Au Tchad, le cancer est devenu un véritable problème de santé publique qui fait des ravages en silence. Pour le freiner, le gouvernement s’appuie sur la coopération sud-sud, notamment avec le Maroc qui dispose d’une expertise dans le domaine.

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le cancer fait plus de 7,5 millions de victimes dans le monde par an, dont plus de 70% dans les pays à faible et à moyen revenus tel que le Tchad.

Le cancer est aujourd’hui un problème de santé publique. “Le cancer tue plus que le sida, le paludisme et la tuberculose réunis, mais il figure parmi les maladies orphelines et puisqu’on en parle à peine, il continue de faire des victimes”, avait déploré la Première dame du Tchad, Hinda Déby Itno, en lançant la lutte contre le cancer dans son pays, en janvier 2015.

Ayant pris la mesure du danger, Mme Hinda Déby Itno, qui préside l’Organisation des Premières dames d’Afrique contre le sida, a décidé de s’attaquer au cancer, promettant de faire du plaidoyer à tous les niveaux pour mobiliser des ressources financières, l’appui technique et matériel au profit dudit programme.

Une association dénommée “Action tchadienne de lutte contre le cancer” avait été portée sur les fonts baptismaux. Elle est présidée par la députée et ancienne ministre de la Santé publique, Aziza Baroud, elle-même atteinte de cancer.

En dépit des efforts, le cancer poursuit son avancée. “La situation est caractérisée par une faible capacité diagnostique des hôpitaux, en l’occurrence les grands hôpitaux nationaux, et une inexistence de la prise en charge thérapeutique, ainsi qu’une faible fonctionnalité du Programme national de lutte contre le cancer pour coordonner la lutte contre ces maladies dans le pays”, déclare Assane Nguéadoum, ministre tchadien de la Santé publique.

Le gouvernement tchadien avait en effet mis en place, en avril 2013, un Programme national de lutte contre le cancer. Mais pour venir à bout du fléau, il doit relever un triple défi: humain, logistique et comportemental.

“Nous n’avons pas de personnel qualifié”, confie Dr Ali Garandi, coordonnateur du Programme national de lutte contre le cancer. Il reste à ce jour le seul cancérologue au Tchad. “Avec le projet du Centre de cancer, prédispositionné avec le gouvernement tchadien et l’Agence pour l’énergie atomique, des bourses d’études ont été attribuées pour la formation du personnel en Algérie”, ajoute-t-il.

Par ailleurs, les structures sanitaires adéquates contre le cancer font également défaut au Tchad. A l’Hôpital moderne de N’Djaména, la capitale, il a été prévu une unité de cancérologie qui tarde pourtant à démarrer.

A l’Hôpital général de référence national, il existe, depuis quatre ans, un appareil de dépistage de cancer de sein, mais les femmes ne s’y bousculent pas. Seulement sept à quinze femmes sont reçues par semaine, faute d’information. Si des Tchadiennes étaient obligées d’aller dépenser une fortune au Cameroun, en Côte d’Ivoire, en Afrique du Sud ou en France, pour se faire dépister du cancer, elles ont aujourd’hui la possibilité de le faire sur place, moyennant 15.000 F CFA (30 dollars).

Mais la situation reste préoccupante, ce qui a amené le gouvernement tchadien à privilégier la lutte contre ces maladies dans le cadre de la coopération sud-sud. Un accord-cadre de coopération en matière sanitaire et un mémorandum d’entente et de coopération dans la lutte contre le cancer ont été ainsi signés, en janvier 2016, respectivement avec le ministère marocain de la Santé et la fondation Lalla Salma.

Le mémorandum d’entente et de coopération sanitaire avec la fondation, vise à soutenir le ministère tchadien de la Santé dans l’organisation et la promotion des campagnes d’information des populations à risque, la formation des professionnels de santé dans le domaine de l’oncologie, le développement des activités d’oncologie pédiatrique en faveur des enfants atteints de cancer, l’assistance technique pour la création d’un centre d’oncologie à N’Djaména et pour le soutien psychologique et social des familles affectées par les cancers.

Lundi et mardi, une délégation de la fondation Lalla Salma a échangé avec des cadres du ministère, des directeurs d’hôpitaux, des partenaires techniques et financiers, ainsi que diverses associations, sur la lutte contre le cancer au Tchad.

“La présence de la mission de la fondation est d’une grande importante car elle marque le début de la concrétisation des engagements communs que nos deux institutions ont pris pour rendre effective la lutte contre le cancer au Tchad”, s’est réjoui Assane Nguéadoum.

Même satisfaction au sein de la délégation marocaine. “La lutte contre le cancer fait partie des lignes prioritaires de la collaboration bilatérale entre le Royaume du Maroc et le Tchad”, a précisé Dr Youssouf Chami Khazraji, de la fondation Lalla Salma qui s’est félicité de “l’excellente qualité” et de “l’étroitesse” des relations entre les deux pays.

“C’est ce qui a facilité les travaux de la commission pour sortir avec un programme très concret, très pertinent à mettre rapidement en place pour l’intérêt du malade atteint du cancer en République du Tchad”, a-t-il conclu.