N’DJAMENA, 10 septembre (Xinhua) — Au Tchad, très peu d’ utilisateurs ont accès à l’internet, très cher et de moindre qualité. Pour réduire le fossé numérique, les autorités nationales misent sur de gigantesques projets: notamment l’interconnexion à deux fibres optiques et la création d’un Centre africain des technologies de l’information et de la communication.

“Les offres de connexion internet, presque identiques chez Celtel et Tigo (les deux compagnies étrangères qui dominent le marché de la téléphonie mobile, Ndlr), demeurent plus chères que celles des autres pays voisins. Les tarifs de connexion sont les plus chers d’Afrique subsaharienne”, tels sont les résultats de la dernière enquête sur la téléphonie au Tchad, publiés fin août 2014 par l’Office tchadien de régulation des télécommunications (OTRT).

“Pour avoir accès à l’internet illimité d’un mois au Tchad actuellement, il faut débourser le tiers du salaire d’un travailleur moyen de la Fonction publique ou 83% du SMIG (salaire minimum interprofessionnel garanti)”, précise l’OTRT.

Selon Kobobé Onsou, chef de section Informatique à l’OTRT, si on peut constater qu’aU Sénégal, par exemple, plus le volume de connexion augmente, plus les offres proposées par les opérateurs deviennent moins chères.

“Les offres de connexion illimitée des opérateurs du Tchad sont plus de 2,6 fois plus chères que celles du Sénégal”, ajoute-t-il.

La connexion internet mobile a ainsi contribué à doubler presque les chiffres d’affaires des deux plus grands opérateurs de la téléphonie mobile. De 3,6 milliards F CFA (environ 7,2 millions USD) en 2012, le chiffre d’affaires cumulé des deux a atteint 6 milliards en 2013, soit une augmentation de 77%.

Fin 2013, seulement 14.689 consommateurs sont abonnés à l’ internet fixe, tandis que 675.387 autres ont utilisé l’internet mobile, soit 6% d’une population globale estimée à plus de 12 millions d’habitants.

Par ailleurs, si l’internet est cher au Tchad, sa qualité laisse à désirer. Selon l’enquête de l’OTRT, la capacité de transmission internationale du pays est passée de 134 mégabits par seconde à 186 Mbps, entre les deux dernières années.

“Les liaisons internationales, via les satellites, par beaucoup d’opérateurs élèvent le coût, limite la bande passante et réduit la qualité, alors que la libération de la fibre optique et de l’ internet est loin d’être une réalité au Tchad”, explique Moupeng Tabah, directeur des Etudes et Prospectives à l’OTRT.

Pour augmenter considérablement le volume du trafic et les chiffres d’affaires, il conseille aux opérateurs et fournisseurs d’ accès à l’internet à baisser le tarif d’interconnexion.

Depuis quelques mois, les autorités tchadiennes s’activent à réduire le fossé numérique qui existe entre leur pays et les autres de la sous-région, en misant sur les troisième et quatrième générations (3G et 4G) de la téléphonie mobile et la fibre optique.

Les licences d’exploitation des 3G et 4G ont attribuées aux compagnies étrangères qui dominent le marché de la téléphonie mobile. Selon celles-ci, Quant à la fibre optique, son utilisation est désormais mutualisée entre tous les opérateurs de téléphonie mobile.

Après le maillage du territoire national en fibre optique venant de l’Océan Atlantique, via le Cameroun, le Premier ministre tchadien Payimi Kalzeubé Deubet a lancé, fin juin 2014, les travaux de pose d’une nouvelle fibre optique devant lier la capitale au Soudan voisin.

Suite logique de la fibre optique venant du Cameroun, il s’agira concrètement de relier N’Djaména à la ville soudanaise d’El-Geneina. Les travaux, sur une distance de 1.500 kilomètres, seront exécutés sur huit mois par la multinationale chinoise Huawei qui figure parmi les 500 sociétés les plus puissantes du monde et coopère depuis 2005 avec les opérateurs tchadiens de téléphonie mobile.

Le coût global de la fibre optique Tchad-Soudan est estimé à 19, 3 milliards F CFA (soit 38,6 millions USD), sur financement propre de l’Etat tchadien.

“Le Tchad ne fait que rattraper son retard préjudiciable dans le secteur, en cherchant à réduire le fossé numérique, par rapport à d’autres pays de la région. Le recours à la fibre optique, comme moyen de support des télécommunications, devient aujourd’hui incontournable”, a déclaré Daoussa Déby Itno, ministre tchadien des Postes et des Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication.

Selon ses promoteurs, ce projet renforcera la stabilité de la fibre optique du Tchad, diminuera les frais de sa location, permettra de naviguer à haut débit sur l’Internet et améliorera la performance des 3G et 4G. Il servira de plate-forme sur lequel plusieurs applications pourront être réalisées, comme l’éducation et le traitement médical à distance.

Depuis mardi, le gouvernement tchadien tient dans la capitale un Salon international des technologies de l’information et de la communication (SITIC), avec pour objectifs d’intégrer le Tchad dans le réseau international haut débit en fibre optique, de vulgariser l’emploi des TIC en milieu urbain et rural, de créer des télécentres communautaires polyvalents, de finaliser la réflexion sur la stratégie nationale des TIC, etc.

En ouvrant cette rencontre d’expositions et d’échanges, le président Idriss Déby Itno a fait part de sa vision de faire de N’ Djaména le hub des TIC en Afrique, en y créant notamment un Centre africain des technologies de l’information et de la communication (CATI), qui sera dédié aux jeunes africains pour promouvoir l’ invention, l’innovation et la production dans le domaine des TIC et de l’audiovisuel. Mais d’ici à la réalisation de “mégaprojet panafricain”, le fossé numérique est très grand.