Un déploiement rapide, pour un relais rapide de l’intervention française. C’est le souhait de la France exprimé par son ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, concernant la mission de la Misma (Mission internationale de soutien au Mali). Quelque 2 000 soldats doivent être déployés d’ici au 26 janvier. Huit pays ouest-africains – Nigeria, Togo, Bénin, Sénégal, Niger, Guinée, Ghana et Burkina Faso – ainsi que le Tchad ont annoncé leur contribution qui devrait ainsi comprendre à terme quelque 5 800 soldats.

Mais ces troupes seront-elles suffisamment nombreuses et efficaces pour permettre à la France de se retirer du Mali avant de s’embourber ? Eléments de réponse.

Qui participe au combat ?

L’armée malienne. C’est la grande interrogation. Aujourd’hui, aucune statistique fiable ne permet d’évaluer précisément ses effectifs. Selon la Banque mondiale, ils atteignaient en 2010 12 500 hommes. Mais depuis, l’armée malienne a été défaite dans le nord du pays. Son équipement est plus que limité : “Un fusil pour cinq hommes”, selon Libération, et il s’agirait notamment de vieilles kalachnikovs usées. Une bonne partie de l’artillerie et des transports de troupes ont été abandonnés aux islamistes lors de la débâcle dans le Nord. L’armée de l’air est quasi inexistante, faute d’avions capables de voler, mais aussi de pilotes.

Plus inquiétant, selon un expert européen cité par Libération (article payant), l’armée malienne n’a pas de “culture guerrière”. Démotivée et désorganisée, elle est incapable de résister aux assauts islamistes. Dans ce reportage de France 2, on découvre ainsi des soldats non seulement mal équipés, mais qui avouent se préparer à fuir en cas d’attaque.

A cela s’ajoutent des divisions en son sein, conséquence du coup d’Etat du capitaine Sanogo, en mars 2012.

L’armée tchadienne. Avec un contingent de 2 000 hommes, c’est le gros des troupes africaines envoyées sur place, et surtout l’armée la plus expérimentée. Habitués aux rébellions et aux traques dans le désert, les hommes de l’armée nationale tchadienne (ANT) sont aguerris et rompus à ce type de combats. Ils sont également mieux équipés, et peuvent s’appuyer sur une escadrille de six bombardiers Sukhoi-25 et des hélicoptères de combat MI-24, comme le rapporte RFI.

Mais l’ANT n’est pas réputée pour son professionnalisme et sa bonne conduite vis-à-vis des civils sur les terrains d’opération. Ses soldats se rendent notamment coupables d’exactions, comme le rapportait Human Rights Watch en 2010.

Les autres contingents. Il est impossible pour ces troupes, sauf pour celles du Nigeria, de participer aux combats pour la reconquête du nord du pays. “Elles sont sous-équipées, peu formées, comme l’armée malienne”, détaille pour francetv info Frédéric Lejeal, rédacteur en chef de la Lettre du Continent. Elles devraient être cantonnées à tenir les positions conquises par les armées françaises et maliennes.”Les seules troupes de ces pays réellement aptes au combat sont leurs gardes présidentielles. Des troupes qui ne vont sûrement pas être déployées pour une opération extérieure.”

La mise à niveau est-elle possible ?

Formation. Pour l’armée malienne, la tâche est immense et demandera du temps. L’Europe a décidé de former “en urgence” les soldats maliens, a expliqué le ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, sur Europe 1. Il s’agirait de 250 formateurs et 200 personnes pour les protéger. D’autres membres de la communauté internationale devraient faire de même, espère le ministre. Ces spécialistes devaient arriver plus tôt, rappelle Frédéric Lejeal, “mais l’offensive des islamistes a complètement bousculé le planning”.

Qui pour coordonner ? Même si l’armée française répète que les troupes maliennes remportent des victoires sur les islamistes, c’est elle qui est en première ligne et mène l’offensive. Ce rôle se cantonne principalement aux opérations de combat.

Pour ce qui est des forces africaines qui vont progressivement se déployer, les membres de la Misma seront sous le commandement du Nigeria et du général Shehu Abdulkadir. Sa feuille de route est claire pour le moment : il doit tenir les positions conquises et assurer la sécurité des populations. A charge pour cet anglophone de se faire comprendre de ses partenaires à majorité francophones.

Les moyens. Les responsables ouest-africains, réunis dimanche 20 janvier, ont estimé que leur intervention nécessitait un financement d’environ 500 millions de dollars (quelque 375 millions d’euros) alors que les besoins étaient évalués jusque-là entre 150 et 200 millions d’euros. “Cette sur-facturation est classique. Les pays qui participent espèrent en profiter. C’est une des raisons qui expliquent notamment l’intervention du Tchad”, explique Frédéric Lejeal, précisant que depuis la chute du régime de Kadhafi en Libye, seule l’Afrique du Sud a les moyens de participer au financement d’une telle opération.

L’Europe a proposé 50 millions d’euros. Ce qui semble aujourd’hui certain, c’est qu’en raison de la crise, les pays occidentaux vont limiter leur participation. La Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) a demandé l’aide de l’ONU. Mais comme l’explique Libération, les Etats-Unis, premier contributeur de l’organisation, s’y refusent. Une conférence des donateurs est prévue le 29 janvier à Addis-Abeba (Ethiopie), sous l’égide de l’Union africaine, pour accélérer la mobilisation.

 

Source  : FranceTV.info