Les heurts entre manifestants de Wakit Tama, Les Transformateurs et forces de l’ordre ont causé la mort de plusieurs personnes. Parmi elles, notre confrère Ordjé Narcisse. Récit d’une matinée funeste.

Ordjé Narcisse a été fauché par une balle ce jeudi 20 octobre dans son domicile au quartier Chagoua à N’Djamena.

Aux alentours de 8 heures, ce journaliste de 30 ans, alerté par les bruits des échauffourées entre manifestants et forces de l’ordre, est sorti de chez lui pour observer ce qui se passait.

Alors que la police avait investi certains quartiers du sud de la capitale pour circonscrire la marche prévue, mais interdite par les autorités de transition, et selon certaines informations, la tension était déjà vive et perceptible dès mercredi soir, avec usage de gaz lacrymogènes pour des raisons inconnues.

L’incompréhension se rajoute au choc

C’est dans ce contexte de guérilla urbaine qu’Ordjé Narcisse a été réveillé aux petites heures du matin. Lui et ses voisins se sont attroupés au bord de la route goudronnée qui vient du pont double voie. Comme beaucoup, ils voulaient voir de leurs propres yeux le déroulement de ces évènements que beaucoup craignaient depuis l’annonce d’un gouvernement parallèle par les Transformateurs.

Massés au bord de la route, ces jeunes gens ont été mis en garde par la bailleresse de la concession dans laquelle habitait Ordjé Narcisse. Cette dernière leur a demandé de rentrer, car « c’est dangereux de rester là ». La suite nous a été racontée par le cousin du défunt, Mobété Christian : « On est rentré dans la cour après la mise en garde de la bailleresse. C’est en regagnant sa chambre qu’il a été fauché par une balle venue d’on ne sait où. On ne sait même pas qui a tiré ». Toujours sous le choc, il poursuit : « On l’a amené à l’hôpital sœur afin de le transférer à la morgue. Mais impossible, son corps git toujours là-bas, car aucun ambulancier ne souhaite reprendre le travail à cause de la forte présence militaire. L’un d’entre eux explique qu’il ne veut pas repartir, car il a été tabassé quelques instants plus tôt. »

Un homme à l’humeur égale

“Narcisse OREDJE, aspirant journaliste, étudiant à l’ESJ Lille, je suis passionné de l’actualité politique et footballistique. Je souhaite faire mon stage de fin d’études chez vous.” C’est en ces termes qu’a commencé notre aventure avec cet homme consciencieux, sérieux et méticuleux dans l’accomplissement de son travail. Toujours d’humeur égale, Narcisse était le calme et la patience personnifiés, des qualités qui facilitaient notre collaboration et la rendait agréable.

Après avoir travaillé à Tchadinfos en tant que secrétaire de rédaction puis rédacteur entre 2019 et 2020, Oredjé Narcisse s’est lancé dans l’aventure entrepreneuriale en lançant sa boite de production, mais en continuant à prester en tant que pigiste chez nous et notamment pour radio CEFOD.

Nous déplorons aujourd’hui la perte d’un homme exceptionnel et d’un journaliste passionné.

La rédaction de Tchadinfos présente ses plus sincères condoléances à la famille du disparu, à ses amis et à ses collègues. Que la terre lui soit légère.

Narcisse, cet infatigable au sens élevé du devoir est parti trop tôt. Trop brusquement. Trop injustement.