Par RFI
La semaine qui vient de s’écouler aura marqué un quasi-effondrement du Soudan du Sud. Une jeune nation désormais « au bord du précipice », pour reprendre les termes du président américain Barack Obama. Suite aux affrontements dimanche dernier entre les hommes de Reik Machar et ceux du président Salva Kiir, plusieurs foyers de tension ont éclaté dans le pays. Des heurts entre communautés et ethnies opposées qui font craindre une guerre civile.

Dans la capitale, Juba, malgré les propos rassurants tenus par les autorités, la situation est loin d’être apaisée. D’après des informations concordantes, relayées notamment par les organisations de défense des droits de l’homme, chaque soir des soldats d’ethnie dinka font du porte-à-porte pour interpeler et parfois exécuter des militaires d’ethnie nuer, l’ethnie de l’ex-vice président Reik Machar, actuellement en fuite.

Dinka et Nuer

Malgré les propos des différents responsables, qui affirment vouloir éviter les conflits ethniques, les exactions et les dérapages se multiplient dans plusieurs villes et localités du pays. C’est dans l’Etat de Jonglei que la situation est la plus tendue. Entre vingt et trente Dinkas, qui s’étaient réfugiés sur la base de l’ONU à Akobo, ont été tués par les jeunes Nuer qui avaient attaqué la base jeudi.

Dans les villes de Bor et Pibor, les combats qui ont opposé les soldats de Peter Gadet, rallié à Riek Machar aux garnisons restées loyalistes auraient fait plusieurs centaines de victimes, d’après une source contactée dans la région. A Bentiu, les affrontements au sein du complexe pétrolier ont opposé des employés dinkas et nuer, faisant plusieurs morts. Mais d’autres Etats sont touchés. Au Sud, à New-Site, près de la frontière kényane, des sources affirment que des militaires dinkas ont utilisé des chars contre des population civiles. Enfin, dans la ville de Torit, des militaires dinkas et d’autres d’ethnies lotuko se sont affrontés violemment.

■ REACTIONS : à l’ONU, la peur d’une nouvelle Yougoslavie

Avec notre correspondant à New York, Karim Lebhour

Le Conseil de sécurité s’est réuni en urgence sur la situation au Soudan du Sud après la mort de deux casques bleus. Au delà des condamnations de rigueur, le Conseil s’est inquiété du sort de dizaines de milliers de civils qui demandent la protection de l’ONU sans que celle-ci puisse être garantie.

La situation à laquelle l’ONU doit faire face au Soudan du Sud n’est pas sans rappeler les heures noires de l’ex-Yougoslavie lorsque les casques bleus étaient incapables de protéger les civils sous leur protection. Ce sont aujourd’hui 35 000 civils qui se sont réfugiés sur des bases de l’ONU au Soudan du Sud. Celle d’Akobo a été complètement évacuée après l’attaque qui a coûté la vie à deux casques bleus indiens et au moins 30 civils de l’ethnie dinka poursuivi par des troupes nuers jusqu’à l’intérieur de la base militaire. Le président du Conseil, le Français Gérard Araud avance que la centaine de casques bleus sur place a été complètement dépassée par 2 000 jeunes Nuers. Les casques bleus pouvaient-ils faire usage de leurs armes ? Le Conseil de sécurité a en tous cas demandé des éclaircissements sur les règles d’engagement.

D’autant que la situation menace de se reproduire dans d’autres villes du pays. Les diplomates disent ne disposer que d’informations parcellaires sur les événements de ces dernières 48 h. Le Conseil de sécurité mise avant tout sur la médiation africaine entre le président Salva Kiir et son vice-président Riek Machar. Un renforcement des 4 000 casques bleus présents sur place n’est pas envisagé pour l’instant.