Au cours de la 8ème Journée nationale de prière pour la cohabitation pacifique et la concorde nationale, organisée mardi sur tout le territoire tchadien par la Plateforme des leaders religieux musulmans, catholiques et protestants, ces derniers et le président tchadien ont prévenu sur les dérives communautaristes de leurs compatriotes, notamment jeunes, et les ont invités à plus d’unité.

Dans la salle de conférence du Palais du 15 janvier, des centaines de personnes se sont rassemblées pour la grande prière interconfessionnelle : le président de la République, des membres du gouvernement, des députés, des ambassadeurs et des Tchadiens anonymes, musulmans, catholiques et protestants.

“La journée du 28 novembre s’est désormais imposée dans notre calendrier national comme un signal fort de notre volonté de vivre ensemble dans la cohésion sociale, la concorde et la paix et nous nous en réjouissons”, a déclaré Mgr Edmond Djitangar Goetbe, archevêque métropolitain de N’Djaména.

En 2010, le 28 novembre a été déclarée par le gouvernement “Journée nationale de prière pour la paix, la cohabitation pacifique et la concorde nationale”. Elle coïncide avec l’anniversaire de la proclamation de la République du Tchad, le 28 novembre 1958.

Pour la 8ème édition, il a été retenu comme thème : “main dans la main, œuvrons pour le développement, la solidarité et la justice dans le contexte de crise socio-économique”. Mgr Edmond Djitangar Goetbe a exhorté tous les Tchadiens à éviter, sinon à refuser d’être égoïstes, injustes, de marginaliser les uns les autres, d’être violents et à marcher tous ensemble comme un seul homme pour faire de leur pays “le plus beau d’Afrique centrale” et à œuvrer pour son développement.

Le chef de l’Eglise catholique au Tchad a appelé les chefs d’Afrique et de l’Union européenne qui se réuniront mercredi et jeudi à Abidjan en Côte d’Ivoire à “trouver de vraies solutions aux problèmes de vie et de mort qui hypothèquent l’avenir de notre jeunesse et partant de notre continent”.

Pour le président tchadien, Idriss Déby Itno, la journée nationale de prière œcuménique est une initiative exemplaire pour les Tchadiens qui ont connu les déchirures des moments les plus sombres de l’histoire du pays avec pour point culminant la guerre civile de 1979 et les longues décennies suivantes de rébellion armée.

“C’était la main politique, mais il faut dire que c’était la main extérieure qui a pesé sur le Tchad, qui nous a conduits pendant plus de quarante années de guerres, de déchirures avec ce cortège de morts, de vies détruites”, a rappelé le président Déby Itno, qui a exhorté ses compatriotes à ne pas retomber dans ces travers, ces affres connues.

“Aujourd’hui, cette belle communion entre les trois communautés religieuses, communion de cœur et d’esprit, est un modèle, un laboratoire en matière de culture de la paix, de dialogue, de tolérance et de cohésion”, s’est-il réjoui.

Le secrétaire général du Conseil supérieur des affaires islamiques (CSAI, autorité suprême de l’islam au Tchad), cheikh Abdadayim Abdoulaye Ousman, a tiré la sonnette d’alarme sur des dérives dangereuses sur les réseaux sociaux.

“C’est très grave. J’ai été personnellement sidéré et abattu par la violence des mots, des termes et des expressions que nos jeunes utilisent pour se faire une guerre complètement insensée et stupide”, a affirmé le président Déby Itno, soulignant qu’en aucun cas, Internet ne doit servir à des fins divisionnistes et politiciennes.

Au Tchad, il y a des communautés comme dans tous les pays, mais il n’y a pas de place pour le communautarisme, a relevé le chef de l’Etat tchadien. “Tout autour de nous, tous ceux qui ont cultivé le communautarisme ont débouché sur une guerre fratricide qui continue jusqu’à aujourd’hui. Fort de toutes ces expériences, je vais livrer une guerre sans merci à tous ceux qui alimentent et entretiennent le communautarisme, le sectarisme et le régionalisme”, a-t-il prévenu.

Le président Déby Itno a convié les leaders religieux à développer, dans leurs prêches et sermons, des messages de sensibilisation sur la culture du dialogue interreligieux et de la cohabitation pacifique, en particulier à l’endroit des jeunes. “Nous devons tous comprendre que le Tchad est un patrimoine commun et un héritage collectif appartenant à tous les Tchadiens, à tous les enfants de Toumaï”, a-t-il conclu.

A la fin de la prière collective, le président Déby Itno et les leaders des trois religions monothéistes ont lâché dans les airs des colombes, symbole de paix.