Au Tchad, la production de l’or noir a baissé de manière considérable en 2016, entrainant une chute vertigineuse des revenus qui n’ont servi qu’à éponger une partie du prêt contracté par l’Etat auprès de Glencore, selon le dernier rapport du Collège de contrôle et de surveillance des revenus pétroliers (CCSRP) publié vendredi.

Le rapport du CCSRP est le seizième du genre depuis la mise en place de l’institution. “Il a pour rôle de mettre en exergue la situation des marchés et des subventions alloués aux ministères prioritaires et aux régions productrices. Cet exercice obéit à deux objectifs: la traçabilité des opérations autour des revenus pétroliers directs et l’évaluation des prévisions initiales”, déclare Mahamat Awaré Neïssa, président du CCSRP.

Les chutes des cours du pétrole, commencées en 2014, ont encore marqué l’année 2016. La production totale de l’année 2016, pour tous les consortiums réunis, s’élève à un peu plus de 43 millions de barils, soit près de 10% de moins que la production totale de 2015 (52 millions de barils). Le consortium Esso (composé par la multinationale américaine, la malaisienne Petronas et la Société des hydrocarbures du Tchad) reste toujours le leader avec près de 22 millions de barils (47% de la production totale). Il est talonné de près par la CNPCIC (China national petroleum international corporation) avec plus de 19 millions de barils (42%), suivie par Glencore avec 5 millions de barils (11%).

Selon le rapport du CCSRP, la CNPCIC est un acteur exemplaire dans le secteur pétrolier tchadien. La multinationale chinoise s’est engagée à former et développer les compétences des employés nationaux afin d’avoir une main-d’œuvre qualifiée et compétente à tous les niveaux de l’organisation et capable d’atteindre les objectifs commerciaux.

A cet effet, un plan de nationalisation des ressources humaines sur cinq ans a été élaboré. Ce plan est destiné à fournir un remplacement ordonné des expatriés par des Tchadiens compétents; à s’assurer que la société entretient un personnel qualifié et capable de gérer les opérations de manière compétente, efficace et en toute sécurité; à assurer un placement réussi du personnel tchadien de manière structurée par le recrutement, la formation, le développement des compétences et la mise à niveau des compétences professionnelles.

Sur le plan de la production, “malgré les difficultés liées à la chute des prix, la CNPCIC augmentera ses investissements afin d’assurer le but de la bonne exécution du développement des nouveaux et stabilisera la production des anciens champs en 2017”, précise le rapport. “En plus, elle va créer d’emplois pour les employés locaux et des bénéfices économiques pour parvenir à une coopération gagnant-gagnant entre la CNPCIC et le gouvernement tchadien”.

Depuis 2011, la production de la CNPCIC concerne deux sources: la raffinerie de Djarmaya (à une soixantaine de kilomètres au nord de N’Djaména) pour la consommation interne et l’exportation.

En 2016, sur les 43 millions de barils produits, un peu plus de 41 millions ont été enlevés. Ce sont donc 20 milliards francs CFA que le Tchad a perçus en termes de revenus pétroliers directs. Par rapport à 2015 où le montant des redevances dépassait les 69 milliards de francs CFA et 2014 où il était de 72 milliards de francs CFA, c’est une chute vertigineuse et sans pareil que le Tchad a subie et qui devrait continuer en 2017.

Ce montant de redevances de l’année 2016 a été réparti de la manière suivante: 10 milliards de francs CFA pour les secteurs prioritaires, 1 milliard pour les régions productrices et 9 milliards pour le Trésor public.

En effet, selon la loi n°002/PR/2004 régissant la répartition des redevances pétrolières directes, 50% des redevances et 50% des dividendes sont destinés à couvrir les dépenses d’investissement relatives aux secteurs prioritaires (justice, éducation, santé, agriculture, élevage, défense, infrastructures, etc.), 45% des redevances et 50% des dividendes à couvrir les dépenses de fonctionnement courantes de l’Etat, et 5% des redevances sont distribués aux collectivités territoriales décentralisées des régions productrices conformément aux dispositions de l’article 211 de la Constitution du Tchad.

“Cependant, une grande part des revenus provenant de la vente du brut [en 2016, Ndlr] a permis d’honorer les engagements vis-à-vis des créanciers, particulièrement les prêts Glencore”, précise Mahamat Awaré Neïssa.

En 2013, le gouvernement tchadien avait contracté un emprunt de 1,3 milliard de dollars auprès de la transnationale suisse des matières premières, pour reprendre les intérêts de Chevron dans le consortium (Esso-Chevron-Petronas) qui exploite le pétrole de Doba, dans le sud du pays. Un prêt qui s’est avéré vite une erreur, “une démarche irresponsable” ou “un marché de dupes” selon les propres termes du président tchadien Idriss Déby Itno qui avait dénoncé un “délit d’initiés, car deux semaines après que nous ayons acheté les 25% de Chevron, le pétrole a chuté de 100 dollars le baril à 40 dollars”.

Depuis, les autorités tchadiennes tentent de renégocier ce prêt dont il espère un rééchelonnement pour un montant de 234 milliards de francs CFA.