Des heurts violents sont survenus dimanche faisant au moins sept morts dans différentes localités du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du Cameroun, où des groupes de manifestants ont défié les forces de défense et de sécurité pour mettre à exécution leur menace de sécession de ces deux régions anglophones, selon des sources sécuritaires.

Près d’un an depuis les revendications corporatistes exprimées lors de manifestations distinctes de syndicats d’enseignants et d’avocats en novembre 2016 à Bamenda et Buea, respectivement principales villes des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, la tension est restée vive dans cette partie du territoire camerounais.

En dépit d’une série de mesures d’apaisement comme l’arrêt des poursuites judiciaires ordonné par le président Paul Biya au profit d’une cinquantaine de personnes arrêtées dans le cadre des violences enregistrées en marge de cette crise, et des appels au calme des autorités, des groupes d’activistes ont maintenu leur menace de création d’un nouvel Etat indépendant dans ces régions.

Ces activistes, sous la bannière du Southern Cameroons National Council (SCNC), une organisation non reconnue, ont choisi cette journée de dimanche 1er octobre, en référence à la date de la réunification du Cameroun francophone et du Cameroun anglophone en 1961 après leur séparation à l’époque coloniale, pour la naissance de la République dite de l’Ambazonie.

Pour contrer cette menace, les autorités avaient renforcé le dispositif de sécurité et décrété un couvre-feu résumé par une restriction des déplacements des personnes et la fermeture des frontières (terrestres et maritimes) dans les deux régions en crise.

Après une journée relativement calme la veille, où ces mesures ont semblé être respectées avec l’activité tournant au ralenti, la tension est montée dimanche. Dans plusieurs localités du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, des centaines voire des milliers de manifestants sont sortis pour manifester leur soutien à l’action du SCNC, dont les principaux leaders résident cependant dans des pays étrangers.

Ces manifestants, déterminés, n’ont pas hésité à attaquer les forces de défense et de sécurité, et provoqué des heurts violents ayant fait plusieurs morts, selon des sources concordantes.

C’est le cas à Kumbo, une localité de région du Nord-Ouest, où il est fait état de trois assaillants tués lors d’une attaque menée dimanche matin contre la prison, incendiée, a rapporté un responsable militaire joint par Xinhua. Dans la même région, les véhicules des préfets de Boyo et de Fundong ont également été incendiés.

A Fundong, les forces de maintien de l’ordre se déclaraient débordées par une marche d’un millier de personnes conduite dimanche après-midi par le maire de la commune et des parlementaires en direction de la sous-préfecture.

A Bamenda, la principale ville de la région, l’on annonce l’interpellation après une tentative de manifestation, de dix-sept personnes parmi lesquelles quatre figurant parmi la cinquantaine de détenus récemment remis en liberté dans le cadre de la mesure prise par le président Biya en août en vue de l’apaisement de la crise.

La situation semble plus tendue dans la région du Sud-Ouest, où les services de sécurité font état d’un conducteur de mototaxi et trois insurgés tués et de deux gendarmes blessés dans un accrochage survenu dimanche matin à Ikiliwindi, dans l’arrondissement de Kumba. Un hélicoptère de l’armée a dû intervenir pour rétablir la sécurité dans cette localité, affirme-t-on.

Dans la localité de Nkambé, un militaire a été gravement tabassé et son arme arrachée par la population à son domicile, alors qu’il venait de rentrer de son service de garde à la sous-préfecture. Face à la furie des manifestants, le préfet, le commandant de la compagnie de gendarmerie et ses 26 collaborateurs ont dû évacuer leurs postes.

C’est la même chose pour les unités de gendarmerie de Menji, où un millier de manifestants a déferlé sur les rues jusqu’à la chefferie où ils ont proclamé l’indépendance de l’Ambazonie en hissant son drapeau.

A Tombel, les locaux du parquet du tribunal ont aussi été incendiés.

La ville de Buea, chef-lieu de la région, apparaît comme l’épicentre des violences. Selon une source sécuritaire, un véhicule d’intervention de la gendarmerie a été incendié. Des coups de feu résonnaient. Les manifestants fortement mobilisés ont lancé une opération d’occupation de la résidence du gouverneur du Sud-Ouest, construite à l’époque de la colonisation allemande (1884-1916).

Ils affirment, disent-ils, en faire le siège des institutions de leur nouvel Etat.

A Mamfe, une autre ville du Sud-Ouest, deux activistes ont aussi été tués dans des affrontements avec les forces de défense et de sécurité.

Ces violences surviennent alors que le président camerounais séjourne en Europe, après avoir participé aux travaux de la 72e session ordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies tenus la semaine dernière à New York (Etats-Unis).

Pour dénoncer les menaces de sécession du SCNC et défendre l’unité et l’intégrité territoriale du Cameroun, son parti, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), a entrepris l’organisation d’une série de meetings populaires dans l’ensemble du pays depuis samedi.