L’Expert indépendant des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme au Mali, Alioune Tine, a avoué n’avoir aucune raison de croire à la présence au Mali du groupe privé de sécurité russe, Wagner, car n’y ayant pas vu ses éléments.

“Je me suis déplacé à Mopti, à Tombouctou et je n’ai vu ni trace de Wagner ni trace de Russes”, a notamment déclaré M. Tine, lors d’une visioconférence animée mardi pour présenter les conclusions de sa dernière visite au Mali (8-17 février).

Tirant les leçons de son constat, il a dit qu’il s’en tenait à la ”thèse de l’Etat malien” qui fait seulement état de la présence d’instructeurs militaires russes dans le pays.

Les rumeurs sur la présence des mercenaires de Wagner sont notamment à la base de la tension entre le Mali et la France, appuyée par ses alliés européens. Cette situation a abouti à l’annonce, jeudi dernier, du retrait du Mali des forces Barkhane et Takuba par le président Emmanuel Macron.

En matière de sécurité et de droits humains au Mali, l’expert indépendant a dit avoir constaté une certaine amélioration. ”Pour la première fois depuis le début de mes visites en 2018, j’ai noté une amélioration tangible de la situation sécuritaire, de la situation des personnes déplacées internes, de la situation des droits de l’homme ainsi que des dynamiques de paix endogène, notamment dans le centre du Mali”, a déclaré Alioune Tine.

Selon lui, le nombre de violations des droits de l’homme et d’atteintes à ces droits documentées au cours du dernier trimestre de 2021 par la Minusma a diminué de 27,10 %.

Le Cluster Protection fait le même constat en parlant d’une diminution de 29,75 % du nombre d’incidents de protection, entre novembre et décembre.

Pour lui, l’un des indicateurs de l’amélioration de la situation sécuritaire est la récente diminution du nombre de personnes déplacées et de conflits intercommunautaires, passée de 401.736 en septembre 2021 à 350.110 en décembre 2021.

”Toutefois, souligne Alioune Tine, les améliorations tangibles de la situation ne doivent pas occulter les défis sérieux en matière de sécurité et des droits humains auxquels le Mali et la communauté internationale doivent s’attaquer pour consolider les progrès réalisés sur le terrain”.

Les groupes extrémistes violents, notamment la Jama’at Nusrat al-Islam wal Muslimin (JNIM), l’Etat islamique dans le Grand Sahara (EIGS) et d’autres groupes similaires ainsi que les groupes armés communautaires dits d’autodéfense, continuent ”d’attaquer, de tuer et d’enlever des civils”, a déploré M. Tine tout en dénonçant ”une interprétation stricte de la charia” par les groupes extrémistes violents dans le nord du pays.

”La bombe sociale la plus grave se profile à l’horizon avec l’effondrement du système éducatif”, a-t-il averti, en citant l’ONU qui révèle que 320 écoles ont été fermées en 2021 affectant près de 100.000 élèves.

Globalement, le nombre d’écoles fermées en raison de l’insécurité a augmenté de manière significative, en passant de 1.344 en janvier 2021 avec 403.000 élèves affectés à 1.664 écoles en décembre 2021 avec 499.200 élèves affectés.

Au cours de sa visite, M. Tine a rencontré les autorités maliennes, la société civile et les associations de victimes, les organisations non gouvernementales, les diplomates et le système des Nations unies au Mali.

Le Sénégalais Alioune Tine a pris ses fonctions d’expert indépendant sur la situation des droits de l’homme au Mali le 1er mai 2018. Et son mandat a été renouvelé par le Conseil des droits de l’homme le 24 mars 2021 pour une période d’un an afin d’aider le gouvernement du Mali dans ses actions de promotion et de protection des droits de l’homme et dans la mise en œuvre des recommandations formulées dans les résolutions du Conseil.

A l’issue de sa visite (du 8 au 17 février), M. Tine a publié une déclaration et va soumettre son rapport annuel au Conseil des droits de l’homme de l’ONU à Genève en mars 2022.