La présomption d’innocence est un principe fondamental du droit pénal international épousé par le droit pénal tchadien. Ce principe stipule que tout mis en cause doit être considéré comme innocent tant que sa culpabilité n’a pas été légalement établie au cours d’un procès équitable, situe Me Angueïzou Néhémie, avocat stagiaire. Tout de même, il y a des situations qui limitent la jouissance de ce droit.
Ce principe est consacré par les textes de la République, notamment la Constitution et le Code pénal tchadien. “La Constitution de la 5e République du Tchad, dans son article 25, garantit à toute personne mise en cause d’une infraction le droit de bénéficier de la présomption d’innocence jusqu’à ce que sa culpabilité soit prouvée devant une juridiction compétente. Cela repose sur la conviction que personne ne doit être punie avant d’avoir été jugée conformément à la loi’’, note Me Angueïzou Néhémie. Le Code dispose que ‘’la charge de la preuve incombe à l’accusation et non à la défense’’.
L’avocat stagiaire développe que la présomption d’innocence a plusieurs implications à savoir le droit au silence de la personne arrêtée ; la neutralité de l’instruction et de l’enquête ; un traitement médiatique encadré. S’agissant du droit au silence, ‘’le mis en cause, prévenu ou inculpé n’est pas obligé de s’incriminer lui-même, car toute déclaration faite sous pression ou de manière involontaire ne peut être utilisée comme preuve contre lui’’, explique Me Néhémie.
Suivant la procédure, il ajoute que l’enquête menée par les autorités judiciaires doit être impartiale et respecter les droits du mis en cause, ‘’afin de s’assurer que la culpabilité est prouvée au-delà de tout doute raisonnable’’.
L’aspect lié à la présentation à visage découvert de présumés délinquants à la presse fait l’objet de débats ce dernier temps. La présomption d’innocence ‘’interdit également que le mis en cause, le prévenu ou l’inculpé soit jugé ou traité comme coupable par les médias avant son procès’’, clarifie-t-il.
Ainsi, ‘’dès lors que ces personnes coopèrent avec l’autorité judiciaire pour la manifestation de la vérité, elles ne doivent pas être exposées sur les médias avant que le juge ne se prononce sur leur culpabilité’’.
Il y a des exceptions. ‘’En principe, ce droit fondamental couvre son bénéficiaire jusqu’au prononcé de la décision du juge sur la culpabilité. Toutefois, lorsque vous êtes pris en flagrant délit de vol, d’assassinat, de meurtre, ou de toutes autres infractions avec des preuves irréfutables à l’appui, votre droit à la présomption d’innocence est fragilisé voire tombe. Selon la doctrine et la jurisprudence constante, la flagrance constitue une limite au principe de la présomption d’innocence’’, demontre-t-il. Il est rejoint par Gilles Djafna Tina, un juriste. ‘’Pas de présomption d’innocence pour le flagrant délit ‘’, tranche-t-il.
Il y a aussi des cas où ‘’lorsque des présumés coupables sont introuvables, le parquet d’instance pourrait autoriser la publication des images à la télé ou sur les réseaux sociaux à l’effet de les retrouver. Cette hypothèse est légale’’, relève Me Néhémie.
De même, pour des délinquants récidivistes et dangereux, le juge peut ordonner la publication du jugement qui les condamne sur toute l’étendue du territoire tchadien. ‘’C’est une mesure complémentaire à la peine’’, fait-il observer.
S’en tenant au principe, l’avocat stagiaire, évoque les impacts négatifs sur des personnes interpellées et qui sont surexposées dans les médias. ‘’Dans certains cas, le mis en cause, le prévenu ou l’inculpé peut être stigmatisé par la société avant même son jugement, ce qui peut nuire à son droit à un procès équitable. De même, des lenteurs dans les enquêtes ou des pressions politiques minent parfois les procédures judiciaires objectives et respectueuses du principe de la présomption d’innocence’’, soulève-t-il, proposant de ‘’renforcer les opérations de contrôle judiciaire sur l’applicabilité de ce principe afin de garantir que ce droit fondamental soit respecté dans toutes les étapes de la procédure pénale’’.