Depuis mars dernier, la Réserve fédérale des Etats-Unis (FED) a relevé les taux d’intérêt de manière agressive en réponse à une inflation intérieure élevée, en exerçant une pression sur l’activité d’importation d’autres pays et régions. Certains pays africains ont ainsi connu une dévaluation accélérée de leurs monnaies. Pour atténuer la pression inflationniste, de nombreuses banques centrales africaines ont relevé les taux d’intérêt et resserré les liquidités, ce qui pourrait ralentir la croissance économique.

Charles Onunaiju, expert nigérian en relations internationales, a souligné que les indices économiques et le commerce extérieur de pays africains, dont le Nigeria, sont étroitement liés aux réserves en dollar, ce qui signifie que les Etats-Unis peuvent transférer la pression inflationniste vers ces pays par le biais de la politique monétaire.

La pression inflationniste importée des Etats-Unis a donné un coup de fouet à l’économie africaine en proie à une inflation galopante. Le taux d’inflation moyen du continent africain devrait s’accélérer pour atteindre 13,5% en 2022, sous effet d’une hausse des prix des produits de base, notamment l’énergie et les produits alimentaires, selon les Perspectives économiques en Afrique 2022 publiées par la Banque africaine de développement.

Le taux d’inflation du Kenya a enregistré une augmentation importante entre juillet 2021 et juillet 2022, principalement due à une hausse de 15,3% des prix des aliments et des boissons non alcoolisées, selon le Bureau national des statistiques du Kenya. En août 2022, le taux d’inflation du pays a atteint son plus haut niveau depuis cinq ans, soit 8,5%.

A Nairobi, la capitale kenyane, le coût de la vie est en forte hausse. “Le prix des denrées alimentaires de base a atteint un niveau effrayant le mois dernier, et les fruits deviennent plus chers”, s’est plaint Chiku, un commerçant local.

La flambée des prix touche également d’autres pays africains. Le Nigeria, première économie d’Afrique, a enregistré un taux d’inflation de 19,64% en juillet dernier. Le taux d’inflation en Afrique du Sud a atteint 7,8% dans le même mois, soit le niveau le plus élevé depuis la crise financière internationale de 2008.

Le ministre zimbabwéen des Finances, Mthuli Ncube, a déclaré que le Zimbabwe faisait depuis longtemps l’objet de sanctions illégales de la part des Etats-Unis et de l’Occident. L’inflation importée a exacerbé l’inflation intérieure, ce qui a rendu l’économie plus vulnérable et dévalué la monnaie locale de manière significative.

Afin d’atténuer la pression inflationniste, certaines banques centrales africaines ont été obligées de relever les taux d’intérêt et de resserrer les liquidités, ce qui pourrait ralentir la croissance économique nationale et régionale. Le rapport sur les perspectives économiques prévoit également que la croissance économique de l’Afrique sera de 4,1% en 2022, contre 6,9% en 2021.

L’inflation alimentaire au Nigeria a atteint 23,12% en août, et de nombreux Nigérians doivent consacrer 85% de leurs revenus à la nourriture, d’après une enquête. Plus de 14 millions de Nigérians connaissent une grave crise alimentaire et nutritionnelle, un nombre qui ne cessera de croître.

Des pays africains sont fortement dépendants des importations de denrées alimentaires et de pétrole brut, a indiqué l’économiste kenyan Ken Gichiga, accusant que la hausse des taux d’intérêt américain de renforcer le dollar et d’augmenter directement le coût de l’importation de ces produits de base.

De nombreux investisseurs internationaux s’étaient retirés d’Afrique en raison de la hausse des taux d’intérêt, ce qui a affecté les perspectives de développement économique du continent, a-t-il ajouté.