L’intensification du conflit au Darfour, aggravée par des affrontements militaires et la violence inter-communautaire, « est source de graves inquiétudes », a souligné, ce matin, devant le Conseil de sécurité, le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, M. Hervé Ladsous.

Les institutions humanitaires estiment que, cette année, les affrontements au Darfour ont déjà provoqué le déplacement de 214 000 personnes, y compris 24 000 réfugiés vers le Tchad, a-t-il précisé.

Le Conseil de sécurité, a-t-il insisté, doit faire pression sur les parties concernées afin qu’elles parviennent à un règlement du conflit, en appuyant l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD).

M. Ladsous, qui présentait aux membres du Conseil le rapport du Secrétaire général sur la MINUAD*, a fait état des hostilités militaires, lesquelles, a-t-il dit, se sont poursuivies, au mois d’avril.

Il a condamné l’attaque dont a été victime, le 19 avril, une position militaire de la MINUAD à Muhajeria, dans l’est du Darfour. Cette attaque a été perpétrée par des éléments armés non identifiés et causé la mort d’un Casque bleu, a précisé M. Ladsous. Condamnant sans équivoque cet acte, il a exhorté le Gouvernement du Soudan à traduire ses auteurs en justice.

Le Gouvernement soudanais et la faction Minni Minawi de l’Armée de libération du Soudan (ALS) se sont affrontés à plusieurs reprises en avril, notamment à Labado et Muhajeria, dans l’est du Darfour, mais également près de Nyala, dans le sud du Darfour. En raison de ces affrontements, a-t-il fait remarquer, environ 33 000 personnes se sont regroupées et restent toujours concentrées autour des bases de la MINUAD à Labado et Muhajeria.

En outre, des avions militaires soudanais ont conduit, entre le 6 et le 13 avril, des opérations militaires par intermittence autour de ces deux villes. Le 16 avril, l’armée de terre, soutenue par les opérations aériennes, a repris le contrôle de Labado et Muhajeria. « La MINUAD examine actuellement les informations faisant état de pertes en vies humaines à la suite de ces affrontements mais, a-t-il fait observer, ces informations sont très divergentes.

M. Ladsous a souligné que la MINUAD et le personnel humanitaire ont été empêchés d’acheminer l’aide et les ravitaillements vers cette zone au cours de la période où ces villes étaient sous le contrôle de l’ALS-Minni Minawi. Cet accès n’a été possible qu’à partir du 18 avril.

Par ailleurs, des combats intercommunautaires sporadiques, particulièrement importants, se poursuivent au centre du Darfour et s’étendent vers l’est, ainsi que vers le nord. Ces violences auraient fait 68 morts et 60 blessés, selon les sources des communautés.

Les autorités soudanaises ont accordé 401 nouveaux visas au personnel de la police civile de la MINUAD, a indiqué M. Ladsous, tout en notant qu’au 25 avril, 858 visas étaient encore en attente, dont 533 pour la police civile.

S’agissant de la Conférence des donateurs sur le Darfour, qui s’est tenue à Doha, les 7 et 8 avril, le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix a précisé que le montant total promis pour la mise en œuvre de la stratégie de développement du Darfour est de 3,7 milliards de dollars.

Le représentant du Soudan, M. Daffa-Alla ElhagAli Osman, qui avait demandé à prendre la parole au cours de cette réunion, a indiqué, que la situation instable résultant des affrontements communautaires avait été maîtrisée au bout de quelques jours, assurant ainsi un retour à la normale.

Les accrochages entre les forces gouvernementales et des groupes rebelles se sont produits, en particulier, à la suite de fréquentes attaques par des éléments de la faction Minni Minawi de l’ALS. « Il est extrêmement important de bien comprendre que les différents groupes rebelles au Darfour ont vu leurs activités diminuer grâce à l’action du Gouvernement du Soudan », a-t-il souligné.

Par ailleurs, l’attaque menée contre des forces de la MINUAD jette, selon lui, la lumière sur certaines insuffisances de l’Opération hybride. Cette question mérite d’être examinée de très près, a-t-il souhaité, en affirmant que le Gouvernement du Soudan n’avait épargné aucun effort pour poursuivre les coupables de telles attaques et les traduire en justice. Il a également souhaité que la MINUAD puisse prendre toutes les mesures visant à prévenir les attaques lancées contre elle.

S’agissant de contraintes imposées à la MINUAD, le représentant a tenu à préciser que, « dans des cas très limités », le Gouvernement du Soudan préfère que l’Opération hybride ne pénètre pas dans des régions où elle risque d’être confrontée à de véritables dangers.

Au sujet de la délivrance de visas au personnel de la MINUAD, le représentant a indiqué qu’il avait rencontré lui-même M. Ladsous, le 7 avril dernier, pour l’informer qu’un comité de haut niveau avait été créé afin d’accélérer la procédure.

Il a exprimé l’espoir que les promesses de contributions faites lors de la Conférence des donateurs pour le Darfour, qui s’est tenue à Doha les 7 et 8 avril, permettront de financer les programmes de reconstruction et de développement au Darfour.

* S/2013/225
RAPPORTS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LE SOUDAN

Rapport du Secrétaire général sur l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (S/2013/225)

« Voilà maintenant 10 ans que le conflit du Darfour a surgi sur la scène internationale, et pourtant son règlement politique global se fait toujours attendre tandis que les combats continuent de manière sporadique », souligne le Secrétaire général, M. Ban Ki-moon, dans son dernier rapport, qui rend compte de l’évolution de la situation au Darfour, entre le 1er janvier et le 31 mars 2013.

En juillet 2011, le Gouvernement du Soudan et le Mouvement pour la libération et la justice (MLJ) ont signé le Document de Doha pour la paix au Darfour. « Il aurait permis, s’il avait été fidèlement appliqué, de traiter les causes du conflit et de jeter les bases de la paix », rappelle M. Ban. « Pourtant, 31 mois plus tard, l’accord n’a pas toujours pas été signé par toutes les parties et n’a, de ce fait, permis aucune amélioration significative et tangible pour la population du Darfour », poursuit-il.

Le Secrétaire général observe, toutefois, que les parties signataires du Document de Doha pour la paix au Darfour ont poursuivi leurs efforts pour mettre en œuvre cet accord, essentiellement pour ce qui est des dispositions relatives au partage des richesses et aux préparatifs d’une conférence des donateurs. En effet, plusieurs des institutions prévues dans l’accord ont été établies, notamment l’Autorité régionale pour le Darfour et ses organes subsidiaires.

« Ces institutions ont cependant besoin de capacités et de moyens supplémentaires pour pouvoir fonctionner efficacement », ajoute-t-il. Le Secrétaire général encourage donc le Gouvernement du Soudan à continuer de fournir à l’Autorité des ressources et des appuis réguliers et prévisibles afin qu’elle puisse s’acquitter efficacement de son mandat.

Par ailleurs, les engagements souscrits à la Conférence des donateurs sur le Darfour, qui s’est tenue à Doha les 7 et 8 avril, garantissent des ressources supplémentaires pour le relèvement, le développement et l’élimination de la pauvreté au Darfour.

Dans ce contexte, M. Ban encourage les donateurs et le Gouvernement du Soudan à honorer rapidement ces engagements, en soulignant que le lancement de projets de développement est aussi tributaire des mesures qui seront prises pour créer un environnement favorable. C’est pourquoi, il invite le Gouvernement du Soudan et l’Autorité régionale pour le Darfour à travailler dans ce sens et à faire en sorte que la promotion du relèvement et du développement mette en avant en priorité les besoins des communautés vulnérables et touchées par le conflit dans l’ensemble du Darfour.

« Pour que les promesses faites à la Conférence des donateurs sur le Darfour produisent des progrès tangibles sur le terrain, les organismes d’exécution et la MINUAD auront besoin d’accéder pleinement et en toute liberté à l’ensemble du Darfour afin de pouvoir remplir leur mandat », insiste également le Secrétaire général.

Pour parvenir à une solution globale et durable au conflit, il faudrait que les belligérants renoncent à la violence au profit du dialogue, a-t-il fait remarquer. Les répercussions de la situation actuelle de la sécurité au Darfour sur la sécurité du personnel de la MINUAD et des travailleurs humanitaires restent très préoccupantes, a-t-il ajouté avant de conclure.