BEIJING, 28 octobre (Xinhua) — Certaines parties de l’Afrique de l’Ouest et de l’Est ont émergé comme de nouveaux points de transit pour les trafiquants de drogue, qui utilisent des navires marchands ou des bateaux plus discrets pour le trafic de leur produits en provenance d’Amérique latine ou d’Asie centrale et à destination des marchés de consommation. Pire encore, le problème de la drogue est lié à d’autres formes de crime organisé tels que le terrorisme, a averti un responsable de la Commission de l’Union africaine (CUA).

Les frontières poreuses et les centaines de kilomètres de côtes non surveillées, les Etats fragiles et criblés de conflits, les systèmes judiciaires affaiblis, la corruption, le taux élevé de chômage chez les jeunes, et d’autres défis sociaux ont rendu le continent vulnérable au trafic de drogue, a indiqué Olawale Maiyegun, directeur du Département des Affaires sociales de la CUA.

HAUSSE SPECTACULAIRE DU TRAFIC DE DROGUE

Selon l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), les saisies d’héroïne ces dernières années ont été particulièrement élevées au Nigeria, au Bénin, au Togo sur la côte ouest, et en Tanzanie sur la côte est de l’Afrique.

Lors d’une réunion récemment organisée à Harare, au Zimbabwe, des experts africains en matière de lutte contre la drogue affirment que l’Afrique de l’Ouest est devenue une voie de transit majeure pour le trafic de cocaïne entre l’Amérique du Sud et l’Europe, et que l’Afrique de l’Est a servi de point de transit pour le trafic d’héroïne en provenance de l’Asie de l’Ouest, y compris l’Afghanistan et le Pakistan.

En Afrique de l’Est, les saisies de drogue ont été pratiquement multipliées par 10 depuis 2009.

Les systèmes de sécurité sont souvent assez insuffisants en Afrique, et la région située près de la péninsule arabique facilite également les financements provenant d’un certain nombre de sponsors des réseaux terroristes, analyse Li Wei, directeur du Centre de la recherche antiterroriste à l’Institut chinois des relations internationales contemporaines.

Ces dernières années, la région connaît également une hausse d’autres formes de criminalité, telle que le trafic de drogue et la corruption, ce dernier constituant un élément indispensable au financement du terrorisme, de ses relais et de ses complices, a-t-il ajouté.

UNE TENDANCE PREOCCUPANTE

Il est préoccupant de constater que les liens entre les organisations terroristes et les réseaux mafieux impliqués dans le trafic de drogue sont de plus en plus étroits .

L’organisation terroriste Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) comporte trois branches chargées du transport de drogue de l’Afrique du Nord vers l’Europe destiné à financer ces activités terroristes.

Les recettes du trafic de drogue sont susceptibles d’être utilisées par des groupes extrémistes en Afrique de l’Est et de l’Ouest pour financer leurs activités terroristes dans cette région de plus en plus vulnérable, selon Olawale Maiyegun, qui a indiqué à l’agence Xinhua en marge d’une réunion d’experts sur la lutte contre le trafic de drogues récemment tenue à Harare que le problème de la drogue est étroitement lié à d’autres formes de crime organisé telles que le terrorisme et le trafic des armes légères.

“Dans le cas du Mali, les revenus du trafic de drogue ont été utilisés pour financer la déstabilisation dans la partie nord du pays”, a-t-il indiqué avant d’ajouter que le lien est aussi évident dans certains cas. Le Kenya souffre encore plus du crime organisé, notamment la piraterie, le trafic de drogue et le terrorisme.

Au Nigeria, où le trafic de drogue est devenu un sérieux problème, les autorités luttent contre le groupe extrémiste islamiste Boko Haram qui est également impliqué dans le trafic de drogue, et dont les activités visent à créer un Etat islamique.

En proie à une instabilité chronique, la Guinée Bissau en Afrique de l’Ouest est devenue un paradis de la drogue. Les trafiquants de drogue utilisent des navires marchands transportant des conteneurs ou des bateaux plus discrets pour faire de la contrebande de cocaïne pure en provenance du Brésil. La drogue est ensuite acheminée en Guinée Bissau, avant de partir pour l’Europe et les Etats-Unis. Le trafic de drogue constitue un facteur important d’instabilité sociale dans le pays.

 EFFORTS REGIONAUX ET INTERNATIONAUX INDISPENSABLES

L’Afrique a actuellement besoin de réponses solides pour contrer le crime organisé, qui devient de plus en plus “sophistiqué”.

JIN Can Rong, directeur-adjoint de l’Institut des relations internationales de l’Université du peuple de Chine, a fait savoir ses points de vues pour contrecarrer l’association du trafic de drogue avec le terrorisme:

Tout d’abord, pour réagir aux fléaux transnationaux, une coopération régionale semble indispensable. Les gouvernements du continent devraient commencer par le renforcement des échanges d’informations et la coopération en matière de surveillance des frontières et dans la lutte contre le trafic de drogue.

Deuxièmement, pour s’attaquer au fond du problème, le développement économique est une tâche importante pour les pays africains. Le développement socio-économique permettrait notamment de créer des emplois et de s’attaquer aux racines sociales du terrorisme, mais aussi de renforcer l’Etat dans la lutte contre le crime organisé.

Troisièmement, il n’existe pas de modèle démocratique prêt à l’emploi qui puisse être appliqué de façon aveugle, les pays africains devraient adapter leur système de gouvernance conformément à leurs propres situations.

Quatrièmement, compte tenu de la provenance et la destination de la drogue, ainsi que la menace que représente l’association entre trafic de drogue et terrorisme pour le monde entier, une coopération internationale est plus que nécessaire. Le monde a la responsabilité d’aider les Africains dans leur lutte contre la drogue et le terrorisme, deux fléaux ” importés” malgré eux sur leur continent.