaillé avec elles et le résultat est visible. Le film est en compétition à l’un des plus grands évènements du septième art.

Pensez-vous qu’il est-il possible de vivre du cinéma au Tchad ?
Jusque-là, je vis de mon cinéma. Il m’a tout donné. J’ai beaucoup voyagé. Je l’avoue, je trouve quand même mon compte. Mais, il arrive que ce soit difficile, si tu ne tournes pas pendant une longue période.

D’une échelle de 1 à 10, quel numéro donnerez-vous au cinéma tchadien ? pourquoi ?


En qualité, je donne 10. Si un film d’un Tchadien est au festival de Cannes, c’est que qualitativement notre contenu est bon . Il y a un autre film pour le Fespaco au Burkina. Je conclus que ça va. Cependant, il y a un problème de quantité qui se pose. C’est chaque deux ans qu’on retrouve parfois des films qui sortent. C’est là où le rôle de l’Etat doit intervenir. Nous ne pouvons pas faire un film compétitif avec un léger budget.

Quel est le message que vous adressez à l’Etat tchadien ?


l’État doit mettre de l’argent dans le cinéma tchadien. La seule chose qui fait rayonner un pays c’est sa culture : le cinéma, le sport… Imaginez dans toute l’Afrique subsaharienne, c’est le Tchad seul qui est en compétition, et on ne l’a pas été juste une seule fois, c’est la troisième fois que nous allons au festival de Cannes.
Il faut que le gouvernement mobilise des fonds. Ces films se tournent au Tchad, c’est notre décor et nous sommes ces ambassadeurs qui doivent le dévoiler au monde pour des fins touristiques. Je pense que s’il y a un projet de film qui tient la route, le gouvernement doit accompagner cela.

Préparez-vous la relève ?

La relève avec les formations d’une semaine, de deux semaines que je donne assez souvent ne suffit pas. Il faut un temps. C’est toute une chaîne. A commencer par la formation en écriture de scénario, la réalisation, le jeu d’acteurs… Ensuite aller en résidence. Je pense qu’ainsi, il y aura un bon rendu à la restitution